Accéder au contenu principal
Double activité

La SCEA Poullain (78) délègue la gestion de son exploitation à Agridomaine


TNC le 08/08/2022 à 09:05
fiches_Christophe_Martin_et_Thierry_De_Beauville

À gauche : Christophe Martin, gestionnaire d'exploitations pour Agridomaine, et Thierry De Beauvillé, associé de la SCEA Poullain et directeur général des jardineries. (©TNC)

Parce qu’elle doit aussi gérer son activité historique de pépinière et de jardinerie, la famille Poullain, installée dans les Yvelines, a fait le choix, en 2008, de déléguer totalement la gestion de son exploitation agricole à Agridomaine. Outre la conduite des cultures, cette entreprise spécialisée en gestion déléguée s’adapte aux différents souhaits d'évolution de l'exploitation.

Déléguer totalement la gestion des grandes cultures pour mieux développer une activité de diversification : voilà le choix peu commun qu’a fait la famille Poullain. Associé de la SCEA Poullain depuis une dizaine d’années, Thierry de Beauvillé revient sur l’historique de la ferme et les raisons de cette gestion déléguée. « Mon grand-père, Bernard Poullain, s’est installé en 1936 sur la ferme familiale à La Queue-lez-Yvelines (78). Et en 1946, il décide de diversifier son activité en cultivant des plantes et des fleurs d’ornement » Au fil des années, la pépinière se développe, si bien que le groupe Poullain compte aujourd’hui 7 jardineries implantées en Ile-de-France et en Normandie.

Afin de se dégager du temps pour ses différentes activités, Bernard Poullain fait appel à un chef de culture pour gérer son exploitation. Une organisation qui perdure au fil des générations. Mais en 2008, au départ à la retraite du chef de culture, la famille Poullain réfléchit à externaliser cette activité. Une réflexion est alors menée au sein des Ceta d’Ile-de-France (basé à Bazainville dans les Yvelines) et de l’Evreucin (à Guichainville dans l’Eure) dont ils sont adhérents et c’est ainsi que démarre l’activité d’Agridomaine. Rattachée au départ aux Ceta, l’entreprise est devenue indépendante en 2018 et compte pour actionnaires les deux Ceta à 50 % chacun.

De l’assolement à la récolte 

Elle continue toutefois à s’appuyer sur leur expertise technique et s’engage à « sécuriser les récoltes en quantité et en qualité tout en minimisant l’apport d’intrants ». La SCEA Poullain est ainsi la 1ère exploitation suivie par Agridomaine. Ce sont « nos yeux et nos oreilles » sur la ferme, explique Thierry de Beauvillé. 

En l’occurrence, il s’agit de ceux de Christophe Martin, l’un des trois gestionnaires d’exploitation de l’entreprise. Il supervise l’organisation de l’assolement jusqu’à la récolte, et s’arrête juste avant la commercialisation. Parmi les missions de la campagne : les tours de plaines, avec des comptes-rendus d’observations : « 34 en moyenne par campagne et par exploitation », précise Christophe Martin. En fonction, il prévoit et dirige aussi les différentes interventions, à réaliser par l’ETA. « On est le garant que tout se fasse correctement (délai, conditions de réalisation ou d’application, dosage, etc.). »

Semences, phytosanitaires, engrais… : le gestionnaire Agridomaine s’occupe également de toutes ces commandes et met en avant « une économie de 20 % sur les intrants », grâce aux appels d’offres réalisés auprès de 7-8 fournisseurs à chaque fois. « Le prix est un élément de choix primordial bien sûr, mais ce n’est pas le seul, souligne Christophe Martin. Il faut, par exemple, prendre en compte les délais d’approvisionnement aussi ».

À côté, il suit toute la traçabilité réglementaire de l’exploitation via Geofolia : « tenue du carnet de plaine et validation, plan prévisionnel de fumure, dossier Pac, assistance aux contrôles, accompagnement des expertises climatiques ou déclaration des dégâts de gibier… ». Avec les prestataires ou avec les exploitants agricoles, la communication reste la clé de l’organisation, précise Christophe Martin. « On peut proposer les plans d’assolements, les itinéraires ou d’autres solutions techniques, mais tout est toujours décidé en concertation avec les choix de l’exploitant agricole. « On fait aussi 3 à 4 tours de plaine ensemble dans l’année pour faire le point sur ces différents sujets », ajoute Thierry de Beauvillé. 

Diversification et semis direct sous couvert

Ça peut être l’occasion de parler diversification des cultures. Thierry de Beauvillé souhaite, par exemple, davantage s’orienter vers des cultures valorisables en local et notamment dans les jardineries du groupe. Ils ont ainsi démarré la culture de lentilles la campagne dernière. « Outre le suivi technique, c’est Christophe qui s’est chargé de trouver une solution pour la gestion post-récolte (tri, ensachage…) des graines.

Pour la prochaine campagne, on prévoit d’implanter du miscanthus (débouchage paillage en jardineries) et du lin textile. […] À chaque nouvelle culture, Agridomaine nous propose une étude de rentabilité, cela donne des éléments de réflexion pour se décider », note l’exploitant agricole. Une autre évolution en cours concerne le travail du sol. Pour le moment, « on est plutôt en travail simplifié ou en labour pour les cultures de printemps, mais on s’intéresse au semis direct sous couvert pour une approche plus respectueuse des sols », indique Thierry de Beauvillé. 

En premier plan, l’une des parcelles qui a été semée en direct sous couvert. Et c’est la parcelle au fond à gauche, à proximité des habitations, où devrait être implanté le miscanthus la campagne prochaine.  (©TNC)

L’exploitant peut alors compter sur l’accompagnement d’Agridomaine sur le sujet. « Choix des couverts, apport de davantage de compost sur les parcelles : on écrit ensemble le plan d’action. » La conversion a été engagée dès les semis 2021 sur quelques hectares pour « se faire une idée tout en restant prudent ». Agridomaine est aussi intégré dans d’autres décisions de l’exploitation comme la réflexion d’un nouveau bâtiment de stockage ou le changement de prestataire de travaux agricoles. À noter : l’exploitant agricole signe un contrat avec Agridomaine et un autre avec son ETA. 

« Par les agriculteurs, pour les agriculteurs »

En comptant la SCEA Poullain, Agridomaine suit aujourd’hui 14 fermes, soit environ 3 100 ha. Parmi les clients de l’entreprise, des exploitants agricoles qui ont une double activité comme Thierry de Beauvillé, ou des personnes qui souhaitent se dégager du temps pour développer la vente directe par exemple. Face à certaines critiques du terrain, Christophe Martin insiste : « nous ne sommes pas là pour reprendre des fermes. Agridomaine a été créé par des agriculteurs, pour les agriculteurs. On adapte nos services en fonction des besoins. Certains agriculteurs délèguent la gestion d’un site distant, mais il peut y avoir aussi d’autres raisons ». Il cite notamment les accidents de la vie : « une dame a perdu son mari agriculteur et nous a sollicités pour gérer la période de transition pendant 2-3 ans ». Autres cas de figure : des futurs retraités qui souhaitent lever le pied tout en gardant leur exploitation dans l’attente de l’installation d’un enfant ou d’un petit-enfant, ou encore pour aider des jeunes à reprendre une exploitation en difficulté financière (appui pour la banque).

Concernant le côté économique, le coût de gestion par Agridomaine peut varier de 50 à 100 €/ha environ. « La construction du tarif se fait toujours avec le client, et va dépendre de la typologie de l’exploitation, de la surface, du type de terres et des cultures présentes dans l’assolement », précise Christophe Martin.