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Fiscalité

Prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu, mode d’emploi pour les BA


AGIRAGRI le 18/12/2018 à 18:00

La France rejoint avec retard, un système mis en place par la quasi-totalité des pays occidentaux (sauf la Suisse) et ceci parfois depuis longtemps (Canada 1917, Allemagne 1925, Etats-Unis 1943, Royaume-Uni 1944, Belgique 1962, Espagne 1979, etc.). Notons que l'impôt sur le revenu compris dans les recettes fiscales des pays cités représente une part souvent plus importante que celle enregistrée en France du fait, notamment, d'un passage plus ancien au prélèvement à la source, et ce, nonobstant la complexité de notre fiscalité qui peut expliquer aussi le retard à la mise en place dans notre pays.

Pourquoi le prélèvement à la source ?

La raison commune à l’ensemble des pays ayant optés pour la retenue à la source est d’améliorer la collecte de l’impôt. Ceci d’une part en supprimant le décalage d’une année comprise entre la perception de revenus et l’encaissement de l’impôt, limitant ainsi les régularisations tardives et d’autre part, en accélérant le recouvrement de l’impôt.

Comment et pour quels revenus ?

Applicable en France au 1er janvier 2019, le prélèvement à la source est opéré selon deux moyens et concernant les revenus catégoriels :

1/ Par retenue à la source opérée directement sur le revenu par l’organisme payeur et par suite collecteur de l’impôt : salaires et assimilés, pensions de retraite, rentes viagères à titre gratuit.

2/ Par prélèvement d’un acompte contemporain mensuel (12) ou trimestriel (sur option) sur le compte bancaire du contribuable : revenus des travailleurs indépendants dont les bénéfices agricoles (BA) objet de cet article, revenus fonciers, pensions alimentaires, rentes viagères à titre onéreux, rémunération des gérants et assimilés mentionnés à l’art. 62 du CGI. Les revenus relevant des BA et par suite soumis à l’acompte, sont ceux définis à l’art. 63 du CGI qu’ils soient déterminés suivant un régime micro-BA ou un régime réel d’imposition, de plein droit ou sur option.

Comment est calculée l’assiette de l’acompte contemporain ?

L’assiette de l’acompte prélevé à partir de janvier 2019, est constituée du bénéfice fiscal imposable au barème progressif de l’impôt ; par suite, ne sont pas visés les revenus soumis à l’impôt à un taux proportionnels telles les plus-values à long terme.

Sont exclus aussi de l’assiette de l’acompte certains revenus qui ne sont pas de nature à se renouveler annuellement, comme par exemple, les plus-values de cession d’éléments de l’actif immobilisé, les subventions d’équipement ou les indemnités d’assurance compensant la perte d’une immobilisation.

En cas de déficit fiscal, celui-ci est retenu pour une valeur nulle. Par ailleurs, le BA retenu dans l’assiette de l’acompte est diminué des éventuels déficits fiscaux en report imputables uniquement sur les revenus de la même catégorie (BA) des années suivantes.

Enfin, le bénéfice retenu pour le calcul de l’acompte s’entend de celui déterminé après application, le cas échéant, des dispositifs d’une part d’étalement du revenu exceptionnel agricole (Art. 75-0 A du CGI) et de la moyenne triennale d’autre part (Art. 75-0 B du CGI).

Est-ce que je peux moduler le montant de l’acompte ?

Vous pourrez librement choisir de moduler à la hausse le niveau de votre prélèvement en augmentant l’assiette de l’acompte. Il suffira de fournir à l’administration fiscale une estimation de l’ensemble de vos revenus, l’administration proposant en retour un acompte modulé tenant compte de ces éléments.

La modulation à la baisse est subordonnée à l’existence d’un écart de plus de 10% et de plus de 200 € entre le montant du prélèvement estimé résultant de la
situation et des revenus estimés de l’année en cours, avec le montant du prélèvement en l’absence de modulation. Le respect de cette condition est vérifié par l’administration fiscale sur la base des éléments que vous lui communiquerez à l’appui de votre demande de modulation.

La modulation de l’échéancier des acomptes doit intervenir si elle est acceptée, au plus tard le 3ème mois qui suit la demande.

Que se passe-t-il en cas de début d’activité ?

En cas de début d’activité en année N, aucun acompte ne sera prélevé jusqu’au 31 août de l’année N+1, puis quatre acomptes seront prélevés de septembre à décembre N+1 sur la base du revenu N déclaré en N+1.

Que se passe-t-il en cas de cessation d’activité ?

En cas de cessation d’activité en N, y compris par décès de l’exploitant, l’impôt dû à raison des bénéfices agricoles et qui n’ont pas encore été imposés est immédiatement établi à titre provisoire, sur la base d’une déclaration fiscale à déposer dans les 60 jours suivant l’évènement à l’origine de la cessation d’activité.

Est-ce que je peux demander le report des acomptes ?

