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Main d'œuvre

Emplois agricoles : un bon recrutement, cela se mérite aussi !


TNC le 14/12/2023 à 15:49
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Christophe Berthier de Pôle emploi et Quentin Breil d'Ocapiat guident et conseillent les entrepreneurs pour leurs recrutements. (© TNC)

Face aux difficultés à trouver de la main d’œuvre, le salon des Entreprises de travaux agricoles a réuni un pôle d’experts pour conseiller et guider les entrepreneurs, parfois perdus ou dépités.

« Les jeunes ne veulent plus travailler », « Je ne sais pas où chercher », « Les candidats expérimentés sont trop gourmands », « J’ai connu trop de mauvaises expériences », « Je n’ai pas le temps » … Même si, sur le papier, emploi rime avec ETA, leur relation est bien souvent compliquée. À l’occasion du salon des Entreprises de travaux agricoles, organisé à Tours du mardi 12 au jeudi 14 décembre, un pôle d’experts a permis aux entrepreneurs de mieux connaître, ou carrément découvrir, les bonnes pratiques sur ce sujet épineux et aujourd’hui crucial.

Premier constat, le principal organisme concerné en France, Pôle emploi, est boudé par les entrepreneurs. « Ils ne passent pas par nos services. Ils croient que cela va être compliqué. Alors que toutes les entreprises sont déjà renseignées dans nos fichiers. Nous avons des équipes dédiées pour les sociétés et même spécialisées dans l’agriculture dans les secteurs géographiques concernés, avec des interlocuteurs et un accueil privilégiés », souligne Christophe Berthier, chargé de mission à la direction des opérations Pôle emploi Centre – Val de Loire. Un numéro spécifique, le 3995, est à disposition des entreprises.

« Ouvrez les portes ! »

Pour attirer les jeunes, « Ouvrez les portes ! » implore Christophe Berthier. Avec le dispositif baptisé « Immersion facilitée », Pôle emploi permet, pendant une durée allant d’une journée à deux semaines, d’accueillir une personne au sein de son entreprise, avant un éventuel recrutement.

« Cela permet d’éviter les mauvaises surprises, dans les deux sens. L’employeur peut juger des compétences, de l’autonomie, du savoir-être… Et le demandeur va rencontrer les salariés, échanger sur leur expérience, se rendre compte qu’il faut se lever à 5 heures du matin, travailler sous la pluie ou dans le froid, être mobile… C’est plus parlant qu’un PowerPoint pour présenter un métier ».

Le CDI ne fait plus rêver

Une indication du salaire doit figurer sur l’offre d’emploi. « C’est trop souvent tabou. Mais l’écart entre l’offre et la demande est tel aujourd’hui que les candidats passent leur route s’il n’y a aucune information financière », constate Jennifer Habib Allah, chargée de mission à l’Anefa. Ne pas être trop radin non plus : « un conducteur expérimenté vaut entre 2 000 et 2 500 € net par mois ».

Mais l’argent n’est pas toujours le nerf de la guerre, notamment pour les plus jeunes. « Ils veulent une bonne ambiance, des engagements courts, pouvoir être mobiles. Il y a un vrai décalage avec les générations précédentes, pour lesquelles un CDI était souvent un aboutissement », poursuit l’experte.

Ne pas négliger l’alternance

Pôle emploi a également mis en place la « Méthode de recrutement par simulation », qui permet de vérifier les habilités. Par exemple, un soudeur potentiel devra, dans une caisse en métal tapissée de feuilles, tracer un chemin avec un gros feutre. « Si la personne ne fait que des bouts de traits tous de travers, on saura qu’elle n’est pas faite pour ça », détaille Christophe Berthier.

Le recours à l’alternance est aussi une piste à ne pas négliger. « C’est une source de recrutement en plein essor, confie Quentin Breil, conseiller entreprises Ocapiat pour le Centre – Val de Loire. Les apprentis sont déjà formés aux pratiques de l’entreprise. Et il y a des aides financières qui limitent le coût ». Il donne deux recommandations : « Il ne faut pas se limiter à une mauvaise expérience. Nous avons beaucoup plus d’exemples de réussites que d’échecs » et « Il faut se rapprocher des CFA, il y en a plein qui ne demandent que d’être sollicités ».

Consacrer du temps au recrutement

Les besoins sont si importants que le recours à la main d’œuvre étrangère devient souvent nécessaire. « Même si nous recrutions toutes les personnes en marge de l’emploi en France pour les former aux métiers de l’agriculture, cela ne suffirait pas », tranche Jennifer Habib Allah.

D’autant que les reconversions vers ce secteur ne sont pas fréquentes. « Ce n’est pas un domaine qui attire, constate Quentin Breil.  « L’image de précarité, parfois entretenue par le milieu agricole, ne donne pas envie », estime la chargée de mission à l’Anefa.

Enfin, un bon recrutement, cela se mérite aussi : un employé modèle tombe rarement du ciel. « Il faut savoir prendre une demi-journée pour se pencher sur le sujet, même si ce n’est pas toujours simple. C’est un cercle vicieux : pas de temps pour recruter, pas de recrutement pour se dégager du temps », affirme Christophe Berthier. « Nous avons organisé un webinaire sur les ressources humaines, promu par une grande campagne de communication, raconte Jennifer Habib Allah. Nous n’avons eu que deux participants, et encore, ils étaient déjà calés sur le sujet… »