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Reportage dans le Gâtinais

Avec les PPAM, un parfum de diversification pour répartir les risques


TNC le 27/09/2021 à 10:38
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Thomas Palfroy nous a donné rendez-vous dans un de ses champs de lavandin. Et non, nous ne sommes par dans la Drôme, mais bel et bien, dans le Parc naturel régional du Gâtinais français, à cheval sur l'Essonne et la Seine-et-Marne. Avec 27 autres confrères, Thomas Palfroy fait, en effet, partie des agriculteurs qui ont relancé la culture de plantes aromatiques et médicinales près de Milly-la-Forêt (Essonne), bassin historique de production.

Avec des exploitations agricoles typiques du secteur de l’Essonne et de la Seine-et-Marne -betteraves sucrières, céréales et colza-, Thomas Palfroy et plusieurs confrères ont eu la volonté de diversifier leurs activités aussi bien sur le plan agronomique, que sur le plan économique.

« Répartir les risques » 

« On a cherché à créer de la valeur ajoutée supplémentaire, mieux répartir les risques » et ainsi ne pas mettre tous les œufs dans le même panier, explique Thomas Palfroy. En parallèle, diverses études avaient été menées, depuis 2012, notamment par le Conservatoire des plantes de Milly-la-Forêt, concernant les plantes à parfum, médicinales et aromatiques (PPAM) dans le but de relancer la filière. Milly-la-Forêt (Essonne) était, en effet, un bassin de production historique de PPAM, notamment connue pour la menthe poivrée. « Dans le Parc naturel régional du Gâtinais, les terres superficielles et hétérogènes sont particulièrement adaptées à la culture de ces plantes aromatiques », précise l’agriculteur. Différentes expérimentations en micro-parcelles et en plein champ ont permis de déterminer les plantes les plus intéressantes à cultiver. 

Parmi les essences : de la menthe poivrée, du lavandin, du thym, de la camomille…

Intéressés par cette potentielle diversification et de nouveaux challenges à relever, 14 agriculteurs se lancent alors en 2017 dans la production d’huiles essentielles, avec au départ 5 ha mis en culture. Parmi les essences : de la menthe poivrée, du lavandin, du thym, de la camomille… En 2018, ils décident de former la Cuma Milly PPAM, dont Thomas Palfroy est aujourd’hui le président, afin d’investir ensemble dans une distillerie d’huile essentielle de plus grande capacité (adaptée à une centaine d’hectares de PPAM). Aujourd’hui, le groupement compte 28 producteurs et une centaine d’ha en tout. L’objectif visé d’ici 2025 est d’atteindre 250 ha. 

Parmi les essences : de la menthe poivrée, du lavandin, du thym, de la camomille… Ici en photo, un champ de thym en fleurs. (©Milly PPAM)

« S’adapter à un type de production différent »

« Parmi les agriculteurs engagés, certains produisaient déjà des plantes aromatiques, pour l’usine locale Darégal, spécialisée dans les plantes et herbes aromatiques surgelées. Ils avaient déjà des connaissances sur ces productions », précise Thomas Palfroy. Il note l’importance des tours de plaine réguliers commun et des échanges de groupe : cela permet de « partager ses expériences et d’avancer plus vite ». Les agriculteurs ont également été accompagnés par la chambre d’agriculture de la Drôme sur le plan technique.

Car il faut tout de même « s’adapter à un type de production et un raisonnement différents. Ce sont des cultures pérennes, elles restent entre 5 et 15 ans en place selon les essences ». L’implantation représente alors un gros poste de charges et nécessite du travail. En ce qui concerne le lavandin par exemple, les rangs doivent être espacés de 2 m et la récolte démarre seulement à partir de la 2ème année. 

Si ces cultures ne nécessitent ni fongicide, ni insecticide, elles demandent, par contre, un point d’attention particulier pour le désherbage. En conventionnel, les agriculteurs ont recours au désherbage chimique et au binage inter-rangs et en agriculture biologique, les outils sont la bineuse aussi et la binette principalement. Aujourd’hui, environ la moitié des agriculteurs engagés sont en agriculture biologique, et les conversions devraient s’intensifier, car la demande croît en ce sens. 

Un marché difficile à appréhender 

Autre principal défi pour la culture de ces PPAM : gérer la commercialisation.  « En effet, ces plantes sont relativement compliquées à commercialiser. Le marché est, on peut dire, opaque et en tout cas, très différent de ceux dont on a l’habitude ». Il faut que « les produits soient reconnus, constants et disposer de volumes constants, etc. »

Il reconnaît : « ça a été difficile à appréhender pour tout le groupe au départ. Aujourd’hui, nous avons la chance d’avoir des partenaires acheteurs -grossistes, laboratoires…- qui sont présents et nous suivent. Ils nous appellent pour savoir où en sont les récoltes et connaître leur qualité, etc. On commence enfin à comprendre ce marché compliqué. »

Voir aussi : Les huiles essentielles en danger

Un chantier de récolte à l’aide d’une récolte « Bonino ». (©Milly PPAM)

Et depuis l’an dernier, le groupe d’agriculteur s’est lancé un nouveau défi : la vente directe des huiles essentielles en flacons : ils ont, pour cela, créé leur marque Milly Sens et se sont regroupées en SAS (Millyppam). La mise en flacon est déléguée à une herboristerie de Milly-la-Forêt. « À terme, l’objectif est de développer la gamme et l’offre. »