Pays-Bas : un écrémage de 30 % du cheptel lors des transmissions de ferme


TNC le 04/11/2024 à 10:52
FermenEerlandaise

(© TNC)

Mi-septembre, le ministère de l’agriculture néerlandais a présenté son plan de réduction du cheptel pour faire face à la crise de l’azote. Plutôt qu’une coupe brutale avec cessation d’activité, la ministre propose un plan « d’écrémage » lors des transactions. Sur le plateau de la Space TV, Amber Laan, jeunes installée, explique les nombreux défis que rencontrent les jeunes éleveurs.

« De nos jours, tout le monde a un avis sur l’agriculture », lance Amber Laan, jeune installée sur une ferme laitière aux Pays-Bas. Pour l’éleveuse, membre du syndicat HAJK – l’équivalent des jeunes agriculteurs – difficile de savoir où donner de la tête compte tenu des multiples injonctions, parfois contradictoires, données aux producteurs.

« Environnement, qualité de l’eau, changement climatique » : les enjeux sont nombreux dans une région qui compte parmi les densités d’élevage les plus élevées d’Europe. « Combiner les trois, en restant en bonne santé financière, est un vrai défi pour les jeunes », explique Amber. « Je pense que par le passé, les choses étaient plus simples. On nous demandait d’être très productifs, rentables… Mais maintenant, il faut prendre en compte la société. »

Si la Hollande a longtemps fait l’objet d’une exception à la directive nitrate fixée par Bruxelles, permettant des épandages d’azote à l’hectare plus importants qu’ailleurs en Europe, la fin de l’exception néerlandaise place les éleveurs dans une situation délicate. L’objectif d’atteindre les 170 kg d’N/ha à horizon 2025 ne permet pas de maintenir la densité de cheptel actuel. Dans ce contexte, le plan Adema, du nom de la précédente ministre de l’agriculture, prévoyait une enveloppe pour les cessations d’activité en élevage.

Avec l’arrivée du BBB (mouvement agriculteur citoyen) au ministère de l’agriculture à l’été, les politiques tentent d’arrondir les angles. Le plan Wiersma vise à profiter des transmissions d’exploitation pour diminuer les cheptels, de l’ordre de 30 % en bovin, 25 % en porcin et 15 % en volaille, plutôt que d’inviter à ces cessations d’activité pures et dures.

Un écrémage de 30 % du cheptel à l’installation

« Si je vous vends ma ferme laitière, vous ne pourrez garder que 70 % du cheptel », décrypte la jeune éleveuse. Une mesure qui vise à aller vers un mode d’élevage plus extensif. Les transmissions familiales et déplacements d’exploitations sont toutefois exemptés de la mesure « d’écrémage ». « Cela ne se produit clairement que lorsque les agriculteurs vendent leurs droits sur les animaux à quelqu’un d’extérieur à la famille », détaille le BBB dans un communiqué.

Si la désintensification semble être la clé, difficile de trouver des surfaces pour diminuer le chargement à effectif constant. Les terres hollandaises figurent parmi les plus chères d’Europe. « Le prix des terres est déjà un challenge pour la transmission », remarque Amber Laan. « Le gouvernement nous demande d’être plus extensifs, mais il est très difficile de trouver des terres à un prix attractif. »

La présence de nombreuses zones naturelles intensifie la pression foncière. « Des éleveurs installés en zone naturelle sont invités à cesser leur activité, ou à s’installer ailleurs. » Une injonction difficile à mettre en pratique compte tenu de la rareté des terres. « Nous pensons qu’il devrait être possible de rester en place en adaptant nos pratiques », poursuit l’élue du HAJK. « En zone protégée, il faudrait inclure les contraintes environnementales dans le modèle économique de l’agriculteur. Les éleveurs ne peuvent pas supporter ça seuls. Il faut l’aide de l’industrie agroalimentaire ou du gouvernement. »

Amber Laan insiste également sur la nécessité de mettre en place une vision à long terme sur les politiques agricoles. « Ceux, qui les pilotent, ne sont là que pour 4 ans, et veulent faire leurs preuves sur cette période. Un agriculteur s’installe avec des investissements pour au moins 20 ans, il a besoin de garanties. »

Mais la jeune agricultrice, qui a malgré tout fait le pari de l’élevage dans ce contexte difficile, ne peut s’empêcher de finir sur une note positive. « L’arrivée du BBB au gouvernement marque un tournant. Nous espérons que nous serons mieux compris. »