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Réforme de la Pac

La Cour des comptes émet un avis partagé


TNC le 13/11/2018 à 12:44

La Cour des comptes européenne a rendu un avis mitigé sur la proposition de la Commission pour la Pac après 2020. Elle affirme que : « les plans établis dans le cadre de la prochaine Pac devraient être plus écologiques, reposer rigoureusement sur la performance et renforcer l’obligation de rendre compte ».

« La réforme proposée de la Pac après 2020 n’est pas à la hauteur des ambitions affichées par l’UE concernant l’adoption d’une approche plus écologique et plus solide fondée sur la performance », a conclu la Cour des comptes européenne. La Commission avait annoncé, lors de la publication de sa proposition, que les objectifs environnementaux et climatiques seraient hautement prioritaires.

Bien que les auditeurs reconnaissent la mise en œuvre d’outils en ce sens dans la réforme, ils constatent que ces derniers ne sont pas clairement définis ni traduits en valeurs cibles quantifiées. « La nouvelle Pac devrait comporter davantage d’incitations à la performance, ainsi que des objectifs clairement liés aux réalisations, aux résultats et aux impacts ».

Une Pac qui manque d’indicateurs

Les auditeurs reprochent par ailleurs la similarité de nombreuses options stratégiques à celles de la Pac actuelle. Notamment, les paiements directs en faveur des agriculteurs, calculés sur la base du nombre d’hectares de terre possédés ou cultivés, resteraient par exemple une part importante du budget. Pourtant, ils sont jugés « non adaptés aux préoccupations environnementales et peu efficients pour le soutien d’un revenu viable ».

Des changements essentiels dans la façon de mettre en œuvre cette politique sont proposés. Les auditeurs se félicitent entre autres que l’accent, mis jusqu’à présent sur la conformité, soit déplacé sur la performance. « Néanmoins, ils considèrent que la proposition ne contient pas les éléments nécessaires à un système efficace de mesure de la performance ». Il reste donc difficile de déterminer comment une Pac plus verte pourrait être évaluée ou mesurée. Ils affirment aussi que l’estimation de la contribution de la Pac aux objectifs de l’UE dans sa lutte contre le changement climatique semble peu réaliste.

Quel avenir pour la réglementation de la Pac ?

La redéfinition des règles d’éligibilité de l’UE aux aides de la Pac est un autre changement majeur proposé par la Commission. Il risque toutefois de « se traduire par un affaiblissement du cadre d’assurance en raison des limitations du modèle proposé ». Ainsi, les auditeurs craignent une baisse de fréquence et d’efficacité des contrôles et audits.

« La transition vers une évaluation fondée sur la performance ne dispenserait pas de contrôler la légalité et la régularité », a déclaré João Figueiredo, membre de la Cour des comptes européenne et responsable de l’avis. « Nous craignons qu’une disposition juridique selon laquelle une toute petite partie des dépenses seulement doivent être effectuées, conformément aux règles de l’Union, risque de vider ces dernières de leur sens et de nuire à l’application du droit de l’UE ».

La proposition envisage aussi une absence de communication des statistiques de contrôle par les organismes payeurs. Elle prévoit également qu’il n’y ait pas d’assurance concernant les paiements effectués en faveur des agriculteurs individuels de la part des organismes de certification à la Commission. Les auditeurs redoutent ainsi une diminution de l’obligation de rendre compte faite à la Commission, du fait de l’absence d’un système de contrôle externe robuste.

Angélique Delahaye, députée européenne PPE, conclut : « Dans un contexte où ni le contenu, ni le calendrier, ni l’architecture de la future Pac ne font consensus, cela renforce ma conviction : il n’y a pas urgence en la demeure, nous devons d’abord appliquer pleinement la réforme de l’Omnibus. Il vaut mieux prendre le temps de rouvrir la Pac après les élections européennes de mai 2019. Les agriculteurs méritent mieux qu’un travail bâclé ».