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Marchés mondiaux

« Tout tend vers une diminution des flux » de viande bovine, selon l’Idele


TNC le 05/08/2020 à 17:20
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La crise économique s’approfondit de semaine en semaine, bousculant les marchés de la viande bovine. (©TNC)

« La Covid-19 a percuté un marché mondial en plein essor » a annoncé l’Idele dans son dossier économie de l'élevage traitant du marché mondial de la viande bovine. Le coronavirus a bousculé les tendances et rendu les perspectives incertaines pour 2020.

En 2019, les principaux exportateurs mondiaux (Amérique du Nord, du Sud, et Océanie) se félicitaient de leurs exportations de viande bovine en hausse, tiré par une forte demande asiatique, principalement chinoise. Certes, la viande bovine y reste encore marginale dans les rations alimentaires, mais elle gagne progressivement de l’ampleur, particulièrement dans la restauration hors domicile. Toutefois, « l’Union européenne paraît chaque année plus marginale dans ce grand jeu des échanges mondiaux de viande bovine même si ses exportations ont progressé l’an passé. Son marché naturel, autour de la méditerranée, a été pénalisé par la crise économique et les tensions géopolitiques (Turquie, Liban, Libye) », précise l’ Idele.

Mais si l’offre à l’export a augmenté, notamment en Amérique Latine et en Australie, la demande de certains pays a diminué. C’est le cas en Argentine et au Brésil, où une crise économique profonde a diminué la demande intérieure. En Australie, les éleveurs ont dû procéder à une forte décapitalisation en raison de la sécheresse persistante.

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Mais comme pour de nombreux secteurs, la crise provoquée par la Covid-19 et le confinement a bouleversé le marché mondial de la viande bovine. Un point positif tout de même : « cette pandémie a favorisée la renationalisation de l’approvisionnement pour répondre à des achats accrus des ménages. » Pour l’Idele, les impacts sur le commerce mondial sont encore difficiles à évaluer, mais « entre difficultés logistiques, fermeture prolongée des restaurants et surtout crise économique qui s’approfondit de semaine en semaine, tout tend vers une diminution des flux ».

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Des perspectives incertaines pour 2020

  • Europe

La production européenne risque de reculer encore en 2020, à hauteur de 1 à 2 %, estime l’Idele. Les problèmes d’équilibre carcasse (meilleure valorisation des vaches laitières, conséquence de la hausse de la demande en viande hachée, mais baisse de la demande pour les aloyaux), mais aussi la perte de valeur sur les cuirs et les abats ont provoqué de « violentes baisses des prix sur certains marchés ». Si la situation devrait s’améliorer avec le déconfinement et le reprise de la restauration hors domicile, « le pouvoir d’achat des consommateurs européens risque d’être réduit par la crise économique consécutive au confinement », prévient l’Idele.

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En Russie, le cheptel devrait continuer de reculer en 2020. Mais le coronavirus impactant négativement la demande intérieure du pays, la baisse des importations de viande bovine pourrait s’accélérer. Leur déclin avait d’ailleurs été initié par l’embargo de 2014. À noter également que « fin 2019, les autorités russes menaçaient de suspendre l’importation de viande bovine depuis l’Argentine et le Paraguay suite à la découverte de traces de ractopamine ». Une raison qui avait d’ailleurs valu au Brésil la mise en place d’un embargo sur ses exports de viandes bovine et porcine par la Russie fin 2017, laissant plus de place à la concurrence. L’embargo avait été levé un an plus tard.

  • Méditerranée

En méditerranée, les importations ont diminué l’an dernier, conséquence de difficultés économiques rencontrées par certains pays. « Enlisée dans une crise économique, la Turquie a réduit de moitié ses achats. Elle ne comptait plus que pour 40 % des importations de la zone en 2019 contre 59 % en 2018 », explique l’Idele. La demande intérieure est en berne dans le pays. C’est le cas également au Liban. En revanche, les importations de bovins vivant et de viande ont grimpé dans les pays du Maghreb. Mais les parts de marché de l’Union européenne continuent de se réduire sur la viande bovine dans cette zone.

