Biocarburants et tempête géopolitique soutiennent les prix du soja et céréales
AFP le 18/06/2025 à 21:40
Les cours des blé, colza et soja étaient en hausse mercredi, dans un marché mondial des grains modérément agité par la situation explosive au Moyen-Orient tandis que des arbitrages américains sur les biocarburants favorisaient les oléagineux.
Les analystes soulignaient un « certain contraste » entre « l’impression d’un cataclysme géopolitique » du fait des frappes israéliennes en Iran, qui ont vu les cours du pétrole flamber vendredi avant de redescendre, et les répercussions somme toute mesurées sur le marché des grains.
Certes, les cours des blé, maïs, colza ou soja étaient en hausse en fin de journée, mais dans des proportions relativement modestes : la tonne de blé s’est installée autour de 208 euros sur Euronext, celle de maïs dépassant les 192 euros.
Les huiles boostées
Le fait le plus marquant ces derniers jours sur les marchés agricoles est la hausse du quota annuel d’incorporation de biodiesel (+ 8 %) dans les carburants traditionnels aux Etats-Unis, annoncée vendredi par l’Agence américaine de protection de l’environnement (EPA).
Pour Arlan Suderman, analyste pour la plateforme de courtage StoneX Financial, le soutien observé sur les cours du soja est clairement « dû aux nouveaux quotas de biocarburants publiés par l’EPA », même si cette augmentation des quotas n’interviendra qu’en 2026.
Selon l’analyste, les fonds anticipent de « forts niveaux de trituration [pressage des grains] dans les jours et les semaines à venir car les transformateurs vont essayer de produire autant d’huile de soja que possible, ce qui contribue à soutenir » la plante oléagineuse.
Le soja a clôturé en hausse mardi à la Bourse de Chicago, à 10,74 dollars le boisseau (environ 27 kg), entraînant le colza européen qui évoluait autour de 494 euros la tonne mercredi. « Cela booste surtout le marché des huiles », a commenté Gautier Le Molgat, PDG d’Argus Media France.
Il voit en parallèle se dessiner « un décrochage des tourteaux », ces coproduits de la trituration des graines qui sont destinés à l’alimentation animale, car le marché intègre un risque de surproduction de tourteaux sans nouveau débouché.
La hausse du cours du soja sera « de courte durée », estime également Dewey Strickler, d’Ag Watch Marcket Advisors: « Vous verrez que les stocks de farine vont augmenter, ce qui, à plus long terme, aura un effet baissier », assure l’analyste.
Environ un cinquième du poids d’un boisseau de soja peut être transformé en huile, le reste finissant en matière solide (farine, tourteaux…), selon le lobby américain du secteur.
Maïs sous pression
Le prix du maïs évoluait plus modestement : « les quotas de l’EPA pour l’éthanol sont restés inchangés », ce qui explique l’absence de soutien des cours du grain jaune, note Arlan Suderman.
En outre, la poursuite à bon rythme de la récolte de la Safrinha (la plus importante récolte de maïs) au Brésil, où 10 % des surfaces ont déjà été moissonnés, ajoute une pression à la baisse sur les cours internationaux.
Quant au blé, « c’est la mer Noire qui fixe le prix dans le monde et le reste des marchés y réagit », assure M. Suderman. Les prévisions de récoltes s’y annoncent bonnes. Même meilleures que l’an dernier en Ukraine, avec près de 25 millions de tonnes de blé (contre 23,5 Mt en 2024), selon des données publiées par la Commission européenne.
En France, la récolte céréalière a démarré cette semaine dans des conditions satisfaisantes, avec l’orge, en attendant le blé dans les prochaines semaines : « les échos sont rassurants, après la campagne catastrophique de l’an dernier », selon Gautier Le Molgat.
La baisse des prix de la semaine dernière a entraîné « un petit réveil des acheteurs », à la fois des Etats et des fabricants d’alimentation pour bétail, a-t-il relevé.
En Algérie, l’office national OAIC a acheté « entre 550 000 et 570 000 tonnes de blé meunier, sans doute de la Mer Noire (Roumanie, Bulgarie, Ukraine) à 244,50/245 dollars par tonne, chargement et fret compris, pour des chargements en août 2025 », selon le cabinet Inter-Courtage.