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Fiscalité

Loi de finances pour 2022


Olivier Augeraud, expert-comptable honoraire, consultant AGIRAGRI le 14/03/2022 à 15:16

La loi de finances pour 2022 (LF2022) s’inscrit dans le cadre de la reprise économique et de la mise en œuvre du plan de relance suite à la crise sanitaire. Ce millésime comprend peu de dispositions spécifiquement agricoles.

1 – Elargissement de la qualification de BA aux revenus issus d’actions en faveur des écosystèmes ou paiements pour services environnementaux (PSE)

La qualification fiscale des revenus issus de certaines de ces prestations a fait débat, possiblement imposées à l’IRPP comme bénéfices agricoles (BA) et pour certaines dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (BIC) ou des bénéfices non-commerciaux (BNC) les intégrant par suite, aux revenus accessoires rattachables aux BA (dans les limites prévues à l’art. 75 du CGI).

La loi prévoit désormais que les revenus qui «proviennent des actions réalisées par les personnes mentionnées aux sept premiers alinéas (i.e. de l’art. 63 du CGI) sur le périmètre de leur exploitation et qui contribuent à restaurer ou maintenir des écosystèmes dont la société tire des avantages.» entrent dans la catégorie fiscale des BA; ceci à compter des revenus 2021 déclarés et imposés en 2022.

La rédaction pose un problème d’interprétation. Convient-il en effet de considérer que l’imposition aux BA ne concernerait que les seules personnes visées à l’art. 63 du CGI? Par lecture littérale, la portée du texte serait alors limitée aux personnes suivantes:

  • Les fermiers, métayers, propriétaires exploitants,
  • Les conducteurs de chiens attelés titulaires du diplôme d’État de la jeunesse, de l’éducation populaire et du sport, mention « attelages canins ».

Plus vraisemblablement, l’idée est de considérer ces revenus comme complémentaires des revenus qualifiés d’agricoles au sens des sept premiers alinéas de l’art. 63 du CGI et par suite, de les rattacher aux bénéfices agricoles. En ce sens, la personne (comprendre dans ce cas, l’entreprise agricole) doit exercer une des activités prévue à l’art. 63 du CGI. Une précision sera bienvenue!

Le texte vise les revenus contreparties aux actions des agriculteurs qui contribuent à restaurer ou à maintenir des écosystèmes dont la société tire des avantages, et qui sont réalisées dans le périmètre de l’exploitation.

Les revenus provenant d’actions de ce type réalisées pour un tiers et/ou hors du périmètre de l’exploitation, demeurent donc des revenus non-agricoles, commerciaux ou non-commerciaux accessoires; ainsi par exemple, l’éco-pâturage, réalisé au profit de collectivités locales sur des parcelles lui appartenant et non mises à disposition de l’exploitant.

2 – Prorogation et majoration du crédit d’impôt pour congé des exploitants agricoles

Pour rappel, les exploitants dont l’activité requiert leur présence quotidienne sur l’exploitation et qui emploient du personnel pour assurer leur remplacement, bénéficient d’un crédit d’impôt codifié à l’art. 200undecies du CGI. Le dispositif qui devait arriver à son terme au 31 décembre 2022 est prorogé de deux ans jusqu’au 31 décembre 2024. Le taux du crédit d’impôt, qui est de 50 % des dépenses de personnel engagées pour assurer le remplacement, est porté à 60 % des dépenses en cas de maladie ou d’accident du travail à compter du 1er janvier 2022.

3 – Prorogation et augmentation du crédit d’impôt en faveur de l’agriculture biologique

Le crédit d’impôt en faveur de l’agriculture biologique (AB) est régulièrement reconduit. La LF2022proroge le dispositif pour une durée de trois ans (jusqu’à l’imposition des exercices clos de 2023 à 2025, toutes conditions posées par l’art. 244 quater L du CGI par ailleurs, remplies) et porte le montant du crédit d’impôt de 3 500€ (jusqu’à l’imposition des exercices 2022) à 4 500€.La limite du cumul entre le crédit d’impôt AB et les aides à la conversion ou au maintien de l’agriculture biologique, sera relevée, passant de 4 000 € à 5 000€ à compter de 2023. Pour les Gaec, le montant reste multiplié par le nombre d’associés dans la limite de 4.

4 – Report d’imposition des opérations de restructuration des sociétés civiles agricoles

L’application de ce dispositif et ses conséquences, relève plus particulièrement du savoir-faire de vos conseils membres du groupement AGIRAGRI. Schématiquement, le mécanisme fiscal de report d’imposition des plus-values résultant d’opérations d’apport effectués dans le cadre de fusions, scissions, et apports partiels d’actifs de sociétés civiles professionnelles (SCP) est étendu à ces mêmes opérations réalisées à compter de 2021, lorsqu’elles concernent des sociétés civiles agricoles exclusivement, relevant des BA (y compris par rattachement des revenus accessoires non agricoles BIC et BNC dans les conditions prévues à l’art. 75 du CGI). Sont donc exclus les apports réalisés par ou au profit de sociétés commerciales et ce, même si elles relèvent de l’IR BA, comme les SNC ou les SARL de famille.

