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Prix du lait

Une collecte laitière « insensible aux signaux des marchés » cet hiver (Idele)


TNC le 22/03/2023 à 13:39

D'après l'Idele, la marge laitière Milc atteignait 170 €/1 000 l au mois de janvier (©JeanLuc, AdobStock)

En raison du recul du cheptel et de stocks fourragers au plus bas, la production laitière continue de se replier en France cet hiver, malgré des prix qui restent hauts par rapport à début 2022 et une marge laitière évaluée en hausse ces derniers mois, explique l’Idele. En Europe du nord, les prix sont en forte baisse après l’envolée de 2022, ce qui pourrait freiner le dynamisme de la collecte européenne observé depuis septembre dernier.

Après un repli de 0,7 % en 2022 par rapport à 2021, le recul de la collecte laitière française se poursuit en ce début 2023, détaillent les dernières Tendances de l’Idele. La baisse a atteint – 1,4 % en janvier par rapport à janvier 2022 et serait d’environ – 1 % en février.

Pourquoi ce recul ? D’abord, la baisse du cheptel laitier s’est intensifiée : – 2,4 % entre février 2022 et février 2023, soit – 84 100 têtes. « Cette décapitalisation semble surtout découler de cessations laitières toujours plus nombreuses, comme si la bonne conjoncture laitière n’avait plus aucun effet sur l’attractivité du secteur », commente Gérard You, responsable du service Économie des filières de l’Idele. D’autre part, les stocks de fourrages étaient réduits à l’entrée de l’hiver, « incitant les éleveurs à la prudence »

« Comme au cours du second semestre 2022, la production laitière française est demeurée insensible cet hiver aux signaux des marchés », note l’économiste. De fait, le prix du lait restait « bien orienté » en début d’année – 483 €/1 000 l en janvier pour le lait standard toutes qualité, soit 10 euros de plus qu’en décembre – et la hausse sur un an est « désormais bien supérieure à celle des intrants ».

La marge laitière a augmenté de 66 €/1 000 l en 2022

La marge laitière est jugée « plutôt stimulante » et « les exploitations laitières françaises ont dans leur ensemble amélioré leur revenu courant en 2022 » : sur un an, la Milc* a augmenté de 66 €/1 000 l, la hausse du produit lait (+ 98 € sur un an) et celle des autres produits (+ 15 €) compensant l’augmentation des charges (+ 47 €). Elle atteignait 170 €/1 000 l en janvier, contre une moyenne de 99 €/1 000 l sur la période 2007-2019.

La marge Milc a augmenté de 66 €/1 000 l en 2022. (©Idele)

Mais attention, une baisse des prix se profile dans les prochains mois, en lien avec la baisse des prix du beurre et de la poudre maigre et de la chute des prix en Allemagne. Difficile de dire quelle sera son ampleur, elle semble en tout cas « étroitement liée à l’évolution de la collecte dans l’UE », indiquent les Tendances.

À l’inverse de la France, la production laitière est depuis septembre « bien relancée dans les pays d’Europe du nord, où le prix du lait s’est littéralement envolé de + 40 à + 50 % d’une année sur l’autre à plus de 600 euros/1 000 l en début d’année », explique Gérard You. La production de lait dans l’UE progressait en janvier de 0,7 % par rapport à janvier 2022, portée notamment par une hausse de 3 % en Allemagne, de 4,7 % en Belgique et de 4,7 % aux Pays-Bas.

Vers une baisse de la collecte de l’UE après le pic laitier

Mais une baisse de la collecte devrait s’amorcer dans ces pays après le pic laitier du printemps en raison de prix en forte baisse – le collecteur FrieslandCampina a annoncé un prix sous les 500 €/t aux Pays-Bas en mars, en Belgique Milcobel l’aurait ramené à 431 €/t – et des charges encore élevées qui peuvent faire craindre un effet-ciseau. Cela pourrait pousser les éleveurs à « réduire la complémentation et baisser le cheptel », à la faveur de prix de la viande très incitatifs.

Début 2023, les prix du lait sont en forte baisse dans plusieurs pays laitiers d’Europe du nord. (©Idele)

La production de l’UE reste « très surveillée et pourrait modifier l’équilibre entre offre et demande » sur une année 2023 qui s’annonce très incertaine, notamment sur le second semestre. « L’évolution des marchés dépend de nombreux facteurs : climatiques, géopolitiques, économiques, devenus de plus en plus imprévisibles », liste ainsi Gérard You.

Pour l’heure, « la demande mondiale semble montrer des signaux de reprise, notamment en Asie du Sud-Est » et la Chine pourrait aussi revenir aux achats « surtout en matière grasse ». Côté production, les tendances observées fin 2022 chez les principaux exportateurs semblent perdurer. Elle reste dynamique aux États-Unis mais une baisse des prix est observée en janvier, elle s’est reprise en Nouvelle-Zélande et poursuit sa chute libre en Australie.

*La Marge Ipampa Lait de vache sur coût total indicé (Milc) mesure l’évolution de la différence entre le prix du panier de produits spécifique à la production laitière (prix du lait, veau, vaches de réforme) et le prix du panier de charges indicées dans l’Ipampa Lait de vache.