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Agroalimentaire

Nutri-Score sur les pubs alimentaires : les députés font un premier pas


AFP le 22/02/2019 à 17:30

Le Nutri-Score, l'étiquetage sur la qualité nutritionnelle de la nourriture industrielle, sera-t-il obligatoire sur toutes les publicités alimentaires ? L'Assemblée nationale a fait jeudi soir un premier pas vers cette mesure de « santé publique », mais le chemin est encore long.

Tard dans la nuit, les députés ont adopté en première lecture une proposition de loi déposée par la France insoumise, mais entièrement réécrite par la majorité. La principale mesure adoptée porte sur l’affichage obligatoire du Nutri-Score sur les supports publicitaires pour l’alimentation. Cette échelle graphique combinant code couleurs et lettres classe les produits alimentaires en 5 catégories (des lettres de A à E colorées du vert au rouge), en fonction de leurs qualités nutritionnelles. Elle permet de comparer différentes versions d’un même produit transformé (plats cuisinés, pizzas, conserves, biscuits, etc). Pour « les messages publicitaires sur internet, télévisés ou radiodiffusés, l’obligation ne s’appliquera qu’aux message émis et diffusés à partir du territoire français et reçus sur ce territoire », précise le texte. L’entrée en vigueur de la mesure est théoriquement fixée au plus tard au 1er janvier 2021 pour laisser aux professionnels le temps de s’adapter.

Selon le texte, les annonceurs pourront y déroger mais devront en contrepartie verser une contribution à l’agence sanitaire Santé publique France. Cependant, cette mesure n’en est qu’au début de son parcours parlementaire et doit maintenant passer devant le Sénat. « Si la loi était votée, ce serait une avancée majeure pour la santé publique », a déclaré à l’AFP le directeur général de Santé publique France, François Bourdillon. Conçu par Santé publique France, « le Nutri-Score est un moyen pour M. et Mme Tout-le-monde de se repérer par rapport à la qualité des aliments, et est pour les industriels une façon d’améliorer leur produits », a-t-il ajouté. « Reste désormais à transformer l’essai au Sénat, et à travailler avec les industriels du secteur agroalimentaire pour que la mesure puisse être pleinement opérationnelle », a espéré dans un communiqué le député LREM Olivier Véran, à l’origine de l’amendement.

Opposition du gouvernement

Autre obstacle à l’entrée en vigueur définitive de la mesure : le texte adopté l’a été contre l’avis du gouvernement. « Cet amendement peut avoir pour conséquence de fragiliser le dispositif du Nutri-Score au regard des règles européennes », a fait valoir dans l’hémicycle le ministre des Relations avec le Parlement, Marc Fesneau. Une précédente tentative d’adoption de cette mesure lors des débats au printemps sur le projet de loi agriculture et alimentation avait échoué, déjà au nom du « risque » européen. « La mesure concernant le Nutri-Score dans la publicité n’est pas conforme au droit européen », a également estimé l’organisme qui représente les industriels, l’Ania (Association nationale des industries alimentaires). « Il est très important pour les 18 000 entreprises alimentaires françaises d’avoir un cadre législatif stable et uniformisé car elles évoluent dans un marché ouvert et ne doivent pas se trouver pénalisées », a poursuivi l’Ania, interrogée par l’AFP. « Rien n’interdit de rendre (le Nutri-Score) obligatoire sur la publicité », a au contraire jugé M. Véran. Le droit européen est aussi ce qui a toujours empêché de rendre le Nutri-Score obligatoire sur les emballages des aliments eux-mêmes. Son apposition sur les emballages dépend donc d’une démarche volontaire des industriels. Certains s’y sont mis, mais de grandes multinationales refusent toujours de le faire. L’ONG Foodwatch s’est pour sa part focalisée sur une mesure présente dans la proposition de loi initiale de LFI mais finalement retoquée à la demande du gouvernement : l’interdiction de la publicité ciblant les enfants pour les produits trop sucrés, trop gras, trop salés. C’est « un pur scandale », s’est insurgée la directrice générale de Foodwatch, Karine Jacquemart, dans un communiqué. La proposition de loi des Insoumis entendait initialement réglementer la distribution de l’alimentation industrielle, responsable de maladies chroniques comme le diabète, les maladies cardiovasculaires, le surpoids, l’obésité ou certains cancers. « Vous avez abrogé la totalité de nos articles. On repart d’ici avec le Nutri-Score, on s’en contentera », a commenté Jean-Luc Mélenchon après le vote.