Un problème de taille pour 2020 : l’économie de certain pays fortement dépendante du pétrole. L’effondrement des cours provoqué par la pandémie risque de rendre ce marché très incertain et de tirer les importations vers le bas. C’est le cas notamment en Algérie, en Égypte, en Turquie. La diminution des revenus liés au tourisme risque de surcroît d’aggraver la situation économique déjà fragile de certains pays.

  • Amérique du Sud

La situation est un peu moins morose en Amérique du Sud. En 2019, la production des principaux exportateurs continuer d’augmenter, essentiellement « le résultat de la croissance de la production brésilienne et de la poursuite de la décapitalisation du cheptel argentin face à une crise économique quasi continue depuis 2017 ». Face à la conjoncture économique globalement défavorable des pays de cette zone et de la demande chinoise vigoureuse, les opérateurs préféraient se tourner vers l’export plutôt que vers le marché intérieur. Les exportations ont même atteint un « record absolu » en 2019 (3,7 millions de téc, + 16 % / 2018).

Au Brésil, si la pandémie risque d’aggraver la crise sociale actuelle, elle est loin d’entraver les exportations : « les envois de viande bovine vers la Chine et Hong-Kong se sont à nouveau envolés, et de nouveaux marchés à l’export se profilaient (ouverture du marché étasunien à la viande in natura en 2020). En revanche, la hausse des exports argentins pourrait fléchir, comme la production. La consommation domestique risque d’être fortement impactée par la Covid-19, l’économie du pays étant « déjà au plus bas ».

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  • Amérique du Nord

En Amérique du Nord, les envois de viande sont restés dynamiques en 2019. Alors que la production suivait une tendance haussière aux États-Unis, elle « a été brutalement ralentie par la multiplication des foyers de contamination dans les abattoirs et les usines de transformation ». L’explosion du chômage dans le pays a par ailleurs fait reculer la consommation de viande. Avec la crise, les prévisions de production et d’exportation ont été revues à la baisse, mais reste encore en progression.

Quant au Canada, la pandémie a plongé le pays dans la récession, avec des « achats erratiques » de la part des consommateurs pendant le confinement. Après la découverte de clusters dans les deux plus importants abattoirs du pays, les abattages se sont effondrés. « Les mises en place dans les centres d’engraissement sont en recul tandis que les retards d’abattages provoquent une hausse inédite des poids à l’abattage », indique l’Idele.

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Après une année 2019 record pour la production et les exportations mexicaines, la tendance devrait se poursuivre en 2020, à un rythme moins soutenu. « L’impact de la pandémie reste difficile à mesurer, mais pourrait freiner la consommation intérieure et donc stimuler les exportations ».

  • Asie du Sud et de l’Est

En 2019, l’Asie de l’Est et du Sud a été un véritable moteur pour les importations mondiales de viande bovine (deuxième place). Avec la peste porcine africaine et la hausse du prix du porc en Chine (premier importateur mondial), beaucoup de consommateurs se sont tourné vers d’autres sources de protéines animales, et notamment la viande bovine, malgré son prix élevé. En 2020, l’Idele estime que la consommation devrait continuer de croître dans le pays, tout comme les importations, et ce, malgré la crise sanitaire.

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  • Océanie

La forte demande chinoise avait d’ailleurs également boosté les envois en provenance d’Océanie, notamment les exports néozélandais. Mais début 2020, « la pandémie a freiné les envois vers la Chine entraîné des retards logistiques ». La production de viande bovine est d’ailleurs attendue en repli dans le pays en 2020. En cause : la sécheresse qui diminue les rendements des prairies et les poids des carcasses.  En revanche, les conditions climatiques plus favorables en Australie devraient permettre la reconstitution du cheptel cette année. La production est toutefois attendue en baisse, « avec des exportations en repli et se concentrant sur les marchés les plus rémunérateurs, notamment la Chine ».