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Semis de céréales et pluie

« Mieux vaut retarder les chantiers et privilégier de bonnes conditions »


TNC le 20/11/2019 à 08:56
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Au 11 novembre 2019, l'observatoire Céré'Obs de FranceAgriMer comptabilisait 72 % des blés tendres semés contre 92 % l'année dernière à la même date et 52 % d'entre eux levés contre 66 % en 2018. Pour optimiser les semis tardifs, quelques adaptations techniques sont à prendre en compte.

Avec des cumuls de précipitations exceptionnels depuis la mi-septembre – par exemple, 435 mm comptabilisés à Licques (Pas-de-Calais) entre le 15/09 et le 15/11 pour un cumul moyen annuel autour de 900 mm – les chantiers de récolte et de semis d’automne ont pris du retard. Pour les semis restant à réaliser, « mieux vaut les décaler » et privilégier, autant que possible, « de bonnes conditions d’implantation », expliquait Élodie Gagliardi, ingénieur régional Arvalis Hauts-de-France, lors d’une réunion de techniciens organisée à Bapaume (Pas-de-Calais) le 15 novembre dernier.

À lire : [Témoignages d’agris] Semis de céréales – Labourer ou non ? La météo remet cette question au premier plan 

« Le potentiel de rendement se limitera à – 10 voire – 20 % pour une même variété », excepté les variétés tardives (5/5,5 à épiaison) « qui voient leur potentiel chuter un peu plus vite », poursuit Élodie Gagliardi. Dans les Pays de Loire, les essais Arvalis montrent des variations de rendement de 0 à – 25 % pour des semis de fin novembre. Au-delà de décembre, « les pertes de potentiel peuvent aller de 30 à 40 % dans cette région. Il faudra alors donc bien évaluer l’intérêt technico-économique de produire une céréale d’hiver. Ainsi, dans les sols les plus sensibles à l’hydromorphie, où il est peu probable que des semis puissent être réalisés en 2019, il peut être plus intéressant d’envisager une culture d’été », précisent les équipes Arvalis des Pays de Loire.

Quelles décisions prendre quant au choix variétal ?

En cas de semis tardifs jusque début décembre, voire mi-décembre dans la zone Nord, pas besoin de se préoccuper de l’alternativité. Les variétés seront suffisamment exposées à des températures vernalisantes (entre 3 et 10° C) pour pouvoir monter à épi. « Toutefois, un semis au-delà de la plage conseillée perd en potentiel car davantage exposé aux accidents climatiques (échaudage, déficit hydrique…). Aussi, plus la variété semée est tardive à maturité, plus elle risque d’être pénalisée en cas de semis tardif. On privilégiera donc les variétés précoces à demi-précoces ».

Dans le cas de semis très tardifs (au-delà de la mi-décembre), « le changement de variété peut là s’avérer indispensable ». Cependant, « il n’est pas nécessaire de se ruer immédiatement vers des variétés alternatives ou de printemps. En effet, les variétés de type ½ hiver ou ½ alternatives restent souvent les plus productives pour des semis jusqu’en février, et cela même si elles présentent une tardiveté significative (+ 5 à 10 jours à épiaison) par rapport aux autres variétés de printemps ».

Effet de l’alternativité sur le rendement en situation de semis de rattrapage (©Arvalis-Institut du végétal – 25 essais 2002-2018)

Revoir à la hausse la densité de semis

Le décalage de la date de semis pouvant entraîner un «  risque de perte à la levée (limaces, risque d’hydromorphie à des stades sensibles, lenteur de la levée), et un tallage fortement réduit », il est nécessaire d’adapter la densité de semis.

Densités de semis optimales pour des semis tardifs. (©Données Arvalis/Création TNC)

Un décalage est à attendre aussi pour les stades de développement. « Attention donc aux dates calendaires habituelles : épi 1 cm pour régulateur et fertilisation par exemple », ajoute Élodie Gagliardi.

Adapter aussi la protection des cultures

En ce qui concerne les adventices, la pression pourrait être limitée cette campagne : une partie ayant levé en octobre, cela a eu un effet de faux-semis. De plus, le recours au labour probablement accru « devrait permettre de réduire la pression en graminées, mais possiblement en provoquant un basculement de flore vers plus de dicotylédones dont les graines auront été mises en surface par le labour », expliquent les équipes Arvalis. « Les désherbages d’automne seront parfois compromis ou impossibles, obligeant à un recours à des désherbages de sortie d’hiver ».

Côté maladies et ravageurs, les semis tardifs devraient faciliter « l’évitement des insectes d’automne ». Attention par contre aux limaces : à cause des levées plus lentes, les plantules pourraient être plus exposées. « Au printemps, le moindre inoculum dans les parcelles et le rythme accéléré des sorties de feuilles devraient permettre de réduire les risques précoces de maladie. »

À noter également : la fertilisation sera sûrement à adapter. « Le potentiel de rendement devra être revu à la baisse, l’enracinement des céréales sera tardifié, notamment en sortie d’hiver et au printemps et le faible tallage causé par le semis tardif devra peut-être être soutenu en sortie d’hiver par des apports adaptés ».