Les prix mondiaux des céréales toujours lestés par le maïs américain
AFP le 20/08/2025 à 18:45
Les cours des céréales étaient toujours orientés à la baisse mercredi sur les marchés mondiaux : « l'ogre américain » donnait le ton pour le maïs, tandis que la Russie devrait garder la main sur le blé avec la belle moisson attendue.
« Tout le monde est encore sous le choc du dernier rapport de l’USDA », le ministère américain de l’Agriculture, qui prévoit une production record de 425 millions de tonnes de grain jaune aux Etats-Unis pour la campagne 2025-26, du « jamais vu », selon Damien Vercambre, du cabinet Inter-Courtage.
« L’ogre américain » continue de donner le ton, non seulement pour le maïs mais aussi pour le soja, selon le courtier.
A la Bourse de Chicago, à la clôture mardi, les graines étaient dans le rouge : le blé a terminé en repli à 4,98 dollars le boisseau (environ 27 kg), le maïs à 3,79 dollars le boisseau (environ 25 kg) et le soja à 10,12 dollars le boisseau (environ 27 kg).
« Crop tour »
Après les dernières estimations de production américaine de maïs, les opérateurs attendent avec impatience les résultats du tour de plaine (« Crop tour ») en cours dans les zones de production, qui viendront confirmer ou infirmer ces prévisions.
« Les chiffres de l’USDA étaient peut-être corrects d’après les données satellitaires à la fin du mois de juillet, mais les personnes présentes sur le terrain pourraient constater une réalité différente », relève Michael Zuzolo, de Global Commodity Analytics and Consulting.
« Les premiers comptages prévoient des rendements élevés mais peut-être pas autant qu’annoncé, il faut attendre encore un peu pour savoir », selon Gautier Le Molgat, PDG d’Argus Media France.
Les cours du maïs devraient rester plombés par l’abondance annoncée de la céréale : à son tour, l’agence officielle brésilienne Conab vient de relever ses estimations pour la safrinha, deuxième de l’année et plus importante récolte brésilienne de maïs, avec une estimation de production 2024-25 à 137 millions de tonnes, contre 115,5 millions de tonnes l’année précédente.
En revanche, le « coup de chaud en France et en Espagne pourrait pénaliser la fin de cycle du maïs », note Gautier Le Molgat. Les feuilles de la graminée deviennent déjà marron, ce qui bloque la photosynthèse et donc le remplissage des grains, alors que le récolte ne débutera que fin septembre.
Mais face à la profusion mondiale, ce risque, qui concerne une Europe importatrice nette de maïs et qui pourrait être balayé par le retour d’un temps plus frais et humide, pèsera peu sur les prix mondiaux, selon l’analyste.
Chine absente
Par ailleurs, les observateurs sont attentifs aux discussions initiées par le président américain Donald Trump pour mettre fin à la guerre entre la Russie et l’Ukraine.
Pour Michael Zuzolo, le marché a d’ores et déjà « intégré » la perspective d’« un accord de paix », ce qui signifie, selon lui, que « Donald Trump n’imposera pas de sanctions à la Russie, ni à la Chine, ni au Brésil et à l’Inde dans le but de couper les flux financiers vers la Russie ».
« Si le président Poutine se retire d’un accord de paix (…) le président Trump pourrait infliger des sanctions assez sévères à la plupart de ces pays, la guerre commerciale pourrait reprendre de plus belle et cela aura un impact négatif sur les prix agricoles », estime-t-il.
Entraîné par le maïs, le cours du blé n’est guère mieux loti : il stagne sous la barre des 200 euros la tonne sur le marché européen, à son plus bas niveau de l’année, ce qui profite à quelques acheteurs. La France a ainsi vendu récemment du blé à l’Egypte et à la Tunisie, pays qui préféraient ces derniers mois le grain russe.
Une aubaine pour l’ouest européen qui pourrait ne pas durer : les cabinets spécialistes de la Russie SocEcon et Ikar ont récemment relevé leur estimation de récolte russe de blé à plus de 85 millions de tonnes.
« Les fermiers russes, qui faisaient un peu de rétention à cause des prix bas et aussi en attendant d’avoir de nouvelles estimations de production, ont recommencé à vendre », indique Damien Vercambre.
Sur les marchés agricoles, le courtier note enfin la quasi-absence de la Chine – en dehors de commandes d’orge à la France et l’Australie – ce qui entretient le mystère concernant sa stratégie dans un contexte de bras de fer commercial avec les Etats-Unis.