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Semences de ferme et mélanges variétaux

Les trieurs à façon défendent leurs atouts pour la transition agricole


TNC le 20/06/2019 à 19:32
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Les semences de ferme représentent 50 % des semences utilisées par les agriculteurs. 60 % des semences de ferme sont triées par des trieurs à façon. (©Pixabay)

« Arrivé à maturité » après son émergence dans les années 80, le marché du triage à façon des semences de ferme pour les agriculteurs cherche à valoriser ses atouts. Pour le Staff, le syndicat des trieurs à façon à la ferme, le triage à la ferme des semences permet aux agriculteurs à la fois des économies, une plus grande réactivité et une plus grande adéquation avec les contraintes de l’exploitation.

Vous êtes plutôt semences certifiées ou semences de ferme ? Selon le Staff, le syndicat des trieurs à façon de semences de ferme, l’activité de ses 42 entreprises membres augmente régulièrement de 10 à 15 % par an. Un développement constant qui, selon Sylvain Ducroquet, le président du Staff, se justifie par « les avantages qu’offre le triage à façon » pour les agriculteurs.

« Globalement, nous utilisons deux fois moins d’insecticide que les stations de semences. Alors que les stations proposent des semences en gérant un risque collectif. Les trieurs à façon peuvent s’adapter à chaque besoin individuel des agriculteurs », explique-t-il.

Les trieurs à façon arguent aussi la question du coût pour l’agriculteur. Une semence certifiée de blé, ça coûte entre 60 et 70 € par quintal, ou autour de 50 € par quintal avec un simple traitement fongicide. Avec le recours à un trieur, une semence de ferme revient à 32 € par quintal, dont environ 15 € de graines reprises par l’agriculteur dans son stock, 5 € de CRIV – Cotisation recherche et innovation variétale, le nouveau nom de la CVO – et 12 € de prestation – travail du grain, traitement, ensachage », détaille-t-il.

« Accompagnateur de la transition agricole »

Outre un coût plus réduit et une « meilleure réponse aux besoins de chaque agriculteur », les trieurs à façon estiment pouvoir offrir un « service à la carte » en phase avec la transition agricole et les changements de pratiques agricoles. « Depuis deux ans, nos unités mobiles de triage disposent de toutes les technologies qu’on retrouve dans une station de semences classique. Nous pouvons procéder des traitements alternatifs avec des biostimulants. Nos stations mobiles permettent aussi un meilleur contrôle des adventices. »

Par ailleurs, les stations mobiles de triage permettent aussi « un tri optique pour le nettoyage de production particulières, et d’un tri alvéolaire pour la séparation des cultures en mélange d’espèces » rappelle Sylvain Ducroquet.

Les trieurs ont aussi adapté leur offre avec l’essor de la production biologique. « À titre d’exemple, un trieur adhérent de Normandie triait environ 3 000 t chaque année. Depuis qu’il a mis en service un trieur bio, il fait désormais 4 000 t », illustre-t-il.

Autre tendance à laquelle « les trieurs contribuent » : le développement des surfaces en mélange variétal. En 2010, il n’y avait que 50 000 ha cultivés en mélange variétal. « On est passé de 250 000 ha en 2017 à 400 000 ha en 2018. Et les 500 000 ha vont être atteints très vite. »

À lire :  Le Staff lance une application web d’information sur le mélange variétal

« Nous avons questionné nos agriculteurs clients sur l’intérêt de développer les mélanges variétaux. Pour eux, le premier intérêt est de sécuriser le rendement. En 2016, certains céréaliers ont pris une claque avec les faibles rendements obtenues sur leurs parcelles monovariétales. Ceux qui avaient privilégié les mélanges ont vu leurs rendements moins impactés. »

Autre exemple, celui de Gilles Van Kempen. L’agriculteur youtubeur organisait sur sa ferme une journée découverte avec les professionnels de la semence de ferme. « Un agriculteur doit répartir les risques agroclimatiques pour ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier. Précédemment, nous cultivions en “pur” plusieurs variétés dans des champs différents. Depuis huit ans, je pratique la culture en mélanges variétaux et je sème le même mélange de semences sur tous mes champs de blé », expliquait-il.

« J’ai composé mon mélange de base à partir de huit variétés de semences certifiées que j’ai choisies en concertation avec ma coopérative, en fonction des caractéristiques agronomiques (rendement, précocité), de leurs valeurs techniques (taux de protéine, force boulangère et taux de chute d’Hagberg) et aussi de leurs aptitudes à résister aux maladies et aux intempéries (sécheresse et précipitations). J’ai aussi ajouté des blés barbus pour protéger les récoltes des sangliers qui les détestent », détaillait Gilles van Kempen.

Adaptabilité aux terroirs

« Chaque année, je peux introduire des nouvelles variétés dans mon mélange de semence, pour faire évoluer les caractéristiques de ma récolte. Je fais ces adaptations en accord avec les spécialistes de ma coopérative qui commercialisent ma récolte. Ils m’indiquent les orientations qu’ils souhaitent en fonction de la demande de leurs clients et des attentes du marché. Nous travaillons en bonne entente. »

Après huit ans, Gilles van Kempen tire un bilan très positif de son changement de pratique. « La culture en mélange est particulièrement bien adaptée à mes terres limono-argileuses, très séchantes, dont le potentiel est limité (6 t/ha). La production est plus régulière, je gère mieux les attaques de maladies »

Avec un secteur et un marché « en maturité » depuis son émergence dans les années 80, le Staff souhaite désormais avancer sur le plan de la gouvernance de la profession. « Il ne manque plus qu’une étape : faire partie de l’interprofession », explique Sylvain Ducroquet. Les discussions sont en cours.

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