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Viticulture

Une sommelière française Personnalité de l’année pour la Revue du vin de France


AFP le 10/01/2019 à 17:40

Pascaline Lepeltier, sommelière multi-titrée vivant à New York, passionnée par les vins biologiques et la nature, a été désignée jeudi comme « personnalité de l'année » 2019 par la Revue du vin de France (RVF).

« C’est fantastique et irréel d’être ainsi reconnue par la prestigieuse revue, moi qui ne suis qu’une passeuse », a réagi Pascaline Lepeltier auprès de l’AFP. « J’ai accepté le prix de la RVF car je me vois comme un symbole de la nécessité de réfléchir à ce qu’on boit, à ce qu’on mange, à ce qu’il faut faire pour arrêter de massacrer les sols, et essayer d’être moteur pour transformer toute l’agriculture », a-t-elle ajouté. La jeune femme, diplômée de philosophie venue à la sommellerie par le bas et la formation professionnelle, a espéré que sa récompense « permette de montrer aux jeunes qu’on peut avoir un métier passionnant dans le vin, qui permet de vivre ses rêves ».

Âgée de 38 ans, Pascaline Lepeltier a accompli un doublé historique fin 2018, première femme lauréate de la classe de sommellerie du concours des meilleurs ouvriers de France (Mof), elle a aussi décroché le titre de meilleure sommelier(e) de France. Née et élevée à Angers, berceau des vins de Loire, elle exerce son art à New York, dans le restaurant gastronomique Racines, situé dans le quartier de Tribeca, où elle gère une cave de 2 500 références « dont 80 % sont cultivés en biodynamie ». Aux États-Unis, elle a obtenu le diplôme de master Sommelier en 2014. « Dans une filière agricole qui a le vent en poupe et qui a un impact sur la santé, on doit s’obliger à être extrêmement attentif à la sélection de ce que nous proposons à la dégustation », explique la jeune femme, très sensible au « problème de malbouffe, et de malboire ». En dénonçant les vins comportant « beaucoup d’additifs », elle dit prendre « très à cœur » de présenter à ses clients « des vins de grande qualité élaborés avec des techniques naturelles », car « le corps les absorbe mieux ». Le vin est le seul produit agroalimentaire « qui n’a pas d’obligation en terme législatif pour indiquer ses ingrédients » note-t-elle.

« Un moment qui se dilate »

« Je suis d’une génération qui souhaite redonner du goût, issu d’une agriculture vivante », dit Pascaline Lepeltier, « ravie » du « mouvement » engagé par de prestigieux domaines viticoles vers le bio et la biodynamie. « Aux États-Unis, les jeunes boivent de moins en moins de bière et de cocktail, et de plus en plus de vin, ils sont très demandeurs de vins les plus naturels possible », donc peu stabilisés avec additifs et conservateurs chimiques, explique la jeune femme, qui dit avoir « choisi de faire carrière dans le vin » lors de la dégustation d’un Château d’Yquem. « En 2005, un verre de ce vin, élaboré pendant la guerre (…) m’a fait comprendre à lui seul ce que Bergson appelait la « durée », le « moment qui se dilate », explique cette diplômée de philosophie. « Il n’y a pas photo, pour que ça marche il faut que le raisin soit de qualité exceptionnelle et restitue l’histoire de la terre et du soleil, évidemment il y a des échecs terribles, comme quand on fait un yaourt à la maison et qu’il tourne, mais quand c’est grand, c’est grandissime ».

Une grande partie du palmarès annuel de la RVF célèbre le retour au naturel de la viticulture, régulièrement accusée d’utiliser trop de pesticides. Parmi les lauréats, le vigneron de l’année est le Bourguignon Vincent Dureuil-Janthial (Rully) qui revient progressivement au bio. Le prix de l’innovation revient à Michel Drappier pour son champagne « zéro carbone ». Un jeune Savoyard installé en bio, Matthieu Goury, de retour en France après avoir vinifié en Australie pour Michel Chapoutier et Jasper Hill, reçoit le prix de la Découverte.

Créée en 1927, la RVF récompense chaque année depuis dix ans des personnes qui œuvrent « à sublimer et à faire rayonner le vin en France ». En 2018, la RVF avait primé le cinéaste Cédric Klapisch, qui a passé une année entière dans un vignoble pour « Ce qui nous lie » (2017). En 2017, Alain Juppé, maire de Bordeaux, avait été récompensé.