En cas de difficultés justifiées, vous pourrez demander sous conditions, le report d’au maximum trois échéances sur l’échéance suivante en cas de paiement
mensuel, ou d’une échéance sur la suivante en cas d’option pour le paiement trimestriel, sans que ces reports puissent toutefois, aboutir à reporter l’année suivante une partie des versements dus au titre de l’année en cours.

2018 : année blanche ou grise ?

Les acomptes contemporains ne sont pas libératoires de l’impôt réellement dû. Vous aurez par suite, chaque année, à déclarer vos revenus de l’année précédente. Ainsi, en mai 2019, devrez-vous déclarer vos revenus 2018.

L’année 2019 verra par suite, la superposition des deux impôts : celui sur les revenus 2018 et l’impôt contemporain sur les revenus 2019 (par prélèvement à la source ou par acomptes). Pour limiter l’impact en trésorerie de ce cumul, le législateur a mis en place un crédit d’impôt exceptionnel dit CIMR (Crédit d’Impôt Modernisation Recouvrement) qui neutralisera l’impôt sur les revenus non exceptionnels perçus en 2018 et entrant bien évidemment dans le champ du prélèvement à la source.

Comment est calculé le bénéfice agricole 2018 non exceptionnel ?

L’appréciation du BA non exceptionnel repose à la fois sur la nature des revenus et sur une comparaison pluriannuelle consistant à comparer le BA déclarable au titre de 2018 avec ceux réalisés en 2015, 2016 et 2017, puis le cas échéant, 2019.

Le montant du BA 2018 est qualifié de bénéfice non exceptionnel (et l’impôt par suite effacé par l’effet du CIMR) à hauteur du plus élevé des bénéfices agricoles
2015 à 2017. Au-delà, l’impôt sur le BA 2018 restera dû, sauf justification d’un surcroît d’activité.

Toutefois, lors de la liquidation en 2020 de l’impôt sur le revenu 2019, un CIMR complémentaire pourra être accordé dans deux cas :

  • Cas où le bénéfice imposable de l’année 2019 déterminé dans les mêmes conditions, est égal ou supérieur à celui de l’année 2018 ; dans ce cas, vous
    bénéficierez automatiquement d’un CIMR complémentaire qui in fine aura effacé l’impôt sur le bénéfice 2018
  • Cas où le bénéfice imposable de l’année 2019 est inférieur à celui de l’année 2018, mais est supérieur au plus élevé des bénéfices imposables des années
    2015 à 2017 retenu pour le calcul du CIMR en 2019. Dans ce cas, vous bénéficierez aussi lors de la liquidation en 2020 du solde de l’impôt sur le revenu 2019, d’un complément de CIMR pour effacer l’impôt sur le bénéfice 2018.

En cas de perte partielle de CIMR, il demeurera toujours possible de justifier, par voie de réclamation auprès de l’administration fiscale, que le bénéfice que vous avez réalisé au titre de 2018 résulte uniquement d’un surcroît d’activité ponctuel, pour effacer complètement l’impôt acquitté au titre de cette même année.

Quid du CIMR si je débute mon activité en 2018 ?

Le dispositif pluriannuel d’appréciation de bénéfice non exceptionnel ne peut pass’appliquer. Par suite, la totalité du bénéfice réalisé en 2018 sera considéré comme revenu non-exceptionnel et le CIMR s’appliquera.

Toutefois, en 2020, lors de la liquidation de l’impôt sur le bénéfice 2019, le CIMR initialement accordé pourra être remis en cause. Il en sera ainsi, si le bénéfice
2019 par un membre du foyer fiscal, majoré le cas échéant des autres revenus entrant dans le périmètre de la réforme et imposables en 2019, est inférieur à la somme des bénéfices et des revenus de même nature réalisés en 2018. Sauf, là encore, justification par voie de réclamation auprès de l’administration fiscale, que la baisse du bénéfice 2019 résulte uniquement de la variation de votre activité par rapport à 2018. Dans ce cas, le CIMR ne sera pas remis en cause.

Que dois-je faire maintenant ?

En matière d’échanges avec l’administration fiscale, l’ensemble de la procédure est dématérialisé.

Il vous faut par suite, consulter si ce n’est fait, vote Espace particulier sur le site impots.gouv.fr. Vous y vérifierez notamment les coordonnées du compte bancaire sur lequel les acomptes contemporains vont être prélevés à compter du janvier 2019, ainsi que leur montant (information disponible aussi sur l’avis d’imposition
des revenus 2017 que vous avez reçu à la rentrée 2018).

Si vous êtes employeur, outre la logistique de production de la paye, les tests et simulations et la bonne information de vos salariés – toutes opérations pour lesquelles vos conseils membres du groupement AGIRAGRI sont compétents pour vous assister -, vous devez rapidement ouvrir si ce n’est déjà fait, votre Espace professionnel sur le site impot.gouv.fr, vérifier les coordonnées du compte bancaire de votre entreprise (sur lequel est prélevé la TVA par exemple) et si ce n’est pas le cas, déclarer l’IBAN, éditer le mandat SEPA et informer impérativement votre banque pour qu’elle autorise le prélèvement des retenues à la source que vous allez opérer dès la paye de janvier 2019, sur le salaire de vos employés.