Un bâtiment avicole reconverti pour élever des veaux de boucherie
TNC le 01/12/2023 à 04:57
Alors que la construction d’un bâtiment neuf est difficilement envisageable, il est possible de devenir producteur de veaux de boucherie en reconvertissant un bâtiment avicole.
En 2000, à son installation, Agnès Briffault a monté un atelier de 6 000 poules pondeuses Label Rouge, en complément de la production laitière déjà présente sur l’exploitation de son mari, à Brains-sur-Gée (72). « Nous avons choisi les poules parce qu’il y avait de la demande de la part de la Coopérative des Fermiers de Loué », retrace l’agricultrice. Depuis 2014, Agnès et Philippe Briffault souhaitent arrêter cette production. « J’avais l’impression d’avoir fait le tour, reconnaît Agnès Briffault. Comme je préfère les bovins, je voulais monter un atelier de veaux de boucherie. Nous avons pris le temps de mûrir notre projet, de visiter des élevages ».
C’est dans leur ancien poulailler que les éleveurs décident de créer 284 places d’engraissement sur paille. « Nous allons travailler avec une coopérative locale, la Cevap, qui est intéressée par notre production sur paille, apprécient-ils. Au regard du coût d’un bâtiment neuf, notre approche de reconversion lui convient ». Les dernières poules sont parties en novembre 2021, les premiers veaux sont arrivés en novembre 2023.
Entre les deux, les éleveurs ont complètement remanié leur bâtiment. « Nous avons juste gardé la coque du bâtiment, explique Philippe Briffault, qui a réalisé lui-même les plans et la plupart des travaux. Le sol a été bétonné, la partie sous auvent a été intégrée au bâtiment pour augmenter la surface ».

Déjà, Agnès Briffault se projette dans cette nouvelle production. « Il y aura plus de contraintes horaires car il faut respecter l’intervalle entre buvées. Je table sur 4 heures de travail par jour, prévoit Agnès Briffault. On va tester différentes techniques pour limiter les manutentions de paillage. Mais nous n’aurons plus la crainte d’un nouvel épisode de grippe aviaire. Nous avions besoin de changement et c’est la production bovine qui nous motive ».
Des opportunités en veaux de boucherie
Comme Agnès et Philippe Briffault, des aviculteurs ligériens font le choix de changer de production. En 2022, l’influenza aviaire a fortement secoué la filière avicole, notamment la production de canards. Les Pays de la Loire concentrent une grande partie de l’accouvage et 61 % de la production nationale de canards à rôtir. Cette concentration du maillon clé qu’est l’accouvage et la sensibilité du canard à l’Influenza aviaire ont motivé les pouvoirs publics à réduire la densité d’élevages de production dans un certain nombre de zones, identifiées comme sensibles. Cette dédensification ainsi que la lassitude de certains aviculteurs face aux épisodes d’influenza aviaire, expliquent un certain nombre de cessations d’activité.
Ce sont aussi les conditions de travail qui amènent des aviculteurs à vouloir changer de production. « Le gavage c’est exigeant physiquement, témoigne Yannick Benoit, éleveur à Saint-Laurent La Plaine (49). Cela m’a causé des problèmes d’épaules. Pour éviter que la même chose arrive à mon associé, mon gendre Freddy, nous préférons changer de production. Nous sommes partis sur un projet de 400 places d’engraissement de veaux de boucherie, en réaménageant deux bâtiments avicoles ».
Car il existe des opportunités pour produire des veaux de boucherie dans des bâtiments avicoles reconvertis. En effet, de nombreux producteurs de veaux ont pris ou vont prendre leur retraite. Leurs bâtiments en bout de course ne sont pas reprenables. « Les pratiques d’élevage ont évolué, avec plus d’alimentation solide, des durées d’engraissement plus longues. Il faut plus de surface et de volume », précise Christophe Martineau, responsable de la station expérimentale veaux de boucherie de l’Institut de l’Elevage.
Compter 2 500 € la place
Même si la consommation de viande de veau a tendance à diminuer, les départs en retraite en nombre font craindre aux intégrateurs un manque de places. « La filière n’est pas autosuffisante, souligne Christophe Martineau. Il y a donc de la place pour du renouvellement de générations ». Pour autant, la hausse du coût des matériaux remet difficile la construction de bâtiments neufs. « Le coût de la place est passé de 2 000 € à 2 500 € en deux ans », chiffre Christophe Martineau. Les projets de reconversion de bâtiment ont donc toute leur place. « Techniquement, c’est faisable. Les bâtiments avicoles, de type Louisiane ou Colorado, sont adaptables pour la production de veaux de boucherie », détaille Philippe Briand, chargé d’études filière veaux de boucherie à la chambre d’agriculture de Bretagne. Néanmoins, il faudra être vigilant sur la gestion des effluents, en ayant la possibilité d’avoir des racleurs sous les caillebotis pour l’évacuation en continu du lisier tout en maintenant un volume suffisant au-dessus des veaux. Économiquement, une large part d’auto-construction restera nécessaire.