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Académie d'Agriculture de France

Peut-on lutter contre l’érosion des sols? (partie 2)


Christian VALENTIN, Membre de l'Académie d'Agriculture de France le 06/01/2021 à 15:48
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Cet article fait suite à l'article publié le 11/12/2020 : Peut-on lutter contre l'érosion des sols ? (partie 1). Il développe les méthodes de conservation des sols.

Pourquoi est-il difficile de mesurer et de prévoir les pertes en sol ?

Une des plus grandes difficultés d’étude de l’érosion hydrique et éolienne réside dans la diversité des processus mis en jeu, chacun d’entre eux dépendant de l’échelle considérée. Pour cette raison, il est impératif de mentionner l’échelle à laquelle les mesures sont effectuées : micro-parcelles (inférieure ou égale à 1 m²), parcelles classiques d’érosion (de longueur généralement supérieure à 10 m), micro-bassins versants (de l’ordre de l’hectare), petits (de l’ordre du km²) et grands bassins (plusieurs dizaines de milliers de km²).

Les processus d’érosion hydrique et éolienne obéissent à des effets de seuils, et ne sont donc pas linéaires, en grande partie du fait de l’importance des événements climatiques extrêmes. Ainsi la probabilité de mesurer les effets de ces événements augmente avec le temps. Dès lors, les moyennes de pertes en terre calculées pour des périodes de quelques années présentent de fortes incertitudes.

Comment conserver les sols ?

Les principes de conservation des sols découlent de la connaissance des processus et facteurs d’érosion aux différentes échelles. Des sols moins sensibles à l’encroûtement superficiel, plus motteux, offriront une meilleure résistance aux érosions hydrique et éolienne. Ainsi, il importe de renforcer la stabilité structurale des agrégats superficiels, en augmentant la teneur en carbone organique par apport de fumier, de boues, et d’une manière générale de produits résiduaires organiques. L’apport d’amendements calciques ou calcomagnésiens (chaulage), tend également à améliorer la stabilité structurale des sols.

C’est toutefois la protection la plus proche du sol qui s’avère la plus efficace contre l’érosion par rejaillissement (splash), contre l’érosion en nappe, ainsi que l’érosion éolienne à l’échelle de la parcelle. Tel est le cas notamment des résidus de culture ; ainsi, les pâturages du Sahel présentent une bien plus faible érosion éolienne que le Sahara ou même que les champs cultivés du sud du Sahel. A contrario, un couvert arboré dépourvu de sous-bois – comme c’est souvent le cas pour des plantations – n’aura pas d’effet protecteur et pourra même augmenter considérablement les risques d’érosion, en favorisant l’augmentation de la taille des gouttes qui auront traversé son couvert.

À l’échelle du versant, il est très important de limiter la vitesse de ruissellement pour réduire les risques d’apparition de rigoles et de ravines. Ainsi, depuis au moins l’âge du Bronze, les paysans ont cherché à réduire l’inclinaison de pente par la construction de terrasses. Maintenant, l’abandon de ces terrasses, consécutif à l’exode rural dans le sud de l’Europe, entraîne une érosion en ravines très marquée. En favorisant l’augmentation de la taille des parcelles, la mécanisation du travail du sol a augmenté les risques d’érosion. En effet, plus un champ sera grand, plus seront élevées les vitesses du vent au sol et du ruissellement. Des parcelles de taille limitée tendent, de plus, à réduire l’érosion aratoire. Il importe également d’augmenter la rugosité aérodynamique de la surface du sol, en plantant des haies vives brise-vent ou en établissement un quadrillage de pailles (voir ci-dessous).

Quadrillage de paille de roseau pour lutter contre l’érosion éolienne. Désert du Taklamakan, Chine. (photo C. Valentin)

Toute forme de fractionnement du sol favorise l’érosion. Il est ainsi préférable d’éviter tout travail du sol sur fortes pentes pour éviter l’érosion aratoire. Le travail du sol, qu’il soit manuel ou mécanique, ainsi que le piétinement par le bétail tendent, en conditions sèches, à fractionner le sol et à favoriser dès lors le soulèvement de poussières en périodes venteuses. C’est ainsi que se sont développées – notamment après la grande crise d’érosion éolienne aux Etats-Unis au milieu des années 1930 (dust bowl) – des pratiques agricoles moins fondées sur le travail du sol. En particulier l’agriculture de conservation qui, malgré de très nombreuses variantes, repose sur trois grands principes :

  • un semis direct et un travail du sol très réduit,
  • une couverture permanente du sol, notamment par les résidus de culture,
  • des rotations dans l’espace et le temps, incluant des légumineuses.

Ces principes combinent ceux évoqués plus haut, et permettent une réduction significative des pertes en terres.

Pour consulter la suite de la publication, téléchargez sa version intégrale ci-dessous.

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