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Dossier : Réforme de la PAC

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Coronavirus

La pandémie ravive le débat sur l'autonomie alimentaire de la France


AFP le 21/04/2020 à 11:Apr
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Pour la députée européenne Irène Tolleret, qui siège à la "Comagri", la réforme de la Pac sera pas applicable avant 2023 (©Pixabay)

La France à l'abri de la pénurie, jusqu'à quand ? La crise liée au coronavirus pointe les vulnérabilités des flux d'approvisionnement en produits agricoles et remet au goût du jour le thème de la souveraineté alimentaire.

« Il nous faudra rebâtir une indépendance agricole, sanitaire, industrielle et technologique française », a plaidé Emmanuel Macron dans son allocution du 13 avril.

Lire aussi : Après la crise, Emmanuel Macron veut « rebâtir une indépendance agricole »

Un mois plus tôt, le président avait déjà prévenu : « Ce que révèle cette pandémie, c’est qu’il est des biens et des services qui doivent être placés en dehors des lois du marché. Déléguer notre alimentation, notre protection, notre capacité à soigner notre cadre de vie au fond à d’autres est une folie. » L’exécutif répète que la France est préservée de la pénurie grâce à la richesse de sa production agricole et agroalimentaire, en « deuxième ligne » dans la « guerre » contre le coronavirus.

Mais la crise illustre qu’on peut être un des tout premiers exportateurs de blé au monde et peiner à trouver de la farine en supermarché, plus d’un mois après le début du confinement et la ruée sur les produits durables.

Lire aussi : Vers un record absolu d’exports de blé français vers les pays tiers

L’explication ? Ces deux marchés sont en partie déconnectés : plus de la moitié des sachets de farine destinés au grand public sont importés, notamment d’Allemagne ou d’Italie, qui font face aussi à une explosion de cette demande.

« La France a recours massivement à l’importation de produits agricoles et alimentaires dont une partie importante pourrait être produite sur son territoire », regrettait l’agriculteur et sénateur (LR) de Haute-Loire Laurent Duplomb, dans un rapport d’information publié l’an dernier.

Poulet, fruits et légumes massivement importés

Près de la moitié du poulet, des fruits et des légumes consommés en France sont importés. À ce rythme – et compte tenu de la baisse continue du nombre d’agriculteurs et de la stagnation des volumes – « dans dix ans, on n’aura plus l’autosuffisance nécessaire pour faire face à ce type de crise », dit aujourd’hui le sénateur à l’AFP.

Le mal est déjà fait pour Bernard Lannes, président de la Coordination rurale. Il dénonce un modèle consistant à « exporter des céréales à bas prix dans le monde entier » et se dire pour le reste qu’« on trouvera toujours de tout dans les marchés mondiaux ».

« Il y a eu une volonté des grandes filières céréales, lait et viande d’accéder aux marchés mondialisés. On en oublie quelque part la réponse au marché intérieur », estime aussi Nicolas Girod, porte-parole de la Confédération paysanne.

En Ile-de-France, note l’Agence de l’environnement Ademe, 90 % des produits alimentaires consommés sont importés, bien que 49 % des territoires soient voués à l’agriculture.

Pour Nicolas Girod, « en gestion de crise sanitaire, on touche à une certaine limite de ce système ».

La FNSEA exclut de jeter aux orties le modèle actuel. En pleine crise, « l’agriculture française démontre qu’elle est en capacité de tenir la chaîne alimentaire et satisfaire les besoins des Français », se félicite sa présidente Christiane Lambert. Il faut certes, ajoute-t-elle, « relocaliser les filières fruits et légumes tuées par la tyrannie des prix bas », mais ne « pas renoncer à exporter des semences, des animaux reproducteurs, du fromage, du vin ».

« Tout ce qui peut être produit près de chez nous doit l’être », convient Sébastien Abis, directeur du club de réflexion agricole Demeter et chercheur à l’institut de relations internationales et stratégiques Iris.

Il plaide toutefois pour une « souveraineté alimentaire solidaire », à rebours du « repli territorial » : « Les pays du bassin méditerranéen, les pays africains ont besoin de trouver des semences, des céréales, du lait sur les marchés internationaux ».

Les représentants de la profession s’accordent sur une chose : pas de souveraineté alimentaire sans revenu décent pour ses principaux artisans. Sachant qu’un tiers des agriculteurs a plus de 55 ans et qu’il faudra très vite renouveler les effectifs de la « deuxième ligne ».

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