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Veaux de boucherie

M. Renaud (56) : « En 10 ans, j’ai diminué de 50 % les traitements antibios »


TNC le 21/12/2018 à 06:03
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Éleveur de veaux de boucherie dans le Morbihan, Mickaël Renaud a toujours été attentif au suivi sanitaire de ses animaux. Ses efforts portent leurs fruits, les traitements par antibiotiques ont été divisés par 2 depuis son installation.

« Il y a 10 ans, quand je me suis installé avec mes parents sur leur élevage de veaux de boucherie, les animaux recevaient 3 traitements antibiotiques buvables et un en piqûre dans les 15 premiers jours. En général, il y en avait trois autres sur la suite de l’engraissement », se souvient Mickaël Renaud, éleveur à Saint Guyomard (56), d’abord avec ses parents et, depuis 2 ans, avec son frère. « Aujourd’hui, nous avons réduit à 3 traitements, des fois 2 seulement. » Avec son frère, l’éleveur conduit 4 poulaillers label et 600 places de veaux de boucherie, en cases collectives de 30 à 80 places. Il travaille avec le groupement Coopéva.

À leur arrivée, les veaux reçoivent de l’argile contre les diarrhées et du réhydratant. Puis, 3 ou 4 jours après, ils sont vus par le vétérinaire de l’élevage. « Quand il y a trop de jetage et de toux, on fait un premier traitement antibiotique », retrace l’éleveur. Selon les problèmes pulmonaires, les veaux recevront un ou deux traitements au cours du premier mois d’engraissement. « Après c’est beaucoup plus rare et c’est au cas par cas », analyse Mickaël Renaud.

« En production de veaux, c’est le premier mois qui est délicat. Les veaux arrivent avec des microbismes différents. Sur le reste de l’engraissement, les problèmes de santé sont plus sporadiques », complète Magdéléna Chanteperdrix, de l’Institut de l’élevage. Cela s’explique par l’origine des veaux mis en engraissement. « Quand on reçoit un lot de 100 veaux, ils viennent pratiquement de 100 élevages différents. Donc autant de microbismes qui vont entraîner quelques ennuis de santé le premier mois, confirme Mickaël Renaud. D’autant plus ici que les veaux sont nourris au DAL et donc se partagent les tétines ».

Se former pour progresser

Face à ce mélange de microbismes à gérer en début d’engraissement, l’éleveur sait que la santé sera un point clé de ses résultats technico-économiques. Pour améliorer ses pratiques, il suit régulièrement des formations. En mai dernier, avec d’autres éleveurs de son groupement, il a suivi celle de l’Idele autour de la réduction des antibiotiques.

« Même si avec 17-18 € par veau, je suis dans la moyenne du groupement, je voudrais baisser mes frais vétérinaires évidemment mais aussi parce que, en tant qu’éleveur, je préfère éviter que mes animaux tombent malades. Je préfère dépenser autant mais pour de la prophylaxie ou des produits non médicamenteux comme l’argile ». D’ailleurs sur le dernier lot entré, Mickaël Renaud vient de tester un 2e vaccin contre les problèmes pulmonaires.

Des pistes de progrès

Si les diarrhées sont maîtrisées avec l’argile et les réhydratants, restent les pathologies respiratoires. « Nous avons vu en formation l’importance de la ventilation. Mais c’est délicat de bien maîtriser l’ambiance, reconnait Mickaël Renaud. Il y a beaucoup de paramètres, le bâtiment, le climat… Même avec deux lots à suivre, ça ne marche pas de la même façon. » Pour combattre les problèmes pulmonaires, l’éleveur n’a rien contre les médecines alternatives. « Je suis prêt à dépenser autant qu’en frais vétérinaires pour des produits naturels si leur efficacité est assurée. »

Pour continuer à réduire le recours aux antibiotiques, une marge de progrès reste sur la santé du veau dès sa naissance, notamment par une bonne prise de colostrum. Pour y arriver, il faudra un travail en filière avec les naisseurs. « Si on pouvait me garantir le bon démarrage du veau et que ça permette de baisser les frais vétos après, je serai prêt à mieux le payer », reconnait Mickaël Renaud.

En 4 ans, – 40 % d’antibiotiques dans la filière

Pour répondre aux objectifs du plan Ecoantibio, la filière « veaux de boucherie » a écrit en 2015 une charte « de bonne maîtrise des traitements médicamenteux ». Rapidement, 70 % des éleveurs ont adhéré à cette démarche de progrès en faveur du bon usage des médicaments vétérinaires.

La première étape de ce plan a été de préciser les pratiques et de quantifier les antibiotiques utilisés au travers d’une enquête auprès de plus de 100 éleveurs, menée par l’Anses à la demande de l’interprofession. Pour suivre l’évolution des usages, l’interprofession a sollicité l’agence du médicament vétérinaire et l’Institut de l’élevage pour constituer un observatoire pérenne, s’appuyant sur 40 élevages, retraçant leurs pratiques durant l’engraissement de près de 15 000 veaux.

De ces enregistrements, il en a été calculé un indicateur d’exposition aux antibiotiques, l’Animal level exposure to antimicrobials. Cet Alea est passé de 5,74 en 2013 à 3,41 en 2016. « Soit une baisse de 40 % de la consommation d’antibiotiques, chiffre Magdéléna Chanteperdrix, de l’Idele. Et cela sans hausse de la mortalité ou dégradation des performances de croissance ». Ce résultat est similaire à ce que l’on observe dans toutes les filières (- 39 %). Cette réduction s’explique par une évolution des pratiques vers plus de suivi individuel, un renforcement des mesures de biosécurité. « Notre objectif n’est pas d’arriver à 0 antibiotique car quand un animal est malade, il faut le soigner. Nous voulons arriver à un usage raisonné et raisonnable à tous les stades de la filière », précise Marianne Orlianges, animatrice de la section veaux à Interbev. Pour conforter son suivi de l’évolution de la consommation, la filière souhaite étendre ce réseau à 120 élevages, sur toute la France.

Dans leur approche des traitements, les éleveurs sont passés de la prophylaxie, où tous les veaux étaient systématiquement traités, à de la métaphylaxie. « Il n’y a plus de systématique, précise Magdéléna Chanteperdrix. Quand un certain pourcentage d’animaux est malade, sous contrôle vétérinaire, alors seulement on traite le lot. »

Pour continuer cette réduction de l’utilisation des antibiotiques, la filière travaille à améliorer le suivi individuel avec la dématérialisation du carnet sanitaire, la maîtrise de la ventilation dans les bâtiments et la santé des veaux dès leur naissance.