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Pêche au filet contre pêche à la canne

Le saumon de l’Adour au coeur d’un procès


AFP le 14/11/2019 à 19:52

Les uns pêchent au filet dans l'estuaire de l'Adour, les autres à la canne dans les gaves pyrénéens en amont : le tribunal correctionnel de Bayonne a examiné jeudi un conflit de plusieurs années entre pêcheurs professionnels et amateurs, avec le saumon au milieu.

Les pêcheurs amateurs reprochent aux professionnels de pêcher dans une zone portuaire, interdite aux termes du Code rural et de la pêche, et de porter atteinte aux ressources de poissons migrateurs, notamment le saumon (pêché de mars à juillet). Deux associations de protection des milieux aquatiques et trois fédérations de pêche ont déposé plainte pour « pêche maritime dans une zone interdite » contre six pêcheurs professionnels, « pour que cette pêche soit sanctionnée et que cesse cette situation », a argumenté une avocate des parties civiles, Me Stéphanie Moutet-Fortis. Les amateurs reprochent précisément aux professionnels d’opérer dans une zone avancée de l’embouchure, au niveau du port industriel de Bayonne, qui fait office « d’entonnoir » pour les poissons, et où une quinzaine de marins-pêcheurs détenteurs de licence déploient leurs filets. « Un obstacle infranchissable qui empêche la moitié des poissons migrateurs de remonter aux frayères », a assuré Me Moutet-Fortis, alors que professionnels et amateurs se renvoient chiffres et études sur la vitalité du saumon, et les quantités prélevées.

La pratique perdure néanmoins depuis des années, en lien avec une forme de tolérance entre autorités et pêcheurs professionnels. Le tribunal administratif de Pau, saisi par ailleurs, avait tranché en juin, en exigeant des préfets des Landes et des Pyrénées-Atlantiques qu’ils fassent appliquer, sous six mois, une disposition du code des Transports interdisant la pêche dans les ports de commerce. Mais il n’a pas été question de remettre en cause la pêche professionnelle au filet dans l’estuaire de l’Adour, juste dans sa zone portuaire. Le tribunal correctionnel, lui, examinait spécifiquement jeudi la plainte visant six marins-pêcheurs. Leur avocat, Me Davy Labarthette, a réfuté « la question de l’existence ou pas d’un préjudice fait à la biodiversité. Quand on nous explique la disparition progressive du saumon de l’Atlantique, on n’entend pas parler de pollution des eaux, de réchauffement climatique, non. Le problème, ce sont les pêcheurs de l’Adour…! », a-t-il ironisé. « Les marins-pêcheurs servent de paravent à un problème bien plus grave, mais on leur impute parce qu’ils sont là et que c’est plus pratique ». En outre, selon lui, le tribunal administratif avait sanctionné « une erreur de droit et d’appréciation » des préfets, qu’on ne peut reprocher à ses clients. Le tribunal a mis sa décision en délibéré au 16 janvier.