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Fiscalité

Nouveautés fiscales pour 2020


Florence Durand, avocate associée du cabinet Terrésa, membre d’AGIRAGRI le 06/03/2020 à 16:39

La loi de finances votée le 29 décembre fait la part belle à la fiscalité du patrimoine et des particuliers. Néanmoins, quelques dispositions touchent particulièrement les exploitants agricoles. Voici l’essentiel à retenir.

Revalorisation des limites d’application des régimes BA

Les seuils d’imposition du micro-BA et du réel simplifié sont revalorisés, pour la période triennale 2020-2022, dans la même proportion que l’évolution triennale de la limite supérieure de la première tranche du barème de l’impôt sur le revenu.

Aménagement des conséquences fiscales liées au passage du micro-BA au réel

Les exploitants agricoles, les GAEC et les EARL unipersonnelles relevant du régime micro-BA sont imposés sur la base de l’ensemble de leurs recettes encaissées au cours de l’année civile, après déduction d’un abattement forfaitaire de 87 %. En cas de franchissement du seuil d’assujettissement au réel ou de changement de forme d’exploitation pour une structure relevant du réel de plein droit, les exploitants et sociétés agricoles sont alors soumis au régime réel et leur résultat imposable déterminé à partir de leurs créances et de leurs dettes certaines.

Ainsi, le passage du micro au réel, ou inversement, est susceptible d’engendrer deux séries d’inconvénients fiscaux :
– en cas de passage du réel au micro-BA, une créance acquise lors du dernier exercice imposé au réel est prise en compte dans le bénéfice imposable de cet exercice, puis à nouveau pour l’exercice suivant, relevant du régime micro, lorsque le revenu correspondant à la créance est effectivement encaissé ;
– en cas de passage du micro-BA au réel, une créance acquise lors de l’exercice au titre duquel le régime micro s’applique est imposée sans application de l’abattement auquel le contribuable aurait eu droit si l’encaissement correspondant était effectivement intervenu lors de l’imposition au régime micro.

Aussi, la loi de finances pour 2020 précise les modalités de fiscalisation des créances existantes lors du passage d’un régime à l’autre :
– au titre de l’année qui suit la sortie d’un régime réel d’imposition des BA, les recettes du premier exercice d’application du micro sont diminuées, avant application de l’abattement forfaitaire, du montant HT des créances détenues par l’exploitant à la clôture du dernier exercice imposé au régime réel, dans la mesure où ces recettes ont déjà été prises en compte pour la détermination du résultat fiscal au régime réel d’imposition ;
– en cas de passage du micro-BA à un régime réel d’imposition, les créances figurant au bilan d’ouverture du premier exercice soumis à un régime réel sont ajoutées au bénéfice imposable de ce même exercice pour leur montant HT sous déduction d’un abattement de 87 %.

Ces modifications sont applicables aux changements de régime d’imposition (passage du micro-BA au réel et inversement) intervenant à compter du 1er janvier 2020.

Cession de parts sociales de sociétés civiles agricoles

C’est la mesure passée inaperçue… Les cessions de gré à gré de parts de GAEC et d’EARL à l’IR et de toutes sociétés civiles à objet principalement agricole, même non exploitantes, étaient enregistrées au droit fixe de 125 €. Dorénavant, seules les cessions de parts de GAEC et d’EARL à l’IR restent soumises au droit fixe de 125 €, sans condition.

Pour les autres sociétés civiles agricoles, à compter du 1er janvier 2020, le bénéfice de ce droit fixe est réservé aux cessions de gré à gré de parts de sociétés civiles à objet principalement agricole constituées depuis au moins 3 ans.

Sont concernées les sociétés ayant une activité agricole tels que les SCEA et les GFA exploitants. La rédaction retenue par le législateur semblait d’abord exclure les cessions de titres des GFA bailleurs du bénéfice du droit fixe de 125 €. Mais l’administration fiscale, le 30 janvier, est venue préciser que les GFA non-exploitants n’étaient pas exclus (https://bofip.impots.gouv.fr/bofip/3378-PGP.html?identifiant=BOI-ENR-DMTOM-40-50-20-20200129).

Il s’ensuit que les cessions de parts de ces sociétés civiles agricoles sont soumises :
– soit au droit proportionnel de 3 % réduit, pour chaque part cédée, d’un abattement égal au rapport entre 23 000 € et le nombre de parts émises par la société ;
– soit au droit proportionnel de 5 % si elles sont à prépondérance immobilière.