Les associés de sociétés civiles agricoles relevant de l’IR BA peuvent donc désormais bénéficier, sur option, d’un report d’imposition des plus-values professionnelles réalisées sur les immobilisations non amortissables apportées à la suite d’une opération de fusion, d’apport partiel d’actif ou de scission au profit d’une autre société civile agricole. L’imposition de ces plus-values est alors reportée à la cession ultérieure :

  • Des immobilisations non amortissables apportées, par la société civile agricole bénéficiaire de l’apport,
  • Ou des parts de la société civile agricole reçues en contrepartie de l’apport, par l’associé de la société civile agricole apporteuse.

L’option pour le dispositif concerne aussi, sous conditions spécifiques, les opérations d’échange des titres des sociétés civiles agricoles objet d’une fusion ou d’une scission. Dans ce cas les plus-values sur parts sont ,reportées à la cession des titres de société qui lui ont été attribués en échange.

S’agissant des plus-values professionnelles sur éléments amortissables, elles sont transférées à la ou les sociétés civiles agricoles bénéficiaires de l’apport et étalées fiscalement par parts égales sur une période de quinze ans pour les constructions, plantations, agencements et aménagements de terrains amortissables, et cinq ans pour les autres immobilisations amortissables (matériels agricoles).

A noter toutefois que le nouveau dispositif n’évite pas l’imposition du profit sur les stocks transmis à l’issue de ces opérations contrairement à un autre régime fiscal de faveur (art. 151 octies du CGI). A voir si la doctrine administrative introduira une tolérance!

Enfin, ce report d’imposition n’est pas cumulable avec les régimes d’exonération de plus-values des petites entreprises (art. 151 septies du CGI et art. 238 quindecies du CGI). Votre conseil AGIRAGRI choisira avec vous le dispositif fiscal le plus approprié.

5 – Régime de l’IS ouvert aux entrepreneurs individuels

L’entrepreneur individuel relevant des BA selon un régime du réel, pourra opter pour le régime de l’IS, ceci sans avoir à modifier son statut juridique. L’entrée en vigueur du dispositif est conditionnée à celle de l’art. L526-22 du code de commerce dans sa rédaction issue de la loi du 14 février 2022 en faveur de l’activité professionnelle indépendante. L’option pour l’IS se fera en optant pour l’assimilation, au plan fiscal, à une EARL dont l’entrepreneur serait l’associé unique. Les commentaires de l’administration sont attendus pour clarifier notamment les conséquences fiscales et sociales qui résulteront de l’option.

6 – Taux de TVA des produits agricoles

Le taux de 5,5 % s’applique aux denrées alimentaires destinées à la consommation humaine. La LF2022 ajoute à cette catégorie les produits normalement destinés à être utilisés dans la préparation de ces denrées et les produits normalement utilisés pour compléter ou remplacer ces denrées (taxés jusqu’à présent au taux de10 %). Ainsi par exemple, les ventes de céréales généralement destinées à être utilisées dans la préparation de denrées alimentaires humaines, mais non consommables sans transformation préalable, étaient soumises au taux intermédiaire de 10 %. Ces ventes seront désormais soumises au taux réduit de 5,5 %. La loi ajoute également aux produits soumis au taux réduit de 5,5 % les produits normalement utilisés pour compléter ou remplacer ces denrées (additifs, compléments alimentaires par exemple). Là encore les précisions de l’administration sont très attendues!

Le taux de 10 % est appliqué aux ventes de variétés de produits agricoles destinés à l’alimentation animale ou généralement utilisés pour la préparation de ces denrées, dès lors qu’ils entrent dans l’une des deux catégories suivantes:

  • Produits d’origine agricole, de la pêche, de la pisciculture ou de l’aviculture qui n’ont subi aucune transformation,
  • Matières premières, d’aliments composés ou d’additifs destinés aux animaux producteurs de denrées alimentaires elles-mêmes destinées à la consommation humaine

Attention toutefois, les produits destinés à la consommation animale relève toutefois du taux réduit de 5,5 %lorsque les variétés auxquelles ils appartiennent peuvent indifféremment être destinés à l’alimentation humaine ou à l’alimentation animale!

Le taux de 10 % est également applicable aux produits normalement destinés à être utilisés dans la production agricole et non destinés à l’alimentation animale. Sont concernés les ventes d’engrais par exemple, ainsi que celles des produits d’origine agricole, de la pêche, de la pisciculture et de l’aviculture n’ayant subi aucune transformation.

7 – Exonération de taxes foncières sur les locaux de coopératives utilisés par un tiers

L’exonération de taxes foncières pour les locaux utilisés par un coopérateur est étendue à compter des impositions établies au titre de 2022, au cas de leur utilisation par un tiers, dès lors que les locaux sont équipés des moyens de production nécessaires en vue de la transformation exclusive des produits des adhérents de la coopérative et que ces produits sont sous appellation d’origine, sous indication géographique ou entrent dans la catégorie des spécialités traditionnelles garanties.

AGIRAGRI rassemble des cabinets d’expertise comptable et d’avocats indépendants, présents sur toute la France avec plus de 3000 collaborateurs dont près des 2/3 spécialisés en agriculture et viticulture. Leur objectif : accompagner les chefs d’exploitation dans leur stratégie d’entreprise. Pour les y aider, le groupement propose les meilleures compétences réunies, des outils inédits et des partenariats innovants.