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Provence

Une usine à papier sauvée par l’actionnaire qui l’avait lâchée


AFP le 23/07/2021 à 09:40

Le tribunal de commerce de Toulouse a validé jeudi l'offre de reprise de Fibre Excellence, importante usine de pâte à papier basée à Tarascon (Bouches-du-Rhône) mais dont dépendent des milliers d'emplois en France, par le canadien Paper Excellence, qui l'avait lâchée en octobre.

Assortie d’un investissement de 180 millions d’euros d’ici 2025, cette offre était la seule en lice pour sauver cette usine placée en redressement judiciaire depuis octobre et pour laquelle l’État français avait débloqué neuf millions d’euros de prêts afin d’éviter un arrêt brutal de l’activité. Fibre Excellence, située dans le top 10 des entreprises françaises de transformation du bois, emploie près de 300 salariés à Tarascon mais constitue aussi un débouché essentiel pour des milliers d’exploitants forestiers en France.

Cette décision « apporte des perspectives à l’ensemble de la filière dont dépendent des milliers d’emplois », a déclaré le président de Fibre Excellence Jean-François Guillot dans un communiqué transmis à l’AFP. La Fédération du bois, qui représente les exploitants forestiers, a aussi salué cette décision : « Il y a eu de réelles craintes de disparition du site », a souligné auprès de l’AFP son délégué général Nicolas Douzain.

Le gouvernement français a aussi salué la nouvelle, en augmentant au passage son soutien. L’État va « soutenir financièrement Fibre Excellence Tarascon, à hauteur de 20 millions d’euros, afin que soient réalisés les investissements nécessaires à la pérennisation de l’activité du site et à une amélioration nécessaire de son impact environnemental », ont annoncé le ministre de l’économie et des finances, Bruno Le Maire, et la ministre chargée de l’industrie, Agnès Pannier-Runacher, dans un communiqué.

« Amertume »

L’actionnaire Paper Excellence a quant à lui promis d’investir 180 millions d’euros pour moderniser l’outil industriel et améliorer la performance environnementale d’une usine critiquée par des riverains et organisations de défense de la nature pour ses rejets. Paper Excellence est détenu par Jackson Widjaja, dont la famille dirige le géant indonésien de la papeterie mondiale Asia Pulp and Paper.

Il a par ailleurs obtenu la signature d’un accord avec l’intersyndicale en vue d’une baisse des salaires. En vertu de cette offre, environ 250 emplois sur 273 doivent être maintenus, et il n’y aura aucun licenciement contraint grâce à des préretraites et à un plan de départ pour les salariés ayant été exposés à l’amiante, selon la société. Il y a pourtant « de l’amertume chez les salariés », a indiqué Laurent Wallée, délégué CGT, un des syndicats ayant signé l’accord. « On ne voyait pas d’autre solution, mais certains des employés pensent que l’actionnaire a profité des subventions de l’État et des efforts des salariés », a-t-il ajouté, disant espérer que l’usine allait continuer à fonctionner.

« Rassurée sur le fait que l’emploi soit sauvé », la député LREM du Pays d’Arles, Monica Michel, n’a pas caché jeudi soir auprès de l’AFP qu’elle était « heureuse de cette issue » : « Mais je serai vigilante, notamment sur les investissements en matière de protection de l’environnement promis par l’actionnaire, qui doivent être la plus grande priorité ».

Sur cet aspect environnement, un projet de turbine électrique à électricité « verte » devrait ainsi être développé sur le site. De même l’usine s’est engagée à privilégier la fabrication de pâte à papier non blanchie – utilisée notamment pour des emballages -, ce qui lui permettra de réduire l’utilisation de produits chlorés polluants et donc les taxes versées à l’Agence de l’eau (qui étaient auparavant d’environ un million d’euros par an). À terme, d’ici quatre ans, l’actionnaire promet aussi de doter l’usine d’une installation dite de « délignification à l’oxygène », permettant de blanchir la pâte à papier à l’oxygène et de diminuer l’usage de produits chimiques.