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Crise du sucre

Südzucker rejette le plan de sauvetage des betteraviers pour ses sucreries


AFP le 23/05/2019 à 17:45
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Le groupe sucrier allemand Südzucker a mis les choses au point jeudi : non, il ne vendra pas les deux sites de production de sa filiale Saint Louis Sucre promis à la fermeture dans le Calvados et la Somme aux betteraviers français, qui voulaient les reprendre pour sauver des emplois.

« Saint Louis Sucre ne vendra pas ses sites de production. Nous n’arrêtons pas la production de sucre pour la proposer à d’autres acteurs, mais bien pour retirer des capacités du marché », a asséné le président du directoire de Südzucker, Wolfgang Heer, dans un communiqué.

Les prix du sucre européen ont chuté d’environ 30 % sur l’année, dans le sillage de la baisse des cours mondiaux du sucre qui a suivi la levée des quotas sucriers en Europe fin 2017.

Südzucker, qui a publié ses résultats annuels le 16 mai, enregistre ainsi pour sa branche sucre une perte de 239 millions d’euros sur l’exercice 2018/19. « Le projet de reprise des sites de Cagny (Calvados) et d’Eppeville (Somme) débattu dans la presse par la CGB (association des planteurs de betteraves) ne résoudra pas le problème de surproduction », ajoute jeudi Südzucker.

La semaine passée, après une séance de négociation avec les planteurs d’Allemagne du Sud (VSZ), qui détiennent une participation majoritaire (57 %) au capital de Südzucker, le président de l’association des planteurs de betteraves avait assuré à la presse que la porte n’était « pas fermée » à une reprise des deux sucreries Saint Louis Sucre. « Südzucker a accepté de recevoir notre offre de reprise par écrit. Nous proposons 30 millions d’euros pour la reprise des deux usines », avait indiqué le président de la CGB, Franck Sander.

Les betteraviers français espéraient ainsi maintenir 130 emplois dans les deux sucreries ainsi que la culture de la betterave dans les bassins de production autour de ces sites, où travaillent 2 300 planteurs.

Le président de VSZ, Hans-Jörg Gebhard, avait pourtant déclaré à l’issue de cette rencontre qu’« il serait irresponsable, pour Saint Louis Sucre, de céder des sites », fermant de fait la porte à des négociations.

Retirer des capacités de production

Südzucker a donc enfoncé le clou jeudi en expliquant que le but de l’opération était de « retirer des capacités de production du marché européen », faisant valoir que « la France représente un marché excédentaire (qui) produit deux fois plus de sucre qu’elle n’en consomme. La concurrence y est très forte, tant pour l’approvisionnement en betteraves que pour les débouchés ».

La CGB a vivement réagi à cette annonce jeudi après-midi : « Südzucker déclare refuser unilatéralement toute offre avant même que la CGB n’ait pu la déposer. L’industriel est donc, avec ces déclarations, revenu sur sa parole augmentant encore davantage la rupture de confiance avec les planteurs français ». « Lors de la réunion qui s’est tenue à Strasbourg le 15 mai dernier entre la CGB et Südzucker, le groupe allemand s’était engagé à étudier scrupuleusement l’offre de reprise des planteurs français (…) et de revenir vers la CGB sous trois semaines à réception de la dite offre », rappelle la CGB. Les planteurs ne laisseront pas « s’installer les conditions d’un drame social et agricole dans les territoires betteraviers de Cagny et Eppeville », et demandent un rendez-vous « dans les plus bref délais » pour évoquer ce projet de reprise. « Si Südzucker refuse de nous recevoir rapidement, nous irons alors directement partager notre analyse et présenter notre projet aux actionnaires de Südzucker le 18 juillet prochain lors de l’Assemblée Générale », déclare M. Sander, cité dans le communiqué.

Filiale depuis 2001 de Südzucker, premier sucrier européen qui possède 29 usines en Europe, Saint-Louis Sucre emploie 770 salariés en France et travaille avec 4 733 planteurs de betterave sucrière. Il a prévu de conserver ses sucreries françaises à Etrépagny (Eure) et à Roye (Somme), et ne va pas fermer totalement les sites de Cagny et d’Eppeville, dont il juge « essentiel » de « maintenir les capacités de stockage », afin de « renforcer la situation de Saint Louis Sucre pour l’avenir », selon le communiqué publié jeudi. Cette activité représente seulement 8 emplois à Cagny et 10 à Eppeville. Les salariés accusent le groupe de faire une restructuration en arrêtant totalement la production de sucre, mais en gardant juste du stockage dans les usines, afin de contourner la loi Florange, qui impose à tout employeur d’une entreprise d’au moins 1 000 salariés qui envisage de fermer un établissement et de procéder à des licenciements économiques de rechercher un repreneur.

« Je continue à être écœuré par le comportement de ce groupe » a pour sa part réagi Hervé Morin, président de la Région Normandie, qui estime que « s’il y en a qui peut faire quelque chose c’est le président de la république » pour faire passer le message au gouvernement allemand.

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