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Interview de Miss et Mister agri 2022

Deux profils et parcours différents pour une même envie d’agriculture !


TNC le 30/12/2021 à 07:00
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Marianna élève des ovins dans les Hautes-Alpes et Léo des pigeons en Vendée. (©Marianna Briançon et Léo Guignard)

Le 11 décembre, vous avez été nombreux à suivre les résultats de l'élection de Miss et Mister agri 2022. Vous voulez en savoir plus sur Marianna Briançon et Léo Guignard, les nouveaux tenants du titre depuis bientôt deux semaines ? Leurs motivations pour l'agriculture, leurs parcours, leurs attentes par rapport à ce concours... ils vous racontent tout ! Mis à part quelques différences bien sûr, ils partagent la même passion du métier et la volonté de le valoriser.

Marianna Briançon, un nom prédestiné lorsqu’on habite, comme elle, dans les Hautes-Alpes. Si la nouvelle Miss agri n’est pas encore installée, elle prévoit de se mettre en Gaec avec son père en 2023. Pour le moment, elle suit une formation d’un an afin d’obtenir un BPREA, en travaillant en parallèle sur l’exploitation. En effet, elle ne se prédestinait pas à devenir éleveuse et à reprendre la ferme familiale. Titulaire d’un Bac en sciences médico-sociales et d’un DUT information et communication, elle a été médiatrice numérique pendant trois ans auprès de publics en difficulté. « C’était intéressant, mais je ne pensais pas qu’être en ville, enfermée dans un bureau, me pèserait autant », explique la jeune femme.

Comme beaucoup d’enfants d’agriculteurs, je ne voyais que les difficultés.
J’ai eu besoin d’aller voir ailleurs, pour mieux revenir !

Le déclic, elle l’a eu lorsqu’elle a remplacé son père pour ses premières vacances depuis 30 ans. « Pendant huit jours, j’ai géré seule l’élevage ovin. C’est là que j’ai compris que c’était ce que je voulais faire ! Petite, comme de nombreux enfants d’agriculteurs je pense, je ne voyais que les difficultés économiques, la charge de travail, le peu de temps libre. J’ai eu besoin d’aller voir ailleurs pour mieux revenir ! J’ai toujours aimé les moutons. C’est avec eux que j’ai mes premiers souvenirs quand je donnais le biberon aux agneaux. En fait, ce sont eux qui m’ont choisie ! »

Mon père est capable d’entendre mes idées, et de me laisser les tester.

La fibre agricole et entrepreneuriale est belle et bien dans la famille : l’exploitation a été créée par le père de Marianna, ses grands-parents étaient bergers et son autre grand-mère a monté son entreprise horticole ! « Mon père est tellement passionné, qu’il ne sera jamais vraiment à la retraite. Quand il a eu la Covid, j’ai dû redescendre des bêtes de l’alpage, c’était trop dur pour lui de ne pas les voir !, souligne Marianna qui s’est, là encore, occupé de la ferme pendant deux mois. Mais je ne suis pas inquiète. Je m’entends très bien avec lui. Il est très ouvert et est capable d’entendre et de me laisser tester mes idées. Il est également de bon conseil et je peux m’appuyer sur son expérience.  »

Marianna et Léo : deux régions, deux élevages, deux histoires

Autre département, autre histoire : non issu du milieu agricole, Léo Guignard élève des pigeons et des bovins en Vendée depuis avril 2017. « Les oiseaux m’ont toujours fasciné, précise-t-il. Après mon BTSA gestion et protection de la nature, je suis parti au Costa Rica où j’en ai côtoyés beaucoup. À 20 ans, j’ai eu envie d’entreprendre dans ce domaine et de me lancer dans l’aviculture. » Pendant deux ans, Léo fait des petits boulots « à droite, à gauche » et s’inscrit au RDI (répertoire départ installation). Employé en deux huit dans une usine, il peut consacrer une partie de ses journées à son parcours à l’installation. « Finalement, c’est le bouche-à-oreille qui a fonctionné. Le monde du pigeon est petit », fait remarquer le producteur.

Grâce à son diplôme agricole (de niveau IV), il n’a pas besoin de formation spécifique mais il réalise un stage de parrainage pour mieux connaître la ferme, et apprendre à bien la conduire, techniquement et économiquement. « Une transmission en douceur pour le cédant comme le repreneur, que je recommande à tous les futurs agriculteurs, surtout en hors cadre familial ! » Ses autres conseils : « ne pas discuter au dernier moment de la date et du prix de la reprise notamment, mais tout écrire noir sur blanc bien en amont. » Et se faire accompagner par des spécialistes pour ne rien oublier au niveau des démarches, bien étudier les aspects économiques et rencontrer tous les partenaires. « Le soutien de mes parents, mes frères et sœurs, mes amis est précieux. Leurs coups de main réguliers aussi ! »

Le souhait d’entreprendre !

Et plein de projets en tête !

