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Deux-Sèvres

Le chantier de la « bassine » n’a pas encore repris


AFP le 02/11/2022 à 14:58

Le chantier d'une retenue agricole contestée dans les Deux-Sèvres n'a pas repris mercredi, quatre jours après une manifestation et des violences, tandis que des opposants ont réclamé au gouvernement un moratoire sur les travaux.

« Grâce à cette mobilisation, les machines sont toutes parties du chantier », s’est félicitée Marion Vigot, membre du collectif d’opposants « Bassines non merci », lors d’une conférence de presse sur le site de Sainte-Soline, resté sous étroite surveillance des gendarmes. « Le chantier est arrêté. Aujourd’hui, c’est à l’État de décider (…) : le relancer ou aboutir à notre demande de moratoire pour l’ensemble des projets de stockage d’eau en France », a-t-elle ajouté aux côtés du député européen EELV Benoît Biteau, de représentants locaux de la Confédération paysanne, du syndicat Solidaires, d’associations environnementales et d’une trentaine de militants.

« La balle est dans le camp de l’État. On lui donne 15 jours pour se positionner », a-t-elle mis en garde, promettant un nouveau rassemblement, à une date non précisée, si les travaux reprennent. Le chantier « a vocation à se poursuivre », avaient auparavant assuré à l’AFP la préfecture du département et la Coop’ de l’eau, structure qui porte le projet, sans donner de date de reprise effective.

Samedi, plusieurs milliers de personnes avaient manifesté à Sainte-Soline. Des affrontements ont éclaté quand des militants ont voulu pénétrer sur le chantier, avant d’être repoussés par les forces de l’ordre. L’interdiction de manifester avait été prolongée jusque mercredi matin.

Dimanche soir, le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, avait annoncé le maintien d’un millier de gendarmes, « autant qu’il faudra », pour empêcher une ZAD de s’installer – seules des tours de guet en bois et en tôle, pour l’instant, ont été édifiées par les opposants sur un terrain à deux kilomètres du chantier.

La « bassine » de Sainte-Soline, surnom donné par les opposants, est une des 16 réserves de plusieurs centaines de milliers de m3 qui doivent voir le jour dans le département. Élaboré par un groupement de 400 agriculteurs, le projet vise à rendre disponible de l’eau pour l’irrigation durant l’été, grâce au pompage des nappes phréatiques superficielles en hiver.

En contrepartie, les porteurs du projet, soutenus par l’État, se sont engagés, dans un protocole signé en 2018, à adopter des pratiques tournées vers l’agro-écologie. Leurs détracteurs y voient à l’inverse une « fuite en avant » du modèle « productiviste ».

« Les agriculteurs qui réclament de gros investissements sur ces « bassines » sont les mêmes qui, depuis 60 ans, ont effacé les méandres des cours d’eau, retourné les prairies humides, drainé les zones d’épandage de crues, coupé les arbres, effacé les haies, qui sont les conditions pour que l’eau reste sur les bassins versants », a déclaré l’eurodéputé EELV Benoît Biteau, agriculteur dans la région.

« Les gens qui sont là ne sont pas contre l’irrigation, ne sont pas éventuellement contre le stockage de l’eau. Si on doit le faire, on doit le faire en responsabilité, surtout quand on met autant d’argent public et qu’on parle d’un bien commun identifié comme tel par la loi ».

« Aujourd’hui, nous demandons à être écoutés par Madame la Première ministre parce que ce débat-là doit avoir lieu à l’échelle nationale », a renchéri Benoît Jaunet, président de la Confédération paysanne dans les Deux-Sèvres.

« Remettre tout à plat maintenant, c’est condamner le protocole issu de la démocratie directe », a réagi auprès de l’AFP Thierry Boudaud, agriculteur président de la Coop’ de l’eau, qui appelle à « continuer le dialogue avec les associations environnementales et l’État » mais « dans le cadre du protocole ».