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Sucre

Frondeurs ou direction sortante, Tereos choisit son camp


AFP le 24/06/2019 à 11:05

Après deux ans de luttes intestines, le groupe coopératif Tereos (Béghin Say), deuxième sucrier mondial, espère enterrer la hache de guerre mercredi en renouvelant partiellement son conseil de surveillance, et en se prononçant sur le projet à même d'affronter un marché du sucre plus volatile que jamais.

Á Saint-Quentin, dans l’Aisne, au cœur de la plaine betteravière française, 181 conseillers de région, sorte de grands électeurs qui auront pour mission de représenter les 12 000 coopérateurs, vont se réunir pour renouveler un tiers du conseil de surveillance, chargé de valider les grands arbitrages financiers et la stratégie du groupe, proposés par le directoire.

Autant de pommes de discorde entre la direction et une partie des coopérateurs, représentés par trois élus « frondeurs » du conseil de surveillance, un temps exclus de la coopérative, avant d’y être réintégrés. Principale raison de leur colère : une « gouvernance défaillante », selon eux, et une gestion jugée peu transparente, alors que les résultats de la diversification internationale du groupe sont jugés insuffisants.

Touché, comme l’ensemble des acteurs du sucre, par une chute historique des cours mondiaux, Tereos a annoncé mi-juin une perte nette multipliée par dix, à 242 millions d’euros. Lors de l’annonce des résultats du groupe, Alexis Duval, président du directoire, a mis en avant la résilience de Tereos et la faible place occupée par le sucre européen, qui ne représentait cette année que 14 % des résultats de la coopérative, moins exposée donc aux fluctuations de ce marché.

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« Nous, on veut se séparer de toutes les filiales qui présentent des déficits chroniques », a déclaré à l’AFP Gilles Bollé, l’un des chefs de file de la contestation, qui avait tenté sans succès de provoquer la révocation du conseil de surveillance. Le projet qu’il a présenté avec l’association de défense des coopérateurs (ADCT), prévoit de « mettre le paquet sur les trois grandes filiales qui nous paraissent essentielles » : Tereos France, Tereos-Syral (usines d’amidon qui travaillent le blé et le maïs en Europe), et au Brésil, la partie sucre, Tereos-Guarani.

En ligne de mire, le désendettement de la coopérative, dont la dette nette s’élevait fin mars à 2,5 milliards d’euros, contre 2,35 milliards un an plus tôt. A ce moment là, la direction avait présenté un projet d’ouverture du capital, à horizon deux à trois ans.

L’ouverture du capital au centre du jeu

Le projet « est toujours à l’ordre du jour. On reprendra ça, si c’est également le souhait des coopérateurs, à l’issue des assemblées générales », avait indiqué Alexis Duval le 12 juin dernier, lors de la présentation des résultats. Un report à demi-mot qui semble traduire une volonté d’apaisement. « Nous, on ne veut pas devenir une coopérative d’approvisionnement qui livre à une société qui serait en partie détenue par des privés », a averti de son côté Gilles Bollé. « On est tellement endetté qu’à un moment donné, on peut perdre le contrôle. (…) On préfère réduire la voilure mais rester maîtres chez nous », a-t-il expliqué.

Les assemblées de région n’ont pas donné lieu, semble-t-il, à de gros bouleversements dans les rapports de force, entre partisans de la direction actuelle et partisans du changement. La direction de Tereos s’est ainsi félicitée à l’issue de la première assemblée d’un soutien « exprimé massivement » par les coopérateurs de la région Picardie Est « en faveur (…) de la stratégie mise en œuvre », en renouvelant l’intégralité des 16 conseillers sortants, candidats à leur réélection avec des scores compris entre 75 % et 94 % des votes. « Les trois régions traditionnelles, Picardie-Est, Grand-Est et Sud de Paris, ont reconduit les gens qui étaient en place, globalement c’est favorable à la direction », a indiqué Gilles Bollé.

Dans les trois autres, en revanche, – Picardie-Ouest, Nord-Littoral et Nord -, « c’est nous qui sommes reconduits largement, donc, on reste dans les mêmes équilibres », a-t-il expliqué. Ce statu quo se prolongera-t-il mercredi, lors de la plénière ?

« Aujourd’hui, il n’y a rien de sûr, tout reste ouvert, eux ne peuvent pas dire qu’ils vont gagner et nous non plus. Ça sera très, très serré », assure Gilles Bollé.

La direction de Tereos, elle, se garde bien de faire un pronostic, se contentant de mettre en avant les « échanges constructifs », qui ont rythmé selon elle les assemblées de région.

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