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Manifestations

Des brebis à Paris pour dénoncer « la cohabitation impossible » avec le loup


AFP le 19/12/2018 à 09:25

Accompagnés de leurs animaux, des éleveurs de brebis ont manifesté mardi place de la République à Paris pour demander au gouvernement des solutions afin de protéger leurs troupeaux régulièrement attaqués par les loups, jugeant la cohabitation « impossible » avec ce prédateur.

Une vingtaine de brebis ont foulé le bitume parisien et mangé du foin au pied de la statue de la place de la République, à la vue des passants intrigués. Au-dessus des ovidés, une banderole planait : « Prédation, stop au mépris, sauvons les paysans ». Les éleveurs venus du Var, d’Aveyron ou encore des Vosges, avaient fait le trajet dans la nuit pour dire « leur ras-le-bol et l’état de stress » dans lequel ils vivent, a expliqué à l’AFP Francis Girard, éleveur depuis 32 ans. Cet été, pendant la transhumance, la période pendant laquelle les brebis sont emmenées en montagne, ce propriétaire d’un cheptel de 400 bêtes a perdu la trace de 10 brebis et 10 agneaux. « Quand on retrouve une bête morte, on est indemnisés. Mais quand on ne retrouve pas son cadavre, on ne touche rien », a-t-il raconté, ajoutant ne plus vouloir « se lever le matin et découvrir une scène de carnage ».

Les éleveurs bénéficient d’aides à la protection des troupeaux (chiens, parcs électriques…) et d’indemnisations, qu’ils jugent néanmoins insuffisantes. « L’État prend en charge 80 % du montant des mesures de protection donc il en reste 20 à la charge de l’éleveur soit 4,68 millions en 2015 », a expliqué Thierry Jacquot du syndicat agricole Confédération paysanne. L’organisation demande une indemnisation « à 100 % » des mesures de protection. Les dispositifs en place n’empêchent pas un grand nombre de pertes dans les cheptels. Un total de 11 314 brebis victimes des loups ont été indemnisées en 2017, selon les chiffres des Directions départementales des territoires.

« Abattre les loups quand c’est nécessaire »

Mais les éleveurs estiment qu’une brebis attaquée sur deux n’est pas retrouvée. Ils demandent donc « une indemnisation qui tienne compte de ces disparitions, mais aussi du stress subi par le troupeau ». Martine Fiolet, elle, va bien plus loin et demande « la suppression du loup à proximité des brebis ». Pour cette éleveuse qui vient de transmettre à ses enfants son exploitation après plus de 30 ans de labeur, « le loup doit retrouver son statut de strictement nuisible ». Pour elle, « ce n’est pas le loup qui est menacé mais bien l’élevage ». « Il faut que les gens réapprennent le sens de notre métier, son utilité », estime Francis Girard. Sa collègue Martine Fiolet abonde : « d’un côté le consommateur veut que les brebis soient élevées en plein air et de l’autre il veut qu’on réintroduise le loup ».

Les éleveurs présents place de la République ont le sentiment que la population est déconnectée de la réalité de leur métier. La France s’est dotée en février d’un plan loup, qui prévoyait un plafond d’abattage de 43 individus pour 2018, plafond relevé en octobre à 51 animaux, sur une population de loups estimée à 500 en France. « Le quota est déjà atteint cette année », a rappelé Thierry Jacquot à l’AFP. « Il faut que les éleveurs puissent abattre les loups quand c’est nécessaire », a-t-il expliqué, en ajoutant ne pas vouloir « tuer le loup à tout va ». Espèce protégée, le loup, disparu en France dans les années 1930, est revenu par l’Italie à partir de 1992. L’association Ferus, en charge de la protection et de la conservation des grands prédateurs, a porté plainte le 11 décembre auprès de la Commission européenne contre l’État français, estimant qu’il ne respecte pas ses obligations en matière de protection du loup.