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Académie d'Agriculture de France

Peut-on lutter contre l’érosion des sols ?


Christian Valentin, membre de l'Académie d'agriculture de France le 11/12/2020 à 08:20
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(©Pixabay)

Comme l'a encore confirmé le rapport de la FAO de 2015 sur l'état mondial des ressources en sol, l'érosion constitue la principale forme de dégradation des sols. Elle représente des pertes moyennes d'environ un millimètre par an. L'érosion des sols résulte de nombreux facteurs et processus qu'il importe de prendre en compte à différentes échelles d'espace et de temps.

Quels sont les principaux effets de l’érosion ?

L’érosion de la partie superficielle du sol entraîne une perte sélective des éléments les plus fins (argile, puis limon) et de la matière organique sous l’effet du ruissellement ou du vent. Or, ce sont justement l’argile et la matière organique qui permettent de stocker et d’échanger les éléments nutritifs des plantes. Il en résulte dès lors un appauvrissement du sol. De plus, en favorisant les pertes en matière organique, l’érosion augmente l’instabilité structurale des sols, les risques d’encroûtement superficiel et de ruissellement, causant ainsi une auto-accélération des processus de détachement.

Les effets hors-sites comprennent les problèmes d’envasement et d’ensablement des retenues et des cours d’eau. Pour les grands barrages, la réduction de la durée de vie des réservoirs, due à leur envasement, correspond à un coût considérable, d’où l’importance de limiter l’érosion en provenance de leurs bassins versants. La qualité des eaux superficielles continentales se trouve fortement influencée par le ruissellement et les particules détachées par l’érosion, souvent riches en matière organique et en éléments nutritifs. Il en résulte des risques en aval d’eutrophisation et de pollutions par les métaux lourds, les pesticides et des bactéries pathogènes.

Les transports et les dépôts de sédiments n’ont toutefois pas que des aspects négatifs, puisqu’ils permettent un transfert de fertilité depuis les versants aux bas-fonds et depuis les montagnes jusqu’aux deltas et aux océans.

Quelles sont les formes et les causes de l’érosion ?

Tout processus d’érosion comprend trois mécanismes :

  • le détachement de particules de sol,
  • leur transport,
  • et leur dépôt.

L’impact des gouttes de pluie sur la surface du sol arrache des particules terreuses (« rejaillissement » ou « splash », cf. photo ci-dessous) qui en retombant au sol, se réorganisent pour former des croûtes structurales. Ces croûtes réduisent la porosité superficielle, favorisent le ruissellement, et l’exportation des particules détachées par le rejaillissement. Le ruissellement apparaît ainsi le plus souvent lorsque l’intensité de pluie excède l’infiltrabilité du sol, qui se trouve réduite du fait de ces croûtes. Le refus à l’infiltration se manifeste par la formation de micro-flaques qui, en débordant, alimentent ce que l’on désigne par le ruissellement en nappe. Celui-ci transporte les particules issues du rejaillissement, plus qu’il ne les détache lui-même.

Dans une plantation de teck où le sous-bois est brûlé (nord du Laos), des racines et des cailloux protègent le sol de l’érosion due à l’énergie cinétique des gouttes. Ces figures en piédestal sont typiques de l’érosion par rejaillissement. (©C. Valentin)

Toutefois, sur pente, ce ruissellement – qui reste rarement uniforme – tend à se concentrer dans les dépressions : c’est le ruissellement concentré ; si sa vitesse atteint un certain seuil, il détache des particules en incisant le sol. Comme cette vitesse dépend du volume de ruissellement, l’apparition de ces incisions, sous forme de rigoles et de ravines, est directement liée à la superficie et aux états de surface plus ou moins perméables du bassin versant, et donc en grande partie de l’usage des sols. Dès lors, ces rigoles et ravines ne se forment pas que sur de fortes pentes, mais aussi sur tous les sols qui tendent à s’encroûter : sols limoneux, sols sableux pauvres en carbone organique. Il n’existe pas de différence de processus entre rigoles et ravines, la distinction entre les deux étant d’ordre agronomique : une rigole peut être effacée par le travail du sol, or la profondeur et l’efficacité de celui-ci dépend bien sûr des moyens utilisés, et donc des conditions économiques.

Érosion en rigole. Le ruissellement en nappe apparaît même sur une très faible pente et lors d’une pluie peu intense sur des sols limoneux sensibles à l’encroûtement. Ce ruissellement tend à se concentrer rapidement après de faibles longueurs de pente. Pays de Caux, France. (©C. Valentin)

Le sol peut ainsi s’éroder par la surface (érosion en nappe) ou par incision (érosion linéaire), mais aussi pour tout ou partie de l’ensemble de la masse, surtout lorsqu’il est humide ou saturé.

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