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Académie d'Agriculture de France

L’agriculture biologique en questions


Bernard LE BUANEC, membre de l'Académie d'Agriculture de France le 11/03/2021 à 07:59
Rows of organic grapevine in a Champagne vineyard.

(©Pixabay)

D'après le Codex alimentatrius, l'agriculture biologique est "une gestion holistique de la production qui favorise la santé de l'écosystème, y compris la biodiversité, les cycles biologiques et l'activité biologique des sols". Mis à part les produits prohibés, l'agriculture bio utilise toutefois des pesticides autorisés dits naturels (dont le maintenant très controversé sulfate de cuivre) ainsi que des OGM non réglementés. Comment se comparent les deux pratiques culturales ?

Situation actuelle du bio

Le développement des surfaces

Le tableau ci-dessous montre la part de surfaces cultivées en bio certifié ou en conversion vers le bio :

©Académie d’Agriculture de France

Le Grenelle de l’environnement prévoyait 20 % de bio en 2020, chiffre non atteint ; le nouveau programme Ambition bio 2022 ne table que sur 15 % à horizon 2022.

L’analyse des évolutions révèle cependant que les surfaces en bio augmentent rapidement, toutefois de manière moins significative dans les grandes cultures du fait de freins tels que :

  • la facilité de la rotation conventionnelle colza-blé-orge ;
  • la valorisation difficile d’une partie de la rotation bio, comme la luzerne ou les légumes secs ;
  • le développement faible des filières industrielles (pomme de terre, betterave sucrière) ;
  • la faiblesse des rendements, en particulier pour les céréales.

L’incitation par la meilleure profitabilité

L’augmentation des surfaces bio est liée aux convictions de nombreux agriculteurs, mais aussi à un effet d’aubaine en faveur de la conversion : les subventions en bio sont nettement plus élevées qu’en conventionnel ; c’est ainsi que le boom des conversions a été très significatif lors de la crise du lait.

©Académie d’Agriculture de France

Depuis, l’État a décidé de supprimer l’aide au maintien, toutefois les régions peuvent continuer à en distribuer, et il y a d’autres subventions, directes ou indirectes, qui incitent à la conversion au bio. Ainsi le plan Ambition bio 2022 affiche une planification de 20 % minimum de produits bio dans les cantines publiques, ce qui constituera une rente pour l’agriculture bio.

Mais aussi le prix de vente des produits bio assure une certaine résilience aux agriculteurs : une étude de l’Association des Familles Rurales (2019) montre que le panier bio de fruits et légumes coûte deux fois plus cher que son homologue en conventionnel.

Impacts respectifs sur la santé

En dépit de prix supérieurs, l’augmentation de la demande en produits bio est forte, essentiellement pour deux raisons : le bio est perçu meilleur pour la santé et pour l’environnement. Qu’en est-il vraiment ?

Comparaison des qualités nutritionnelles et des valeurs sanitaires

Une analyse comparative entre le bio et le conventionnel, sur la qualité nutritionnelle et sur la valeur sanitaire des deux gammes, montre que :

  • les aliments bio ne présentent en général pas d’avantages, ni pour la nutrition ni pour la santé ;
  • ils présentent une légère tendance à une prévalence plus forte de contamination microbienne, risque accru conduisant à des retraits de ventes relativement plus fréquents, en proportion, que les aliments conventionnels ou, dans de rares cas, provoquant des toxi-infections alimentaires.

De nouveaux risques dus aux difficultés de désherbage

Des nouveaux problèmes se sont révélés en raison de la difficulté du désherbage en bio, avec par exemple apparition de Datura ou d’ergot du seigle dans certaines céréales. La DGCCRF met d’ailleurs en garde contre certains produits bios, et en a fait enlever plusieurs du marché en 2019, en particulier pour présence de Datura.

Dans la même période, les rappels de produits alimentaires issus du conventionnel ont été rares et n’ont pas concerné des risques sanitaires, mais des questions d’information et d’étiquetage.

Le mythe des vertus anticancer du bio

Une étude d’octobre 2018, largement diffusée par la presse, affirmait que « manger bio protège contre le cancer ». Cependant, depuis, plusieurs études ont montré les faiblesses de ce travail, et ont conclu qu’il n’était pas établi que les aliments bio puissent prévenir le cancer.

Impacts respectifs sur l’environnement

La comparaison des impacts sur l’environnement est complexe : il faut considérer divers compartiments comme l’eau, l’air, les gaz à effet de serre, la fertilité du sol, la biodiversité, l’utilisation des sols.

Impacts sur l’eau

Cas du transfert des nitrates vers les nappes

Si l’on raisonne par unité de surface, différentes études montrent un avantage de l’agriculture biologique, avec un lessivage d’azote de l’ordre de 30 % inférieur à celui de l’agriculture conventionnelle. En revanche, si l’on raisonne en unité de produit, le lessivage d’azote en agriculture bio est identique ou supérieur à celui en agriculture conventionnelle, selon les études ; le surplus peut atteindre jusqu’à 50 % dans certains cas.

Présence de pesticides dans les eaux souterraines

On retrouve de nombreux résidus de pesticides dans les eaux souterraines métropolitaines, principalement des herbicides ; toutefois, il n’existe pas de véritable comparaison bio/conventionnel, d’autant qu’en général les pesticides utilisés en bio ne sont pas recherchés. Il est cependant intéressant de noter que de nombreux produits décelés ne sont plus utilisés, certains depuis quarante ans ; ceci indiquerait une meilleure gestion générale des produits phytosanitaires et une meilleure dégradabilité de ceux-ci.

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