Dispense d’enregistrement pour certains actes sociétaires

La loi de finances pour 2020 prévoit la suppression de la formalité d’enregistrement obligatoire pour certains actes et notamment les procès-verbaux ou actes sous seing privés qui constatent la prorogation des sociétés et leur dissolution. Rappelons que ceux-ci faisaient déjà l’objet d’un enregistrement à titre gratuit depuis 2019.
Désormais, seuls feront l’objet d’un enregistrement les procès-verbaux et actes sous seing privé de prorogation et de dissolution de sociétés présentés volontairement à l’enregistrement, moyennant le versement du droit fixe des actes innomés de 125 € (CGI, art. 680).
Cette disposition s’applique aux procès-verbaux et actes sous seing privé de dissolution et de prorogation de sociétés établis à compter du 1er janvier 2020.

Option pour le passage à l’IS : possibilité d’étalement sur 5 ans du profit de valorisation de certains stocks

Le passage à l’IS est un fait générateur de cessation d’activité. Jusqu’à l’adoption de la loi de finances pour 2019, seule une partie des conséquences fiscales liées au changement de régime d’imposition (maintien du bénéfice en sursis d’exploitation, non taxation des profits latents sur stocks et absence d’imposition des plus-values latentes) étaient possibles.

La loi de finances pour 2019 a institué un dispositif d’étalement sur 5 ans d’une fraction du supplément d’IR restant à recouvrer, liée au passage à l’IS, relative :
– à la réintégration des DPI, DPA et DEP non encore utilisées à la date du changement de régime fiscal,
– au solde du revenu exceptionnel en cours d’étalement à la date du passage à l’IS (CGI, art. 75-0 A),
– et à la taxation au taux marginal de l’excédent de la moyenne triennale réalisé au titre du dernier exercice précédant le changement de régime fiscal.

Toutefois, rien n’avait été prévu s’agissant du supplément d’IR relatif à la fin du dispositif optionnel de blocage de valeur des stocks à rotation lente, en cas d’option antérieure pour celui-ci. De même, l’éventuel supplément d’IR lié à un profit réalisé sur l’évaluation des avances aux cultures constatée à la clôture du dernier exercice d’imposition en BA, n’avait pas été intégré dans ce nouveau dispositif d’étalement.

La loi de finances pour 2020 répare cet oubli. Les exploitants peuvent demander l’étalement sur cinq ans (l’année de la cessation et les quatre suivantes) de ce ressaut d’imposition.

Cette mesure est applicable aux options souscrites dans le cadre d’un passage à l’IS réalisé à compter des exercices ouverts le 1er janvier 2019.

Régime des loueurs en meublé professionnels : abandon de la condition d’inscription au RCS

L’obligation pour le loueur en meublé professionnel d’être inscrit au RCS (registre du commerce et des sociétés) a été jugée contraire à la Constitution (C. constit., décision n° 2017-689 QPC du 8 février 2018). Afin de tirer les conséquences de cette décision, l’obligation pour au moins un membre du foyer fiscal d’être inscrit au RCS a été supprimée.

Le caractère professionnel de l’activité de loueur en meublé ne doit s’apprécier qu’au regard des deux seules conditions suivantes :
– recettes annuelles retirées de l’activité de location supérieures à 23 000 € ;
– et prépondérance de ces recettes par rapport aux autres revenus du foyer.

Pour mémoire : Les autres revenus d’activité du foyer fiscal s’entendent comme la somme des revenus suivants (BOFiP-BIC-CHAMP-40-10-§ 150-20/03/2019) :
– les traitements et salaires au sens de l’article 79 du CGI, c’est-à-dire y compris les pensions et rentes viagères ;
– les BIC autres que ceux tirés de l’activité de location meublée, mais y compris ceux qui ne seraient pas perçus dans le cadre d’une activité professionnelle ;
 – les BA ;
– les BNC ;
– les revenus des gérants et associés mentionnés à l’article 62 du CGI.

Cet aménagement s’applique aux revenus et profits perçus ou réalisés à compter du 1er janvier 2020. Cependant, en pratique, l’administration fiscale avait anticipé cette adaptation législative en modifiant sa doctrine en mars 2019 (BOFIP : BOI-BIC-CHAMP-40-10-20190320, n° 55).

