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Eurodairy

La résilience : un équilibre à trouver sur chaque exploitation


TNC le 27/12/2018 à 06:03
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Dans le cadre du projet Eurodairy, un groupe d'éleveurs et de représentants de la filière s'est penché sur la résilience des exploitations laitières. Pour eux, il s'agit de trouver un équilibre entre la stratégie de l'exploitant, le volet humain, la technique, l'économie et l'environnement. Pour les accompagner dans cette voie, ils ont développé un outil de sensibilisation à la résilience qui permet à chaque éleveur de prendre du recul sur son exploitation.

Le projet européen Eurodairy touche à sa fin. La chambre d’agriculture des Hauts-de-France, engagée dans la démarche, présentait récemment les résultats de son travail sur la résilience des exploitations laitières.

Elisabeth Castellan, coordinatrice du projet, présente : « Le groupe de travail, constitué d’éleveurs et de représentants de la filière, a défini la résilience comme étant la capacité d’adaptation pour assurer la pérennité de l’exploitation via des facteurs sociaux, économiques et environnementaux. Pour ce qui est de la technique, les éleveurs considèrent qu’elle est déjà acquise. En revanche, le volet social est de plus en plus pris en considération. »

La résilience s’acquiert et doit s’améliorer dans le temps

Autour d’une table ronde, des éleveurs et acteurs de la filière ayant participé au projet sont unanimes sur ce qu’est la résilience : « C’est la capacité à pérenniser une exploitation, à amortir les chocs (ou crises) et à résister dans le temps. » Pour eux, il faut savoir se remettre en cause et ne pas se reposer sur ses acquis : « l’état de résilience n’est jamais acquis, il faut toujours l’améliorer. »

Jean-Marc Burette, éleveur laitier à Fleurbaix (Pas-de-Calais) témoigne : « Lorsque le prix du lait a fortement diminué, j’ai cherché des solutions pour faire des économies et me suis aperçu que mon coût alimentaire était bien trop élevé (115 €/1 000 litres). Après avoir travaillé sur l’efficacité de l’azote et l’utilisation de mes effluents d’élevage j’ai fortement réduit mes charges en nourrissant mieux mon sol et donc mes animaux. Je suis aujourd’hui à 84 €/1 000 litres de coût alimentaire. Il faut savoir se remettre en cause. Pour moi, la résilience c’est être encore là demain et pérenniser l’exploitation dans le temps. »

Rendre la production attractive pour la faire perdurer.

Jacques Quaeybeur, éleveur et directeur de la coopérative laitière du Nord, de l’Aisne et des Ardennes Laitnaa, explique : « La problématique du prix du lait revient régulièrement. Or, on constate d’énormes efforts en matière de qualité du lait et j’estime que c’est un critère important pour être encore plus résilient demain. Les laiteries se doivent de lisser le prix du lait sur du plus long terme et les éleveurs doivent eux s’engager dans une production régulière : c’est un engagement réciproque entre la laiterie et ses producteurs qui doit se mettre en place. »

L’éleveur et directeur ajoute : « 48 % de nos coopérateurs ont actuellement plus de 50 ans. On se doit de rendre notre production attractive pour attirer des jeunes. Pour cela, elle doit être acceptable. » Jean-Marc Burette ne peut qu’approuver : « Trois de mes enfants sont dans l’agriculture et deux voudraient revenir sur l’exploitation. Il y a du potentiel mais les codes entre générations changent : il faut s’adapter. » Frédéric Grattepanche, directeur adjoint de l’EPL 62 (enseignement public agricole), affirme aussi : « Il faut conserver et renforcer la connexion entre l’enseignement et les professionnels. Nous devons préparer les jeunes à affronter le milieu professionnel en les confrontant à une diversité de systèmes. »

Anticiper et savoir se remettre en cause.C’est d’un œil extérieur qu’Eric Legras, producteur de légumes et président de l’OP L Vert, ajoute : « Il faut diversifier les systèmes pour affronter différents marchés. Cela limite les à-coups et améliore la régularité. Il faut anticiper et savoir se remettre en cause quand ça va bien car quand plus rien ne va, il est déjà trop tard. »

« Où se situe mon exploitation ? » Faire le bilan

Pour accompagner les éleveurs à améliorer cette résilience, le groupe opérationnel a développé plusieurs démarches et outils, dont notamment l’outil «  2mains ». Il comporte cinq volets : la stratégie de l’exploitation, l’humain, la technique, l’économie et l’environnement. C’est le conseiller qui remplit les critères avec l’éleveur. Les données technico-économiques sont comparées aux cas-types de référence issus d’Inosys réseau d’élevage.

L’outil attribue alors un scoring pour chacun des cinq volets de la résilience. Simon Traullé, conseiller à la chambre d’agriculture de la Somme explique : « Ce n’est pas un diagnostic, l’éleveur ne se voit pas attribuer une note et ne peut se comparer à d’autres éleveurs car les systèmes sont tous différents. En revanche, ça le sensibilise quant aux critères sur lesquels il peut s’améliorer. L’objectif n’est pas d’apporter une solution toute prête mais bien d’alerter l’éleveur. » Développé par la chambre des Hauts-de-France pour les élevages laitiers, l’outil « 2mains » devrait prochainement voir le jour dans d’autres instances de l’hexagone et même être adapté aux bovins allaitants.

D’autres démarches d’accompagnement ont été développées, comme l’ outil de résilience sociale par la chambre d’agriculture de Normandie. Il permet de réaliser un bilan de la situation vis-à-vis du travail, en analysant la répartition du temps de travail, les priorités et les motivations de l’éleveur. La chambre des Hauts-de-France propose également des rencontres de la résilience (après-midi d’échange entre éleveurs), des formations avec mise en place d’un plan d’actions propre à chaque exploitation, et des scénarios pédagogiques pour sensibiliser les étudiants. Enfin, la boite à leviers est une médiathèque accessible à tous qui regroupe des témoignages sur des pratiques visant à être plus résilient sur son exploitation.