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Pêche

L’UE au secours du cabillaud de la mer Baltique, les pêcheurs inquiets


AFP le 13/10/2019 à 11:05

Dans l'est de la mer Baltique, le cabillaud disparaît, victime de nombreux facteurs. La Commission européenne propose des mesures drastiques pour aider le stock à se reconstituer, mais les pêcheurs s'inquiètent en retour pour leur propre survie.

Les ministres de la Pêche de l’UE auront deux jours, lundi et mardi, pour se mettre d’accord sur les quotas de pêche de l’année 2020. Les différents acteurs ont les nerfs à fleur de peau, surtout depuis que la Commission a décidé cet été d’interdire jusqu’à la fin de l’année la pêche au cabillaud dans la majeure partie de la mer Baltique, face au risque d’effondrement des stocks.

Une décision radicale dénoncée par Europêche, principal syndicat européen de pêcheurs. Selon un avis largement partagé, la disparition du cabillaud n’est pas uniquement liée à un problème de surpêche. « Avec tous les facteurs combinés, même si vous stoppez la pêche tout de suite, le stock baissera probablement l’année prochaine », reconnaît Andrezj Bialas, de l’ONG Oceana. « C’est d’autant plus une raison pour arrêter la pêche, car le stock est en tellement mauvais état qu’il ne faut pas en rajouter », selon lui.

Les pêcheurs, eux, ont vu rouge. Avec en mains l’avis scientifique du Ciem, le Conseil international pour l’exploration de la mer, dont l’avis guide chaque année les recommandations de la Commission pour les quotas de pêche (TAC), ensuite négociés entre pays. Selon le Ciem, la fermeture de toutes les zones de pêche pour cabillaud oriental au deuxième semestre 2019 « ne devrait entraîner qu’une augmentation de 4 % de la biomasse du stock reproducteur en 2020 » par rapport à une absence de restrictions supplémentaires. « L’effet limité est dû au fait que la mortalité due à la pêche est beaucoup plus faible que la mortalité naturelle et que plus de la moitié des prises sont normalement effectuées au cours du premier semestre de l’année », expliquent les scientifiques.

La situation déplorable du cabillaud oriental est « en grande partie due aux changements biologiques survenus au cours des dernières décennies », explique le Ciem. Sa croissance, son poids, sa taille à maturité « ont considérablement diminué ». Ce poisson est victime de prédation, mais aussi de la difficulté à se nourrir, ses propres proies ayant migré plus au nord avec le changement climatique. Le problème de salinité de la mer Baltique joue aussi.

Alléger la pression

Fin août, lorsque la Commission a publié ses proposition de quotas de pêche, l’Association des pêcheurs de la Baltique a dénoncé une « gestion brutale » des pêcheries de cabillaud, qui « va causer de sérieux dommages » aux communautés de pêcheurs. « La protection des stocks est un élément clé d’une exploitation soutenable, mais tout comme l’est la protection des pêcheurs », a objecté l’association.

Du côté des associations de protection des océans, on dénonce « la surpêche » en mer Baltique depuis plusieurs années. « Ces cinq dernières années, les TAC votés ont toujours été beaucoup plus élevés que l’avis scientifique. En fait ils n’ont jamais suivi ni l’avis scientifique, ni la Politique commune de pêche » (PCP), déplore Andrezj Bialas.

Oceana estime qu’il faudrait interdire la pêche au cabillaud dans l’est de la mer Baltique en 2020, pour rendre « négligeable » la pression sur le stock halieutique. La Commission a proposé de n’autoriser que des prises accidentelles (pour éviter que les pêcheurs se trouvent dans l’impossibilité de travailler) pour le cabillaud oriental, contre un quota de 24 112 tonnes en 2019. Elle souhaiterait également étendre la période de fermeture pour favoriser la reproduction et interdire la pêche récréative.

Pour le cabillaud occidental, elle préconise un quota d’un peu plus de 3 000 tonnes, en baisse de 68 % par rapport à 2019 (année où le quota avait bondi de 70 %).

L’exécutif européen veut également prendre des précautions pour le hareng occidental, et propose de réduire les TAC de 70 % (- 27 % pour le hareng de Botnie et – 10 % pour le hareng central). La présidence finlandaise devrait plaider « activement » pour « coller aux recommandations », prédit une source européenne. D’autant que 2020 est la date limite, définie dans la PCP, pour amener l’ensemble des stocks au « rendement maximum durable » (RMD), un système de gestion qui vise à assurer une exploitation durable des ressources aquatiques.