Il faut dire que le jeune éleveur est plutôt entreprenant. Deux ans à peine après s’être installé, il décide de développer un atelier arboricole pour produire des pommes et des poires, et vendre en direct fruits et jus (la fabrication est externe, Léo effectue la mise en bouteille et l’étiquetage). Et pourquoi pas d’ici quelques temps des prunes, des abricots et des framboises, en développant l’activité de transformation fruitière, parallèlement à celle des pigeons en rillettes et pâtés (commencée suite au confinement), voire en ouvrant un magasin fermier avec d’autres producteurs. Pour cela, il envisage soit d’embaucher un(e) salarié(e), soit de s’associer avec un tiers. 

L’important, c’est l’ouverture d’esprit. Mais attention, rien n’est jamais acquis !

« Même si au départ on n’y connaît pas grand-chose, il ne faut pas hésiter à se diversifier pour ne pas mettre, comme on dit, tous ses œufs dans le même panier.  Il ne faut pas avoir peur de se former, ni d’aller voir d’autres producteurs et acteurs de la filière ! L’important, c’est l’ouverture d’esprit. » S’il ne regrette pas son choix de devenir agriculteur, Léo Guignard préfère rester prudent : « Rien n’est jamais acquis, il vaut mieux rester sur ses gardes. »

Marianna, elle, projette également de faire de la vente directe. « Valoriser nous-mêmes notre production et notre travail : j’en parle à mon père depuis plusieurs années mais tout seul, impossible en termes de gestion, de temps… » À son installation, le projet est d’augmenter un peu le cheptel, de 50 à 100 mères au début, et d’en transformer une partie, à l’extérieur puis peut-être à la ferme « si nous avons la capacité d’investir dans un laboratoire ».

Valoriser nous-mêmes notre production et notre travail.

« Je livrerai les colis de viande et de charcuterie à la demande, en local, aux particuliers, chez eux ou dans des points de livraison collectifs, dans les petits commerces, et j’espère à terme dans un magasin sur la ferme, d’autant que je souhaiterais qu’elle devienne pédagogique. Les marchés, ce sera qu’occasionnellement, pour les fêtes de fin d’année par exemple. C’est beaucoup de temps et de contraintes, je ne veux pas trop me disperser. »

Un même désir de promouvoir l’agriculture et leur métier

Si Léo a vu par hasard le concours Miss et Mister agri sur les réseaux sociaux et a voulu « tenter », encouragé par quelques amis, Marianna voulait candidater mais pensait qu’il fallait être installé. « Quand j’ai su que les gens en formation agricole étaient acceptés, j’ai dit bingo ! », indique-t-elle. Un moyen pour elle d’allier ses deux passions : l’agriculture et le photo modeling. Ni l’un ni l’autre ne croyait gagner. « Ce titre va me permettre de mettre en avant le monde agricole lors d’événements locaux mais aussi plus loin, au Salon de l’agriculture notamment. Je n’y suis jamais allée, c’était trop loin et nécessitait un certain budget. Et laisser les animaux trois-quatre jours… Mon rêve d’enfant se réalise ! Je vais aussi pouvoir faire rayonner mon territoire et valoriser la place des agricultrices, capables d’être féminines comme de faire de la soudure ! »

Les agricultrices sont autant capables d’être féminines que de faire de la soudure !

En plus d’un profil perso en lien avec la photo de mode, la jeune femme a créé suite à son élection une nouvelle page Facebook, Marianna Miss France Agricole 2022, pour relayer les articles de presse (dont un reportage vidéo pour BFM Hautes-Alpes et Alpes-de-Haute-Provence) et les manifestations auxquelles elle participera. Depuis sa décision de rejoindre son père, elle partage le quotidien de l’élevage ovin sur le compte Instagram Heidi_from05. En une semaine, sa couronne de Miss agri a multiplié par trois sa fréquentation.

« Prêcher des convaincus n’est pas très utile, il ne faut pas seulement échanger sur l’agriculture avec les agriculteurs, mais chercher plutôt à toucher le grand public ! Montrons aux consommateurs que derrière chaque produit qu’ils mangent, il y a des producteurs passionnés qui, tous les jours, donnent de leur personne pour les nourrir. Notre société de consommation n’en a pas conscience, se préoccupant davantage des tracteurs qui la gênent sur la route. Lui dire que, sans aide, nous ne pourrions pas travailler, parler des petites retraites, du taux de suicide… ce ne sont pas les messages qui manquent ! »

La meilleure façon de mettre fin aux critiques, c’est d’y répondre !

Léo est du même avis, lui qui invite ses concitoyens à cueillir les fruits de son verger pour leur présenter en même temps « l’envers du décor ». « La meilleure façon de mettre fin aux critiques, c’est d’y répondre ! C’est pourquoi je désire renforcer le contact avec la clientèle via la vente directe. » D’ailleurs, le concours Miss et Mister agri va l’aider à se faire connaître, lui en tant que nouveau producteur, son exploitation, ses activités et notamment des productions un peu particulières comme la colombiculture. « Je vais poster plus fréquemment des informations sur la page Le Verger du Landreau pour être davantage présent sur les réseaux sociaux », ajoute-t-il. « Plus tard, ma page consacrée à l’élection deviendra celle de la ferme dédiée à la vente directe. Elle m’aura permis de me constituer un réseau avant de me lancer », complète Marianna.