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Reportage

Au marché de Rungis, on veut croire à des fêtes réussies


AFP le 07/12/2021 à 17:45

« À Rungis, on est obligé d'être optimiste. Si on ne l'est pas, à quoi ça sert de continuer de bosser ? » : Francis Fauchère, grossiste en viandes, l'assure. Le « ventre de Paris » sera une nouvelle fois au rendez-vous des fêtes malgré la cinquième vague du Covid.

C’est le même son de cloche au pavillon de la Marée, un des emblèmes du marché, où s’arracheront langoustes, huîtres et Saint-Jacques quelques jours avant le réveillon.

« Noël se fête à la maison, en famille, les produits de la mer, notamment en plateau, feront encore recette cette année », prédit Véronique Gillardeau, ostréicultrice chargée du pavillon de la Marée.

Dans la halle des volailles, il n’est pas encore 5h du matin mais c’est déjà le pic d’activité. Les « Pardon ! Pardon ! » fusent de toute part, au milieu d’un incessant ballet de chariots métalliques attendant leur cargaison de cuisse de poulet ou de dinde. Rungis revendique le titre de principal marché de produits frais au monde.

« Pénuries de foie gras »

Pour Gino Catena, grossiste et considéré sur place comme « le roi de la volaille », les premières prévisions pour Noël sont positives, malgré des dernières semaines compliquées.

« Cette année, les produits phares seront des petits modèles comme le chapon ou la poularde, vendus à des prix accessibles et suffisants pour des familles de 4 à 6 personnes », prévoit-il.

Quelques mois à peine après la fin de la dernière épidémie de grippe aviaire, le faible nombre de naissances n’a rien arrangé et M. Catana, chapeau vissé sur la tête prévient : « Il y aura des pénuries de foie gras. On craint même un manque à gagner de 20 % ».

Tout le monde a en tête le discours de Jean Castex lundi, qui a recommandé de limiter les interactions sociales pour enrayer la cinquième vague de l’épidémie. Certains carnets de commandes s’en trouvent déjà impactés.

Guillaume Pudewil, reconnaissable à sa doudoune rouge, est un des principaux distributeurs de fruits exotiques. Chaque hiver, en prévision de la fin d’année, il propose des litchis, des fruits du dragon ou encore des kiwis rouges français, meilleures ventes de cette fin d’année. Mardi, il avait du mal à dissimuler son inquiétude.

« Les chiffres n’étaient déjà pas très bons depuis septembre, en raison des difficultés à importer des produits provenant de l’hémisphère sud et de l’augmentation des prix du fret. Mais ce matin, on est à – 90 % d’activité par rapport à une journée normale », s’alarme-t-il.

« Indicateur de tendances »

Les carnets de commandes ne se remplissent pas davantage au secteur des carnés. C’est même plutôt le contraire.

Francis Fauchère, grossiste en viandes, constate « 15 % d’annulation en 24 heures, en raison des pots ou soirées annulés », mais tente de faire contre mauvaise fortune bon coeur.

« Noël est une période de rêve et de voyages, c’est en décembre qu’on vend le plus de produits de bonne qualité. On vit au jour le jour », soupire-t-il devant ses pièces de veau, en tâchant de garder le sourire.

L’incertitude économique liée à la situation sanitaire n’empêche pas l’émergence de nouvelles tendances. Cette année, à Rungis la part belle est faite au végétal et autres substituts à la viande. On goûte des huîtres végétales, des boissons végétales ou encore des œufs de saumon… sans saumon.

« On peut passer des fêtes sans protéine animale », estime Florence Hardy, présidente de la maison Medelys, tout en saluant l’arrivée du végétal en restauration conventionnelle.

Yann Berson, directeur général de Dispéré, s’est aussi lancé dans le bio et le végétal. Il propose par exemple une terrine imitant le foie gras, à base de noix de cajou, des truites bio françaises ou encore des insectes aux épices.

« Ce marché reste encore marginal, mais répond à une vraie demande, en augmentation », dit-il à l’AFP. « Certains de nos produits seront sur des tables à Noël… » À deux semaines des fêtes, Stéphane Layani, président du marché, certifie qu’avec « 10 milliards d’euros de chiffre d’affaires, Rungis sait un peu à l’avance ce qu’il va se passer sur les tables des fêtes ».