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Agriculture biologique

Les objectifs d’Ambition Bio ne seront pas atteints, regrettent les sénateurs


TNC le 06/02/2020 à 11:00
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Les sénateurs Alain Houpert et Yannick Botrel ont présenté leur rapport sur le financement de l'agriculture biologique, le 5 février. (©TNC)

Si le gouvernement communique beaucoup sur sa volonté de développer l’agriculture biologique, un rapport de la commission des finances du Sénat dénonce le manque de financement pour soutenir cette vision. Selon les sénateurs, les objectifs du plan Ambition bio 2022 ne pourront pas, à ce rythme, être atteints avant 2026.

Amorcé en 2018, le projet « Ambition Bio 2022 » prévoit de convertir 15 % de la surface agricole utile au bio et assurer la fourniture de 20 % de produits bio dans les repas servis dans la restauration collective hors domicile. Des objectifs qui, pour la commission des finances du Sénat, sont « hors d’atteinte » à l’échéance prévue.

Dans un rapport présenté le 5 février, les sénateurs Alain Houpert (LR), Yannick Botrel (Socialistes et républicains) reprochent en effet au gouvernement « une ambition très communicationnelle », alors que l’État « ne dispose plus de moyens autonomes de les atteindre et n’a exercé que faiblement ses missions de coordination ».

Les sénateurs dénoncent, à titre d’exemple, la réduction de l’aide à la conversion à deux années au lieu de trois, l’agriculteur pouvant ensuite percevoir les aides au maintien pendant trois années au lieu de deux auparavant. « Mais ce ne sont pas les mêmes montants », souligne Alain Houpert, qui précise que pour les maraîchers, le manque à gagner sur cette troisième année est de l’ordre de 400 euros d’aides par hectare. Par ailleurs, dans certaines régions, les MAEC –non cumulables avec les aides à la conversion- sont plus attractives et n’incitent donc pas les producteurs à passer au bio. La gestion de aides bio a également souffert de manquements importants.

Voir :
– Aides à la conversion : les agriculteurs bio dénoncent « l’incohérence de l’exécutif »
Florent Guhl (Agence Bio) : « 18 mois de retard, c’est encore beaucoup trop»
– Un témoignage sur le retard important des aides bio

Les sénateurs soulignent également que le financement pour l’offre de bio en restauration collective hors domicile n’est pas assuré, tout comme l’avenir du crédit d’impôt pour l’agriculture biologique.

Lire aussi : Bio en restauration collective, des stratégies pour réduire les coûts

Assurer l’avenir économique de la filière

S’il paraît sévère, le rapport vise surtout à pointer les problèmes, de façon réaliste, « pour que les agriculteurs et les consommateurs soient mieux protégés », précise Alain Houpert. D’autant que si, pour l’instant, le surcoût de travail et la baisse de rendement sont financés par le consommateur, rien n’assure que ce prix restera le même quand la production se sera intensifiée. Le rôle grandissant de la grande distribution dans la commercialisation du bio est également un risque, précisent les rapporteurs, qui formulent plusieurs propositions pour assurer l’avenir économique de l’agriculture biologique. Parmi elles figurent ainsi la pérennisation du statut de travailleur occasionnel ou le soutien à l’investissement via le suramortissement des équipements.

Le rapport insiste également sur le besoin de lisibilité de la politique budgétaire liée au développement de l’agriculture biologique, avec des crédits aujourd’hui « saupoudrés dans des budgets épars ». Par ailleurs, « les aides sont théoriquement destinées à compenser les pertes d’opportunité résultant du passage au bio, et non à apporter aux exploitants une rémunération pour les biens publics qu’ils produisent », rappellent les auteurs du rapport. Une réflexion devra dont être menée pour évaluer précisément les externalités positives de l’agriculture biologique et la façon de les rémunérer.

Enfin, le pilotage de l’agriculture biologique devrait aussi être repensé, les sénateurs s’interrogeant notamment sur le fonctionnement de l’Inao, qui externalise les processus de certification engendrant un chiffre d’affaires élevé. Il sera également nécessaire de renforcer les contrôles de la DGCCRF.