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Du forgeron aux robots

100 ans de machinisme agricole vus par les concessionnaires


TNC le 15/02/2019 à 06:02
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Début février, le Sedima (syndicat des concessionnaires en machines agricoles) a fêté les 100 ans de sa création. C’est l’occasion de partager l’histoire d’un siècle de mécanisation agricole vu par un philosophe et par les distributeurs de matériels. Si les fondamentaux du métier n’ont pas évolué, ils sont influencés par les nouvelles technologies.

« Au début était le forgeron. C’était il y a plus de cent ans. Un artisan, un village, des fermes. La France du début du XXe siècle glorifiait le geste sûr et la virtuosité de l’entretien à la pièce. Il y avait encore un peu de Moyen-Âge dans ces ouvrages à façon, faits à la force des bras et des forges. Les mécaniciens de village cohabitaient avec les quincailliers, les charrons, les marchands, les petits constructeurs » déclare Anne Fradier, secrétaire générale du Sedima.

C’est dans ce contexte que 21 marchands réparateurs créent le premier syndicat de la distribution de machines agricoles. « Il faut compenser le déficit de bras, généré par le premier conflit mondial qui vient de s’achever. La mécanisation se doit de progresser mais la motorisation n’en est qu’à ses balbutiements », commente Roger-Pol Droit philosophe et écrivain. « Les engrais sont encore peu utilisés et pourtant les premières révolutions sont déjà en marche comme le désenclavement des zones rurales par le chemin de fer. Pourtant il n’y a pas encore de rupture avec le monde du passé. »

En 1939, la France compte 29 000 tracteurs et près de 4 millions de chevaux dans l’agriculture

« Au lendemain du second conflit mondial, les tickets de rationnement montrent une pénurie alimentaire patente. La déferlante du plan Marshall accélère la mécanisation de l’agriculture. Mais cette époque marque aussi l’entrée dans une ère différente, au niveau institutionnel par exemple avec la création de l’Inra (1946), le marché commun (1952), la Pac (1957). Dans les années cinquante, la population agricole est divisée par deux et les rendements sont eux multipliés par deux grâce aux engrais, à la génétique et à la mécanisation qui vit un développement prodigieux », commente Roger-Pol Droit.

En France entre 1949 et 1989, le nombre de tracteurs est multiplié par 15 !

« Le premier choc pétrolier de 1975 voit reculer le nombre de machines agricoles vendues, pour la première fois. Vers la fin des années 80, les premières désillusions sur la société de consommation voient le jour. En agriculture, on constate que les rendements ne sont pas illimités. Aujourd’hui en 2019, apparemment tout change. En agriculture, nous passons d’une crise de l’insuffisance alimentaire à une crise de la confiance. On constate l’arrivée de plusieurs agricultures avec l’apparition de l’exigence de santé et d’authenticité. » Et pourtant certaines choses ne changent pas.

En relisant l’intégralité du discours constitutif de l’ancêtre du Sedima daté de 1919, Pierre Prim, actuel président du syndicat nous démontre que, si le temps a passé, les enjeux restent les mêmes.  « Les fondamentaux du métier (NDLR : services de proximité, dépannage, conseils) n’ont pas évolué en 100 ans mais ils sont influencés par les nouvelles technologies ». En effet, le tournant du siècle a fait naître des machines numérisées, a fait rouler les premiers robots, a développé des algorithmes. Des vents d’ubérisation se lèvent annonçant la disparition de secteurs entiers.

« Plus que jamais, le distributeur se rapproche de son client et ajoute du service aux machines. Il doit pouvoir régler des algorithmes génériques pour chaque exploitation. Il doit veiller sur les capteurs, les entretenir, les remplacer. De nouvelles complexités apparaissent. Les maîtriser lui assurera une place de choix dans l’agriculture du futur. D’autant que les machines plus robotisées, plus innovantes, veulent respecter l’environnement et servir l’économie. » Rendez vous dans 100 ans pour un premier bilan ?