Le Brésil et l’Australie ont boosté le commerce mondial de viande bovine en 2024
TNC le 18/06/2025 à 04:51
Porté par une offre brésilienne et australienne abondante et une demande ralentie en Chine, le marché mondial de la viande bovine s’est détendu en 2024 et les exportations ont atteint des niveaux record. En 2025, la production mondiale plafonne et la demande reste dynamique dans les pays émergents, faisant remonter les prix.
« Toujours plus de volumes échangés » sur le marché mondial de la viande bovine en 2024 : c’est ce qu’a expliqué l’agroéconomiste Caroline Monniot lors de la journée de l’Idele consacrée aux marchés du lait et de la viande, le 11 juin.
Après une croissance régulière depuis la fin des années 1990, le cheptel mondial de bovins et de buffles semble avoir atteint un plafond en 2024 après un « point haut » en 2023. Une stagnation liée à des cycles de cheptel arrivés à leur pic au Brésil et en Australie, et à la décapitalisation observée dans l’UE et en Amérique du Nord.
La production abattue a grimpé en 2024, approchant les 60 Mtéc, portée par des hausses « un peu partout » mais notamment au Brésil et en Australie : respectivement + 1,17 million de tonnes-équivalent-carcasse (Mtéc) et + 362 000 téc par rapport à 2023.
« On avait un marché hyper tendu en 2022, la production avait du mal à progresser malgré une demande présente, donc les prix ont beaucoup augmenté. En 2023, le marché a commencé à se détendre », rappelle Caroline Monniot.
Et la détente a donc continué en 2024 : ces disponibilités accrues au Brésil et en Australie ont provoqué un afflux de viande bovine de ces deux pays (respectivement + 705 000 téc et + 323 000 téc/2023) sur le marché mondial et une hausse des échanges. Les ventes des dix premiers exportateurs ont atteint un record de 11,6 Mtéc, 11 % de plus qu’en 2023.
Le Mercosur a exporté 2,7 Mtéc vers l’Asie
Du côté des exportateurs, le pôle « Mercosur » a amplifié sa domination sur les flux mondiaux en 2024, expédiant près de 2,7 Mtéc de viandes et préparations vers l’Asie, sans pour autant délaisser ses marchés historiques (USA, UE), et tout en accroissant son poids vers le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord.
Le pôle « Océanie » a quant à lui profité de ses disponibilités accrues pour intensifier ses envois vers l’Amérique du Nord et l’Asie. L’Inde joue un rôle à part : ses viandes, très bon marché, sont dirigées massivement vers des pays émergents à faible pouvoir d’achat (Asie du Sud-Est, Moyen-Orient et Afrique du Nord). Et l’UE reste un acteur modeste à l’export, bien qu’elle ait légèrement augmenté ses ventes vers l’Algérie et la Turquie, notamment.
Du côté des importateurs, les États-Unis (+ 340 000 téc), la Turquie (+ 90 000 téc), l’Algérie, les Émirats arabes unis et le Japon ont nettement augmenté leurs achats, tandis que la Chine a connu « une année 2024 morose ».
Car son économie est en perte de vitesse ces deux dernières années, freinant la consommation, l’empêchant de valoriser sa hausse de production et la poussant à réduire ses imports.
Baisse des prix en Amérique du Sud, en Chine et en Australie, hausse aux USA et en Europe
La forte disponibilité de viande et la dépréciation des monnaies ont entraîné une chute marquée des prix en Amérique du Sud et en Australie. En Chine, ce repli s’est amplifié sous l’effet d’un afflux de viande brésilienne bon marché. À l’inverse, le manque d’offre et la reprise de la demande aux États-Unis et en Europe ont tiré les prix vers le haut.
Au-delà de la viande, les échanges de bovins vifs ont aussi connu une forte reprise en 2024, soutenus là encore par l’abondance de l’offre australienne et brésilienne (respectivement + 420 000 têtes et + 90 000 têtes exportées).
Les pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord (Turquie, Irak, Égypte, Maroc…) ont davantage importé, les animaux vivants répondent à des besoins spécifiques : valorisation du cinquième quartier, conformité à l’abattage rituel, alimentation des filières locales d’engraissement…
Les importations US ont aussi grimpé entre 2023 et 2024, le pays achetant « beaucoup de broutards au Mexique et d’animaux finis au Canada ». Et l’Indonésie et le Vietnam restent de grands acheteurs de bovins vivants australiens.
Vers un resserrement du marché mondial en 2025
La donne change en 2025 pour le marché mondial de la viande bovine, car la production abattue plafonne, avec des baisses attendues aux États-Unis, en Argentine, dans l’UE et en Chine, partiellement compensées par des hausses en Inde, en Australie et au Brésil.
D’ailleurs, « on voit que les prix sont repartis à la hausse au Brésil dès l’automne 2024. En Chine, aussi : ce n’est pas hyper florissant, mais ils sont 15 % au-dessus de ceux de l’année dernière à la même époque », précise l’économiste.
À moyen terme, elle souligne que la demande structurelle des pays du Moyen-Orient, d’Afrique du Nord et d’Asie pour la viande bovine – notamment en vif – va demeurer solide. Reste à savoir si le Mercosur pourra suivre le rythme d’un marché mondial toujours plus demandeur.
S’ajoutent à cela plusieurs motifs d’incertitude, comme la guerre commerciale initiée par les États-Unis ou les problèmes sanitaires, susceptibles de perturber les flux.
Ou comme les effets du réchauffement climatique : « Dans certaines zones où le marché du bœuf n’est pas régulé et où la production est cyclique, comme l’Océanie ou l’Amérique du Sud, on se rend compte depuis quelque temps que l’évolution des cheptels est maintenant plus liée aux sécheresses qu’aux évolutions de prix », illustre Caroline Monniot.