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Travail d'astreinte

Monotraite le dimanche, sur quelques mois ou toute l’année : quels changements ?


TNC le 22/04/2021 à 06:02
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La monotraite doit être considérée comme une solution comme les autres pour réduire l'astreinte en élevage laitier. Olivier Corbel, éleveur laitier du Morbihan a testé plusieurs modalités : suppression de la traite du dimanche, monotraite durant la période de pâturage, jusqu'à la monotraite toute l'année. Il livre son retour d'expérience.

Témoignage d’Olivier Corbel, producteur laitier (56) :

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« On a toujours été prudents sur les investissements et aujourd’hui que les annuités sont terminés, on envisage la monotraite toute l’année plus sereinement. » Olivier Corbel, éleveur laitier à Camors (Morbihan) présente son système de production.

Du pâturage mais des routes à traverser

« Je me suis installé il y a 25 ans et je me suis vite tourné vers un système herbager puis vers le passage en agriculture biologique. » Associé avec son épouse, Olivier dispose de 46 ha de SAU (dont 44 ha d’herbe et 2 ha d’orge de printemps). Ensemble ils élèvent 35 vaches laitières et leur suite, ce qui représente environ 1 UGB/ha de chargement.

La suppression de la traite le dimanche soir seulement perturbe davantage que la monotraite.

Les vaches sortent du 15 février au 15 décembre environ. Durant la période hivernale, elles sont nourries à l’ensilage d’herbe et au foin. « Notre seul problème concernant le pâturage, c’est qu’on emprunte les routes communales pour rejoindre les parcelles. On s’est alors dit que la monotraite conviendrait très bien pour limiter les déplacements. » La première expérience s’est faite en 2003 avec un mois de monotraite, principalement pour ne pas dépasser le quota à l’époque. Puis durant 12 ans, le couple a poursuivi la monotraite durant la saison de pâturage (l’étalant ainsi sur 1 à 8 mois selon les années).

« En même temps, nous avons testé la suppression de la traite du dimanche soir mais nous avons vite arrêté car on trouvait que ça perturbait davantage la production laitière qu’une monotraite totale. »

Monotraite : du lait en moins mais des taux en plus

Depuis mars 2019, Olivier et Béatrice pratiquent la monotraite toute l’année. « On a baissé en production mais on a un peu plus de matières utiles. Et chez Biolait, avec le gramme de matière grasse à 5 €, ça valorise mieux la différence. » Sans s’agrandir, forcément, les éleveurs produisent moins mais Olivier l’assure : « si on maitrise les charges, ça n’est pas un problème. » Sur l’exploitation, le coût alimentaire oscille par exemple entre 20 et 50 €/1 000 l. L’EBE hors main d’œuvre s’élève à 450 €/1 000 l.

Évolution des ventes de lait à la ferme de Coquerel (56) (©CA Bretagne)

Les éleveurs n’ont conservé que la traite du matin. « Cela nous permet de faire autre chose qu’on ne prenait pas forcément le temps de faire avant. On gagne en sérénité et régularité dans le travail. On prend aussi plus de temps sur la traite, en mettant l’accent sur l’hygiène. »

Les vêlages sont étalés sur l’année et les éleveurs sont restés sur deux buvées pour les veaux : « On garde le lait de la traite du matin dans un récipient isotherme pour le soir. Rien ne nous empêche de décaler d’ailleurs l’horaire de cette buvée puisqu’elle n’est pas liée à la traite. »

La chambre d’agriculture de Bretagne présente les résultats de différents essais réalisés sur la monotraite :

Suppression d’1 traite /semaine (ex : dimanche soir)Monotraite pdt 1 semaine sur l’annéeMonotraite pdt 3 ou 6 semaines en début de lactationMonotraite pdt 7 semaines en milieu de lactationMonotraite pdt 11 semaine en 2e partie de lactation
-3 à -7 % de lait
+0,5 g/kg TB
+0,3 g/kg TP
-25 % de lait
+4,9 g/kg TB
Pas de changement sur le TP
-20 % de matières utiles pendant puis -8 % ensuite (rémanence)-21 % de lait
+3 g/kg TB
+2,4 g/kg TP
+18 000 cellules
-19 % de lait puis -3 % durant un mois
+1,8 g/kg TP
+0,4 g/kg TB

Les conditions de réussite de la monotraite

« Lorsqu’on réfléchit à la monotraite, il faut bien définir son projet, alerte Guylaine Trou de la chambre d’agriculture. À quelle période de l’année et sur quelle durée on souhaite se dégager du temps, quelle augmentation peut-on envisager sur les effectifs sans investissement. Ensuite, il faut évaluer l’impact sur le chiffre d’affaires (baisse de production, rémunération des taux, estimation des livraisons, impact des effectifs sur le produit viande, etc.). »

Le principal point de vigilance concerne les cellules : « Il faut partir d’une situation cellulaire saine. On observe généralement une augmentation des comptages dans le mois qui suit le passage à la monotraite. Pour les vaches en début de lactation, il est possible de voir des pertes de lait dans les 6 heures précédant la traite. Le couchage idéal dans ce cas reste la pâture. Et si besoin d’utiliser un traitement antibiotique intramammaire, il faudra penser à choisir un traitement avec une durée d’action sur 24h. »

L’experte assure que la monotraite est techniquement possible dans tous les élevages. « La mise en œuvre est immédiate et ce choix est réversible, on peut revenir en arrière dès qu’on le souhaite. Les vaches s’adaptent très vite, parfois même plus vite que l’éleveur lui-même. »