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Reportage

Plongée au cœur de l’usine Kverneland de Vendée, qui raconte 75 ans d’industrie


TNC le 21/12/2023 à 16:05
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Visite Usine Kverneland (© © TNC)

Le site, spécialisé dans la fabrication d'outils de travail du sol, a exceptionnellement ouvert ses portes pour son anniversaire. Un voyage teinté d’histoire, de robots soudeurs, d’innovations et d’aventures humaines.

Vus du ciel, ses toits, aux couleurs disparates façon patchwork, dévoilent son histoire, ses rachats, ses agrandissements. L’usine Kverneland, « KV » pour les intimes, des Landes-Genusson, en Vendée, fête ses 75 ans. La marque norvégienne, sous pavillon Kubota depuis 2012, y fabrique ses outils de travail du sol. Pour célébrer l’évènement, le site a exceptionnellement ouvert ses portes, pour un voyage dans le temps, solidement ancré dans le passé et résolument tourné vers l’avenir.

Si, administrativement, l’aventure commence en 1948, avec la création de la Sicam (Société industrielle de construction industrielle et métallurgie), les premiers pas de l’usine démarrent 30 ans plus tôt, au sortir de la Grande Guerre. Un forgeron, baptisé Georges Nauleau, se lance dans la fabrication artisanale de herses dans son petit atelier. Ce sont encore des chevaux qui tirent les outils, qui seront adaptés aux attelages 3 points des tracteurs dans les années 1970. En 1974, la Sicam se rapproche du groupe allemand Rau.

Semoir Unisem de la Sicam, une marque qui a longuement occupé l’usine. (© Kverneland)

C’est en 2001 que Kverneland débarque, important les méthodes de travail scandinaves puis japonaises. L’influence de Kubota se traduit dans l’approche Kaizen, « l’amélioration continue », la recherche, chronomètre et mètre en main, de l’optimisation. Le site est chargé, en 2023, de l’intégration du spécialiste du désherbage mécanique BC Technique (marque Phenix), avec la conservation de tous les salariés. 2024 marquera le lancement du Qualidisc version XL de 12,25 m de largeur et de la herse étrille Arcadia, qui auraient certainement fait rêver Georges Nauleau et son enclume.

L’usine, tout en longueur, couvre aujourd’hui 13 500 m², imbriqués au cœur de ce village de 2 500 âmes. Elle emploie 105 personnes, que renforcent 20 à 40 intérimaires. Dans un bassin qui compte le moins de chômage de France, avec des géants comme Fleury-Michon, Sodebo ou un peu plus loin les Chantiers de l’Atlantique, la chasse aux talents est féroce. Ce qui n’empêche pas les histoires de famille, aux allures de dynastie : un père et son fils travaillent à la soudure, une fille apprentie au service qualité prend la relève de son père tout juste parti à la retraite après 50 ans de service…

Les outils sont fabriqués et assemblés à la commande. (© Terre-net Média)

Depuis les Landes-Genusson, qui doivent leur nom à leur situation géographique, un étonnant plateau dans un paysage de bocage vallonné, Kverneland irrigue le monde. Près de 80 % de la production est exportée, de l’Europe jusqu’en Nouvelle-Zélande, sous les couleurs de la marque scandinave, de Kubota ou alors du vert de Great Plains, principalement pour les États-Unis. « Les outils à disques représentent 50 :% du chiffre d’affaires de l’usine. Nos produits phares sont le Qualidisc et le cultivateur Enduro », détaille Guillaume Hulin, directeur général du site.

Trois robots soudeurs permettent d’enchaîner les opérations. (© Terre-net Média)

L’usine ne produit qu’à la commande, pour limiter les stocks mais aussi pour répondre aux innombrables choix d’option. Toutes les machines sont conçues sur place, avec énormement de manipulations manuelles, sur des pièces allant de quelques centaines de grammes à une tonne : la soudure est un point clé. Trois robots de soudage à double torche épaulent les ouvriers. L’acier vient toujours d’Europe : Pays-Bas, Suède, Norvège, France…  Les disques sont fournis par les Forges de Niaux ; les flèches et pointes par le quartier général de Kverneland à Klepp.

La chaîne de peinture a été repensée, pour plus de sécurité et d’efficacité. (© Terre-net Média)

La chaîne de peinture, qui serpente au plafond, a été repensée au mois d’août 2023. Elle commence par l’accrochage, sur mesure selon le volume et le poids des pièces. Puis vient le grenaillage, qui passe l’acier du noir au blanc. Le four a été supprimé : le temps de parcours a été augmenté pour un séchage naturel en 120 minutes. « C’est plus de sécurité, la possibilité de changer de teinte en seulement 15 minutes et des économies d’énergie. Cela compte : notre contrat d’électricité a été multiplié par 4 », souligne Guillaume Hulin.

Il est possible de changer la teinte utilisée dans la cabine de peinture en 15 minutes. (© Terre-net Média)

Les contrôles sont omniprésents. Un bras 3D, bientôt secondé par un système laser qui fonctionnera sans pointage, permet de mesurer les pièces. L’épaisseur de la peinture est également scrutée, pour des questions de qualité mais aussi d’économie de produit. La mesure de l’impact d’une bille propulsée à grande vitesse permet de vérifier la dureté de l’acier. « Notre objectif est de ne pas dépasser 1 % du chiffre d’affaires en coûts de garantie », martèle Guillaume Hulin.

Mais tout cela ne serait pas possible sans la recherche. Le bureau d’études représente 15 % des effectifs et 5 % du chiffre d’affaires. Dans la salle dédiée aux prototypes trône un Qualidisc de 12,25 m avec un bon paquet d’heures au compteur. « D’habitude, on essaye toujours de voir s’il est possible de réutiliser ce qui existe sur d’autres machines, un essieu par exemple. Sur ce Qualidisc, tout est nouveau à part les disques », raconte Gaétan Pasquier, responsable du bureau d’études.

Dans la salle des prototypes, le Qualidisc 12,25 m est l’une des dernières nouveautés de Kverneland. (© Terre-net Média)

L’informatique permet de simuler les contraintes et de renforcer d’office certaines parties, avant même la construction. Les essais ont lieu sur place ou à Klepp, où les machines sont torturées à coup de milliers de torsions et de brusques secousses. Les prototypes sont démantelés. Impossible de les vendre : c’est comme s’ils avaient vieilli trop vite.

Dans l’assistance, un homme regardait tout cela avec un œil aiguisé. Yasukazu Kamada, président de Kverneland Group, qui cédera sa place au 1er janvier 2024 à Arild Gjerde, actuel responsable ventes et marketing, a fait le voyage depuis Osaka, siège de la maison mère de Kubota. En expert, il conclut : « Je salue le parcours de cette petite usine devenue un centre de rayonnement mondial et d’excellence ».

Guillaume Hulin, directeur général du site, et Yasukazu Kamada, président de Kverneland Group, saluent l’anniversaire de l’usine. (© Terre-net Média)