Remboursement partiel de TIC sur le gazole non routier

Actuellement, une partie de la TIC applicable au gazole non routier (GNR) utilisé par les exploitants agricoles, les ETA, les entreprises de travaux forestiers et les CUMA fait l’objet d’un remboursement partiel après souscription d’une demande de remboursement partiel, dans le délai maximum de 3 ans suivant l’achat du carburant. La TIC à la charge de ces exploitants, après remboursement partiel, s’élève ainsi à 3,86 €/hectolitre de GNR depuis 2014.

La loi de finances pour 2020 pérennise le remboursement partiel de TIC sur le GNR jusqu’en 2022 (au titre des consommations de GNR de l’année 2021). Néanmoins et à compter du 1er janvier 2022, un carburant dédié, dénommé « gazole agricole » (et non plus « GNR »), dont l’utilisation sera réservée aux seuls travaux agricoles et forestiers, sera commercialisé et soumis à un taux de TIC spécifique, fixé à 3,86 €/hectolitre. Le taux réduit de TIC dont bénéficiera le « gazole agricole » sera ainsi directement répercuté sur son prix d’achat.

Dans l’intervalle, la loi de finances pour 2020 prévoit l’alignement du tarif de TIC appliqué au GNR, aussi applicable aux entreprises du BTP, qui passera ainsi progressivement de :
– 18,82 €/hl à 37,68 €/hl à compter du 1er juillet 2020,
– 37,68 €/hl à 50,27 €/hl à compter du 1er janvier 2021.

Afin de neutraliser les effets de ces deux augmentations de TIC sur la trésorerie des exploitants, un système d’avances est institué pendant la période transitoire (2nd semestre 2020 et année 2021). Le tarif de la première avance sera équivalent à la moitié de la hausse de TIC prévue au second semestre 2020, soit 9,44 €/hl de GNR. Tandis que le tarif de la 2nde avance correspondra à la totalité de la hausse de TIC prévue pour toute l’année 2021, soit 31,47 €/hl.

Ces avances seront payées spontanément par la direction générale des finances, sans qu’il soit nécessaire d’établir de demande préalable de versement. Leur bénéfice sera toutefois conditionné au fait que les exploitants aient respectivement déclaré leurs achats de GNR réalisés au cours de l’année 2018 en 2019, et leurs achats de GNR 2019 en 2020, et qu’ils aient été remboursés partiellement de la TIC acquittée au titre des 2 années.

Elles seront en effet calculées sur la base des volumes de GNR consommés au titre de l’avant dernière année (avance du 2nd semestre 2020 calculée à partir de la consommation de GNR de l’année 2018 et avance de l’année 2021 déterminée à partir de la consommation de GNR de l’année 2019).

L’avance versée en juillet 2020 sera régularisée lors de la campagne 2021 de remboursement partiel de TIC, sur le GNR acheté en 2020. L’avance versée en 2021 sera quant à elle régularisée lors de la campagne 2022 de remboursement partiel de TIC sur les achats de GNR réalisés en 2021.

La loi de finances pour 2020 réduit par ailleurs de 3 à 1 an le délai de recevabilité des demandes de remboursement partiel de TIC sur les achats de GNR réalisés en 2020 et 2021, en fixant la date limite de dépôt des dernières demandes de remboursement au 30 décembre 2022.

Enfin, la procédure de demande de remboursement partiel de la TIC sera exclusivement réalisable par voie dématérialisée à partir de 2020 (plateforme demaTIC – portail Chorus), alors qu’elle n’était obligatoire jusqu’ici que pour les montants de remboursements supérieurs à 300 €.

IFER : réduction temporaire pour les nouvelles centrales photovoltaïques

Les exploitants de centrales photovoltaïques dont la puissance électrique installée est supérieure ou égale à 100 kilowatts sont redevables d’une imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux (IFER) dont le tarif est révisé chaque année au 1er janvier. Ainsi, pour l’IFER 2019, le tarif est égal à 7,57 €/kw de puissance électrique installée.
Pour les impositions établies à compter de 2022, et pendant les 20 premières années d’imposition, le tarif applicable aux centrales photovoltaïques mises en service après le 1er janvier 2021 est réduit de moitié. La date de mise en service s’entend ici de celle du premier raccordement au réseau électrique.

AGIRAGRI rassemble des cabinets d’expertise comptable et d’avocats indépendants, présents sur toute la France avec plus de 3000 collaborateurs dont près des 2/3 spécialisés en agriculture et viticulture. Leur objectif : accompagner les chefs d’exploitation dans leur stratégie d’entreprise. Pour les y aider, le groupement propose les meilleures compétences réunies, des outils inédits et des partenariats innovants.

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