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Académie d'agriculture de France

Le recensement agricole 2020 : quels enseignements ?


Jean-Marie SÉRONIE, membre de l'Académie d'Agriculture de France le 03/03/2022 à 07:13
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(©Ministère de l'agriculture)

Le ministère de l'Agriculture vient de livrer les premières informations du recensement agricole. Quand on scrute attentivement, les premières images de cette photo sont plutôt rassurantes et s'éloignent des clichés souvent ressassés. Le point avec l'Académie d'agriculture de France.

À première vue, une exploitation agricole sur cinq a disparu en dix ans. Effectivement nous sommes passés de 490 000 à 390 000 exploitations, ce qui parait inquiétant. Mais en parallèle, la surface moyenne des fermes a cru de 25 % passant de 55 à 69 hectares, ce qui peut paraître énorme. En fait un raisonnement détaillé, et exempt de tout parti ou à priori de posture, donne une couleur plutôt souriante à cette photo trop statique.

La restructuration de l’agriculture ralentit

La moitié de la baisse du nombre total des exploitations est le fait d’entreprises réalisant moins de 2 000 € de recettes par mois ! Par ailleurs il y a presque 15 000 sociétés en plus, c’est-à-dire des agriculteurs qui ont décidé de se regrouper pour continuer leur métier en travaillant ensemble. La perte d’exploitations « économiques » doit donc être plutôt de l’ordre de 40 000, soit une baisse d’un peu moins de 1 % par an. Concrètement cela représente, en moyenne, la disparition d’une exploitation par commune en dix ans ou à peine plus ! […]

Les emplois baissent de 11% mais surtout changent

Si le nombre total des exploitations baisse de 21 % celui des emplois en équivalent temps plein ne baisse que de 11 %.

Cela montre que le système du travail se transforme très rapidement. Les aides familiaux sont en train de disparaitre : leur nombre a baissé de près de 40 % en 10 ans, et ils ne représentent plus aujourd’hui que 8 % du travail dans les fermes françaises. Ce mouvement est le reflet d’une professionnalisation et d’un progrès statutaire.

On peut être surpris de constater que le pourcentage de femmes cheffes d’exploitation est stable à 26 %. Il faut attendre davantage de données pour analyser ce chiffre et savoir s’il y a vraiment une stagnation de la féminisation de l’agriculture. […]

Il y aura demain moins d’exploitations à reprendre !

[…] En 2010, il y avait 314 000 exploitants âgés de plus de 50 ans, ils ne sont plus que 287 000 en 2020. Par ailleurs, le nombre d’agriculteurs exploitant en société a augmenté de 10 % en 10 ans, et leur poids est passé de 30 % à 40 % du nombre total des exploitations.

Il y aura donc, tout simplement, dans les années à venir, nettement moins d’exploitations à reprendre que dans la dernière décennie.

Ce qui n’enlève rien au fait qu’il faut des repreneurs compétents, formés et motivés !

La formation : un enjeu qui reste essentiel

En 2020, 17 % des agriculteurs âgés de moins de 40 ans n’ont pas le bac, 40 % ont juste le bac, et 43% ont un diplôme supérieur.

Cela veut dire que – dans un monde en mouvement rapide, dans un contexte de variabilité des prix des produits, et avec une transition agroécologique à assurer – plus de la moitié des jeunes chefs d’exploitations agricole ont arrêté leurs études au bac. Cela montre (malgré les progrès indéniables réalisés) l’importance de la formation initiale, du parcours de début de carrière, mais surtout de la formation continue et de l’accompagnement pour réussir un métier qui est, à l’évidence, de plus en plus complexe.

Les exploitations se transforment assez vite

Le nombre d’exploitations en agriculture biologique a été multiplié par 2,5, et aujourd’hui elles représentent 12 % des exploitations. Hormis pour les micro-fermes, le pourcentage d’exploitations bio décroit avec la taille, même si les fermes de plus de 250 000 € de chiffre d’affaires cultivent presqu’un tiers de la surface totale en bio. […]

Vers 320 000 exploitations en 2030 ?

En projetant à l’identique la dynamique actuelle, on peut imaginer qu’en 2030 il pourrait y avoir autour de 320 000 exploitations agricoles faisant travailler 440 000 agriculteurs (350 000 ETP) et 160 000 salariés en CDI. Cela représenterait 55 000 agriculteurs en moins et 20 000 salariés en plus.

La restructuration de l’agriculture française ralentit donc, elle reste constituée d’exploitations à taille modeste, et l’enjeu du salariat agricole devient une question majeure.

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https://www.academie-agriculture.fr/

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