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Syndicalisme

Dernier salon pour Christiane Lambert à la tête de la FNSEA


AFP le 05/03/2023 à 15:05
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Christiane Lambert, présidente de la FNSEA, au salon de l'agriculture 2023. (©@ChLambert_FNSEA)

C'est son dernier salon de l'agriculture comme « VRP de la ferme France ». L'éleveuse de porcs Christiane Lambert quittera bientôt la présidence du puissant syndicat agricole FNSEA après six années à labourer les cabinets ministériels et les médias.

Porte de Versailles, le stand de la FNSEA est aussi couru par les politiques que l’enclos d’Ovalie, la vache égérie du 59e Salon de l’agriculture. La haute silhouette du seul candidat à sa succession, Arnaud Rousseau, n’est jamais loin, mais c’est encore elle la patronne.

La transition se fera officiellement lors du prochain congrès du syndicat à Angers, dans ce Maine-et-Loire où elle gère un élevage porcin avec son mari depuis plus de trente ans.

Parvenue début 2017, par intérim, à la tête de la FNSEA après le décès soudain de son prédécesseur Xavier Beulin, Christiane Lambert était devenue peu après la première femme élue à la tête de ce syndicat qui influence largement la politique agricole française depuis sa création après-guerre.

L’éleveuse de 61 ans a récemment annoncé qu’elle souhaitait « lever le pied » vis-à-vis de ses engagements syndicaux – en France du moins : elle continuera à présider le Copa, l’équivalent de la FNSEA au niveau européen.

« J’ai enterré deux de mes prédécesseurs. (…) Moi j’ai eu une opération à coeur ouvert en 2010, j’ai 150 points de suture sur le coeur, j’ai pas envie de forcer trop la machine », avait-elle justifié en janvier, expliquant que sa famille s’inquiétait – elle a trois enfants dont un fils qui va reprendre l’exploitation familiale.

« Côté boulot », avait-elle ajouté, « je sais pas faire autrement, je travaille à 250% (…) et c’est un poste à fort stress, on est attendus, il ne faut pas décevoir. » – « Du coeur » – Voix légèrement voilée et débit rapide, Christiane Lambert n’a cessé en six ans de croiser le fer par micros interposés avec son meilleur ennemi Michel-Edouard Leclerc – qui écume lui aussi les médias mais pour le compte de la grande distribution – et de courir les ministères. Elle était encore récemment sur une tribune de fortune pour dénoncer la « décroissance agricole » au nom du verdissement des pratiques.

Elle a largement endossé son rôle de « VRP de la ferme France », observe une éleveuse de volailles croisée au Salon de l’agriculture, « elle connaît les dossiers, elle y met du coeur ». Seul regret: que les instances dirigeantes de la FNSEA ne se soient pas davantage féminisées sous sa présidence.

Première femme à la tête de la FNSEA

Dans un monde largement masculin, Mme Lambert est devenue la première femme à présider le syndicat des Jeunes Agriculteurs (alors Centre national des jeunes agriculteurs, 1994-1998), la FNSEA puis le Copa en 2020. Née dans le Cantal de parents agriculteurs et militants à la Jeunesse agricole chrétienne, elle explique son parcours syndical par le fait d’avoir souffert, enfant, « de l’image négative de l’agriculture ».

Installée à 19 ans en Auvergne, elle a ensuite repris à la fin des années 1980, avec son mari Thierry, l’exploitation angevine de ses beaux-parents à Bouillé-Ménard. Elle est décrite comme exigeante, parfois dure avec ses équipes.

« Être à ses côtés, ça peut parfois faire peur car c’est beaucoup d’exigence de sa part. Elle nous fait savoir que nos agricultrices et agriculteurs n’attendent pas », remarque son « binôme » à la FNSEA, le secrétaire général Jérôme Despey, tout en louant un « concentré d’énergie », une « bosseuse hors pair » et une « interlocutrice redoutable » pour ses contradicteurs.

En 2018, la FNSEA avait lancé des blocages de raffineries et dépôts de carburants pour dénoncer l’importation par Total d’huile de palme destinée à alimenter une bioraffinerie. « Quand Christiane Lambert veut quelque chose… Les SMS étaient clairs, il valait mieux venir », plaisantait a posteriori le patron de TotalEnergies Patrick Pouyanné, lors d’un congrès de la FNSEA en 2021.

Maniant volontiers auto-dérision (« j’ai la même taille que Napoléon ») et calembours (« on fait du libre-échange et on finit par payer la chambre ») devant ses troupes, elle s’est aussi efforcée d’afficher l’unité d’une organisation revendiquant quelque 200 000 adhérents (sur 500 000 chefs d’exploitation en France) aux intérêts divergents, des plaines de l’ouest aux zones de montagne.