« Mother regulation »

Bientôt des tracteurs à plus de 40 km/h ?


Innovations et machinisme le 18/01/2017 à 11:25

Depuis un an maintenant, et sans trop faire parler de lui, un nouveau système d’homologation pour les machines agricoles a débarqué : le règlement 167/2013 ou « Mother regulation ». Et pourtant bien des évolutions pourraient en découler dans les mois et années à venir : double ligne de freinage pour augmenter la sécurité, mais surtout la possibilité pour les tracteurs agricoles de pouvoir circuler, un jour, à plus de 40 km/h. Pour tenter d'y voir plus clair, nous avons interrogé Christian Rivierre du service homologation de John Deere France.

 

Terre-net : Quelle est l’origine de cette nouvelle contrainte réglementaire ?

Christian Rivierre : Anciennement soumis à la réception européenne 2003/37, les tracteurs le sont désormais à la 167/2013. Cela permet de couvrir les évolutions techniques introduites ces dernières années (freinage lié à l’augmentation des masses et des vitesses), ainsi que les aspects sécurité (accès aux composants, vision, maintenance et matériels tractés). Le règlement 167/2013 est également désigné sous l’appellation « Mother regulation »

TN : Quand cette « Mother regulation » entrera-t-elle en vigueur ?

CR : Elle est déjà en vigueur depuis le 1er janvier 2016 pour les nouveaux types. A partir de 2018, tous les modèles de matériels neufs, quel que soit leur type, seront concernés.

TN : Quels sont les matériels concernés ?

CR : Les tracteurs ainsi que les matériels tractés : les bennes, les pulvérisateurs, les semoirs et autre outils de travail du sol même s’ils ne sont pas dans les mêmes catégories. Les bennes sont dans la catégorie des Remorques (R), les semoirs et autres outils de travail du sol tractés sont classés dans la catégorie des Engins interchangeables tractés (S).

TN : Qu’est ce qui va changer pour les agriculteurs français ?

CR : En dehors des améliorations liées à la sécurité (rétroviseurs permettant une vision rapprochée améliorée, angles de mobilier adoucis en cabine, protection électrique contre les surcharges de circuits et ouverture des capots sécurisée), l’impact le plus important est le type de frein de remorque utilisé.

En effet, la nouvelle réglementation impose le freinage de remorque à double ligne pneumatique ou hydraulique. Les caractéristiques du freinage hydraulique double ligne sont différentes de celles d’un freinage simple ligne. De ce fait, les matériels tractés simple ligne ne seront pas directement compatibles au niveau du comportement.

Pour accompagner cette mutation, le règlement 167/2013 permet le montage du dispositif de freinage hydraulique de remorque (simple ligne) jusqu’au 31 décembre 2019 sur les nouveaux types et jusqu’au 31 décembre 2020 pour les matériels neufs.

Nos clients ayant des matériels dotés d’un freinage hydraulique simple ligne vont être confrontés au problème des options à choisir lors du renouvellement de leur tracteur. Cela impose également de choisir un circuit compatible dans les décisions d’achat de matériels traînés.

TN : Quels sont les bénéfices de ce nouveau règlement pour les agriculteurs ?

CR : La sécurité de leurs matériels, à travers les éléments cités plus haut. De plus, la limite des 40 km/h est levée au niveau européen. Si celle-ci reste maintenue en France au niveau du code de la route, il sera possible d’immatriculer des matériels sous le règlement 167/2013 intégrant une vitesse supérieure liée à des systèmes de freinage modifiés en conséquence.

TN : Y-a-t-il des discussions en cours sur le code de la route français pour lever cette limite de 40 km/h ?

CR : Ce type de sujet est traité par l’Axema qui regroupe les constructeurs et dialogue avec les autorités. Pour les véhicules ayant les capacités et au vu des dispositifs de sécurité correspondant à cette nouvelle réglementation, il serait logique que cette démarche soit lancée.

Le texte prévoit actuellement l’intégration de l’ABS pour des matériels ayant des vitesses supérieures à 60 km/h et l’étude de ce type d’application pour les matériels entre 40 et 60 km/h (bien que pour cette catégorie de matériel, l’ABS n’apporterait aucune amélioration tangible en matière de sécurité routière).

Les matériels pouvant maintenant accéder à des masses combinées (PTRA) de 44 tonnes, la généralisation de dispositifs de freinage plus performants pour ces ensembles augmentera considérablement la sécurité de nos clients.

TN : Comment les constructeurs se préparent-ils au règlement 167/2013 ?

CR : Pour les tracteurs, les gammes actuelles et à venir sont étudiées pour une validation sous le règlement 167/2013 avant l’échéance du 1er janvier 2018.

Lorsque la décision de la Commission européenne sera connue, au printemps 2017, (ABS ou non au-delà de 40 km/h), nous nous adapterons aux nouvelles exigences réglementaires.

Néanmoins, le coût exorbitant de ce système de freinage et son impact potentiellement nul, voire négatif, pour la sécurité routière suscite une vive opposition de la part de nos clients et de l’industrie européenne. Il est donc possible que l’on s’achemine vers un régime optionnel pour l’ABS qui correspondrait davantage aux besoins spécifiques de certains de nos clients.

Pour les matériels tractés, le règlement impacte les réceptions nationales. En effet, pour les catégories existantes au niveau européen, les textes devront intégrer les mêmes conformités, la plus importante étant celle liée au circuit de freinage.

La réglementation nationale sera donc prochainement modifiée, induisant un rapprochement des coûts entre les réceptions nationales et européennes. Suivant les évolutions produits, les réceptions nationales pourront toujours être utilisées, mais la rationalisation liée aux diffusions des produits dans l’Europe nous pousse à explorer les nouvelles possibilités du nouveau règlement 167/2013.